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Invitée à chanter en Inde et à l’Unesco, en France

Elle prend des cours de chant depuis l’âge de cinq ans.

On l’avait connue petite fille, avec son sourire désarmant de tendresse et sa bouille à croquer. Elle avait alors neuf ans. On l’a retrouve aujourd’hui, ado, heureuse, point timide, avec la langue joliment pendue. Elle s’apprête à aller chanter dans un événement d’envergure, à Paris.

Avis aux amateurs d’enchantement… Il suffit de l’écouter pour tomber sous son charme. Ses cordes vocales, Jane Constance les maîtrise à merveille. Pas étonnant, donc, qu’elle a été choisie pour donner un concert – sur une initiative de la Global Rainbow Foundation – le 3 décembre à l’Unesco à Paris, dans le cadre de la Journée internationale du Handicap. «Je suis très heureuse à l’idée de participer à ce projet dont l’objectif est de démontrer qu’avoir un handicap n’est pas un obstacle», confie Jane, étudiante en Form III au collège Lorette de Curepipe. 

 

À 14 ans, elle a compris l’essentiel : faire de ses faiblesses une force. C’est ainsi qu’elle a réussi à se faire connaître des Mauriciens à travers divers événements – spectacles et autres concerts privés ou publics – durant lesquels elle n’a cessé de partager son talent pour le chant, tout en racontant son histoire. Celle d’une battante née. «Ne pas être comme tout le monde ne veut pas dire ne pas pouvoir faire des choses», dit-elle d’un ton assuré.

 

À la voir chez elle, difficile de croire qu’elle ne voit pas. Pourtant, malgré sa cécité – de naissance –, Jane réussit souvent le tour de force de faire oublier à ceux et celles qui évoluent à ses côtés, qu’elle est différente : «Je me sens bien comme je suis. Je me suis, d’ailleurs, toujours sentie bien dans ma peau. Le monde, je l’imagine dans ma tête et tant mieux. Ainsi, j’imagine que tout le monde est pareil, sans différence. Je crois que ma chance, c’est d’être née aveugle. C’est ma façon d’être et cela m’aide à me surpasser tous les jours. J’aime ce défi.» 

 

Ainsi, dans sa maison, elle est tout à fait autonome, capable de se déplacer toute seule, de prendre sa douche, de s’habiller toute seule, et de se débrouiller sans avoir recours à de l’aide : «Je regarde la télé. D’ailleurs, j’aime bien la série Violetta. Car, comme moi, l’héroïne adore chanter. Je suis aussi souvent devant les chaînes d’infos comme la BBC.»  Ce qu’elle aime aussi : jouer avec son chien Rex, son fidèle ami, ou faire de la cuisine ou plutôt, précise-t-elle, aider sa mère à faire des gâteaux. «Je me débrouille d’ailleurs pas mal, surtout lorsqu’il s’agit de gâteaux au chocolat», laisse-t-elle échapper. 

 

Un exemple

 

Sa vie, dit-elle, s’apparente à un beau voyage. Et avec sa voix de force et de soleil, ses mélodies envoûtantes et son sourire lumineux, elle est, pour ses proches, comme un véritable antidote aux coups de blues et est une vraie leçon de vie : «Handicapé ou pas, différent ou pas, on a tous un talent. On est tous doués pour quelque chose. Je veux être cet exemple qui fait dire aux gens qui sont comme moi, ou encore aux parents qui ont un enfant handicapé, que rien n’est impossible.»

 

Il lui suffit ainsi de chanter devant un auditoire pour que, tout de suite, la magie s’installe. Ayant une voix lui permettant d’atteindre des aiguës, Jane revendique fièrement ses influences : Mariah Carey, Céline Dion ou encore Andrea Bocelli. Et, avec sa technique, la jeune fille envoûte toujours les mélomanes et touche leur corde sensible grâce à la limpidité de sa voix, qu’elle délivre avec naturel, sans se forcer, sans jamais en faire trop : «Avec la musique, je veux donner de la joie, de la fête, du plaisir. J’aime que les gens s’évadent.»

 

Si, toute petite, sa famille – son père Tony (il travaille à son compte) et sa mère Françoise (enseignante au primaire) – avait la primeur de ses talents vocaux, Jane s’est très vite fait connaître en déclanchant des standing ovations lors des événements où elle était invitée à chanter. Elle-même longtemps bercée par la musique, elle devait, à l’âge de cinq ans, poussée par ses parents – qui avaient foi en ses aptitudes –, suivre sa «voix». «C’est à ce moment-là qu’on a commencé à lui faire prendre des cours de chant», explique Tony, lui-même musicien, qui ne cache pas sa fierté devant les réalisations de sa fille. 

 

Jane, de son côté, se définit comme une force tranquille, studieuse, qui «aime apprendre» et qui, grâce à une bonne organisation et de bons équipements, se sent très bien dans son collège. Dans sa chambre, elle rêve aussi de fabuleux destins, bercée par les tubes de ses idoles ou encore en composant des chansons comme les titres Je m’appelle Jane et Never walk alone, qui racontent son vécu et qui feront certainement partie, dit-elle, de son répertoire lorsqu’elle chantera à l’UNESCO. «Je suis très fière à l’idée d’aller chanter pour une telle organisation et surtout d’être associée à un événement qui s’insère dans la lutte pour la reconnaissance des autrement capables.»

 

Emploi du temps chargé

 

Si d’abord, Jane s’envolera pour l’Inde afin de répondre à une autre invitation (pour un événement international d’art inclusif dédié aux autrement capables), elle est, dit-elle, nullement stressée : «Bien au contraire, j’ai hâte. Je vais d’ailleurs passer les prochains jours à bien me préparer vocalement, bien préparer mon tour de chant avec plusieurs chansons de mon répertoire en anglais, en français et aussi en espagnol. Je vais aussi choisir les vêtements que je vais porter. Car, après tout, c’est une grande occasion. Comme c’est un voyage qui coûte cher, je vais aussi faire appel à la générosité des Mauriciens pour nous aider à financer ce déplacement.»

 

Si son rêve est de faire carrière dans la musique, «ou de devenir avocate ou psychologue», et avec un train de vie souvent dicté par un emploi du temps lié à sa passion, ses parents font toutefois en sorte que Jane, actuellement en période d’examens, ait une vie sans histoire, ou presque. Elle suit une scolarité normale, pratique la natation (toutes les semaines à Blue-Bay), passe son temps libre à surfer sur Internet ou à tchacher avec ses amis sur Google+ et, tout cela, grâce à un ordinateur spécial dans lequel ses parents ont choisi d’investir. «Je peux, plus ou moins, faire comme tout le monde, c’est-à-dire faire des recherches et même commander des livres.»

 

En sus de son handicap, la chose qui la différencie des autres, c’est qu’elle consacre plusieurs heures à se perfectionner dans la musique, que ce soit en chant ou au piano, qu’elle pratique depuis l’âge de sept ans. Mais tout ça l’amuse. «Elle ne rechigne jamais quand il faut faire des répétitions», explique son père qui reconnaît que la petite notoriété de sa fille et ses nombreuses sollicitations pour chanter dans des événements, ont bouleversé leur quotidien. Chez elle, tout est simplicité et modestie, bien que son parcours soit (déjà) riche en réussite – elle est aussi étudiante en musique (grade 5 selon la Royal School of Music). 

 

Quand ses parents voient la grande fille que Jane est devenue, ils ne peuvent pas ne pas penser à ces moments de panique, d’incertitude et de doute à la naissance de leur petite chérie. «Tout n’a pas été facile. On a construit notre vie autour d’elle et on investit énormément pour son épanouissement personnel. On s’est toujours raccrochés à la grande volonté qui habite Jane. Elle n’a jamais abandonné devant un obstacle.» Elle qui se donne pour toujours faire ce qu’elle aime sans jamais baisser le bras et suivre son chemin… sans fausse note ! 

 


 

Une habituée de la scène

 

C’est son univers. Depuis quelques années, Jane n’a cessé d’être à l’avant-plan lors de plusieurs événements. En 2010, elle avait été invitée par Dave, finaliste de l’émission La Nouvelle Star, à venir chanter lors de son concert. La jeune fille a également poussé la chansonnette lors de plusieurs événements : Mauritius Sports Awards, célébrations de l’Indépendance au Champ de Mars, Vibrasyon Dezil aux côtés des meilleurs artistes de l’océan Indien, entre autres. Elle a aussi remporté le Yogeesh Patroo Award par le ministère de la Sécurité sociale en décembre 2013. En avril, Jane a aussi eu droit à son premier concert solo au conservatoire François Mitterrand.

 


 

Un concert exceptionnel 

 

Ambassadrice de l’ONG Global Rainbow Foundation (GRF), c’est donc à l’initiative de cette instance que Jane Constance se rendra à Paris pour un concert exceptionnel à l’auditorium de l’UNESCO. Pour le show, la Mauricienne sera accompagnée de Luan Pommier, une jeune artiste guadeloupéenne, également malvoyante. «L’objectif de cet événement est de conscientiser la communauté locale et internationale sur le fait qu’un handicap n’est pas un obstacle, mais qu’il faut absolument que les structures et lois nécessaires soient mises en place et implémentées afin d’accompagner au mieux les autrement capables», explique Armoogum Parsuramen, fondateur et président de la GRF, en parlant de l’événement «co-hosted» par l’UNESCO Paris, la GRF ainsi que l’ambassade de Maurice à Paris. 

 

Le concert se tiendra en présence de personnalités de l’UNESCO et de plusieurs invités de renom qui oeuvrent pour la reconnaissance et l’intégration des personnes autrement capables. C’est à l’occasion de la Journée internationale de la canne blanche, qui est observée le 15 octobre, que ce concert «prestigieux» a été officialisé. 

 

Armoogum Parsuramen fait aussi un appel à la générosité des Mauriciens pour rendre possible le déplacement de Jane. «Ce concert dans les locaux de l’UNESCO, à Paris, et en présence des VIP de cet organisme, mettra en exergue non seulement le talent de deux jeunes filles au parcours exceptionnel, mais aussi la nécessité de mettre en place davantage de structures adaptées pour les handicapés, à Maurice et ailleurs. Nous avons besoin de fonds pour le déplacement ainsi que pour la logistique une fois à Paris. Mais nous savons que nous pouvons compter sur la solidarité  des Mauriciens.»

 

Par ailleurs, du 12 au 17 novembre, Jane sera en Inde pour participer à un autre événement d’art inclusif dédié aux autrement capables : SAMBHAV 2014.