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Aurélie, enceinte de jumeaux à 12 ans

L’histoire d’Aurélie, révélée dans notre édition de dimanche dernier, a ému le pays. Cette adolescente accouchera bientôt de jumeaux, alors que sa famille vit dans des conditions d’extrême pauvreté. L’appel à l’aide de sa mère a toutefois été entendu. La générosité des Mauriciens va permettre aux futurs bébés de naître dans un environnement décent.

Patrick Virginie, travailleur social, remettant des dons à la famille.

 

Il y a une semaine, Aurélie* et sa mère se trouvaient au comble du désespoir. Comment cette adolescente de 12 ans allait-elle pouvoir donner naissance à des jumeaux dans de telles conditions de précarité ? Non seulement elle est encore une enfant et le garçon qui l’a mise enceinte s’est volatilisé, mais surtout sa famille côtoie une misère que l’on aurait peine à imaginer. Avec sa maman, sa soeur de 10 ans et son frère de 3 ans, Aurélie habitaient jusqu’à aujourd’hui dans un abri de fortune, sans eau ni électricité, qu’un marchand de sommeil leur louait pour Rs 2 000 par mois à Pointe-aux-Sables.

L’équipe de 5-Plus n’a pu que s’indigner d’une telle situation et a raconté la triste histoire de cette famille démunie dans son édition de dimanche dernier. La mère d’Aurélie, qui a lancé un vibrant appel à l’aide par l’intermédiaire de notre publication, était alors loin de s’imaginer que le malheur des siens allait toucher le cœur de nombreux Mauriciens. Son témoignage après notre parution a été relayé par Radio One. Puis plusieurs associations et de nombreux particuliers se sont mobilisés et les dons ont commencé à affl uer. La famille a déjà reçu deux berceaux, des couettes, des biberons, des vêtements pour bébés et de la nourriture. Quasiment tout ce qu’il faut pour accueillir dans de bonnes conditions les jumeaux qui devraient naître la semaine prochaine.

Parallèlement, le ministre des Terres et du Logement, Abu Kasenally a offert à la famille un terrain de 7 perches, toujours à Pointe-aux-Sables, sur lequel une maison sera construite dans les deux prochains mois. En attendant que leur nouveau logement soit construit, Aurélie et ses proches seront accueillis dans une demeure que Laval Hoareau, un homme ému par le sort de la jeune fi lle, a gentiment mise à leur disposition pour les trois prochains mois.

 

La mère d'Aurélie, émue devant le terrain dont elle sera bientôt propriétaire. Ci-contre, la maison dans laquelle la famille loge désormais en attendant la construction d’une nouvelle demeure.

 

«C’est quand j’ai lu 5-Plus et que j’ai écouté la radio que j’ai pris connaissance de cette triste histoire qui m’a vraiment touché. C’est pour cela que je leur ai cédé la maison», explique ce bienfaiteur. Des bénévoles de la région travaillent d’arrache-pied pour nettoyer et aménager le lieu de résidence afi n que la famille puisse s’y installer dès ce dimanche, en disposant de l’eau courante et de l’électricité.

Alors qu’elle n’entrevoyait plus aucun espoir il y a quelques jours, la mère de famille ne cache pas son soulagement. «Quand j’ai appris la nouvelle, c’était une joie immense. Je n’aurais jamais cru qu’un jour je deviendrais propriétaire d’un terrain», dit-elle. Elle est aussi extrêmement reconnaissante envers tous les Mauriciens dont la générosité a été exemplaire. «Je tiens à dire merci pour toute l’aide que j’ai pu recevoir et que je reçois encore de tous les citoyens mauriciens. Cet élan de solidarité me fait chaud au coeur. Sans tout ce monde, je n’aurais pas eu le sourire aujourd’hui, je n’aurais pas pu bien dormir et nourrir mes enfants», lance-t-elle la voix empreinte d’émotion.

Si elle reste préoccupée par sa grossesse précoce, la jeune Aurélie se montre plus positive que quand nous l’avions rencontrée pour la première fois. «J’ai un peu peur de l’accouchement mais je me sens rassurée maintenant car mes enfants et ma famille auront un toit pour vivre. Je suis sûre que je vais m’en sortir.» Comment voit-elle l’avenir maintenant que sa famille n’est plus seule face à l’adversité ? «Tout cela est un nouveau départ dans ma vie. Par la suite, je désire reprendre mes études car c’est cela qui me permettra d’avoir un emploi. Je veux pouvoir élever mes enfants dans un bon environnement. Je veux être apte à être une bonne mère malgré mon âge», affirme l’adolescente. Sa maman est la première à la soutenir. «Je soutiendrai ma fille jusqu’au bout pour l’éducation de ses enfants», assure cette femme qui s’apprête à devenir grand-mère à seulement 30 ans.

Patrick Virginie, président de l’association Warm Heart Foundation, qui s’est chargée de la collecte des dons, n’en revient pas de la réaction des gens. «C’est extraordinaire de constater cet élan de solidarité venant de tous les Mauriciens. Je suis d’autant plus heureux que les enfants de cette famille vont pouvoir reprendre le chemin de l’école très bientôt.» Les démarches ont en effet été entamées pour que la soeur et le frère d’Aurélie soient scolarisés rapidement. Le travailleur social annonce par ailleurs l’arrivée de nouveaux dons, de l’étranger de cette fois : «On va recevoir une aide de la diaspora mauricienne en Australie. Ses représentants ont déjà pris contact avec moi », dit Patrick Virginie.

 

* Prénoms fictifs

 


 

Marie Anne Lagane, la lanceuse d’alerte

 

À l’origine de ce grand élan de solidarité, il y a une femme, Marie Anne Lagane, de l’association Will Fly. C’est elle qui a mis en lumière la situation dramatique de la famille d’Aurélie, dans un message posté sur le réseau social Facebook il y a une dizaine de jours. Une alerte qui a amené l’équipe de 5-Plus à enquêter et à publier cette histoire dimanche dernier. «Je suis très touchée de la réaction généreuse des Mauriciens, dit-elle. D’ailleurs, je constate que dans ce genre de cas, la société civile est plus réactive et effi cace que l’État.» Cette travailleuse sociale estime qu’il y a un problème dans une société où une adolescente de 12 ans peut tomber enceinte. «Le devoir des adultes est de prendre conscience qu’il y a des lacunes dans notre société et qu’il est impossible de rester les bras croisés», affi rme Marie Anne Lagane.

 

Aurélie et sa maman lors d’une émission avec Finlay Salesse de Radio One.