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Le suicide n’est pas une solution : Messages d’espoir de survivants

Rhena a tenté de se tuer, mais a été sauvée in extremis. David y a renoncé à la dernière minute. Ils sont jeunes et mènent désormais une vie remplie. Ils sont heureux d’avoir survécu.

Du noir. Rien que du noir. Il y a des moments comme ça, où rien ne semble avoir de sens, où la douleur est trop présente, où l’espoir d’un nouveau jour se noie dans le… noir. La déprime. Le mal-être. L’horreur. Comment bascule-t-on ? Qu’est-ce qui pousse à vouloir en finir ? Les raisons sont multiples, dépendent des gens, des situations, de la capacité à encaisser les épreuves. Le 10 septembre, l’on observait la Journée mondiale de la prévention du suicide. De plus, le suicide d’une adolescente a choqué plus d’un. Surtout que les élèves du collège Hindu Girls ont manifesté pour exprimer leur colère après cette mort, et mettre en cause la rectrice du collège (voir l’histoire dans les pages consacrées aux faits divers).

 

Ses repères. Envolés. La jeunesse se débat aujourd’hui dans un monde qui bouge trop vite. À l’adolescence, les sentiments sont exacerbés. Les peurs plus effrayantes. Les joies plus intenses. Les moments de tristesse plus destructeurs. Rhena n’a que 18 ans. Mais elle le sait, la vie est une lutte perpétuelle. À 16 ans, elle a enchaîné les galères et a décidé d’en finir : «Je n’en pouvais plus.» Son petit ami l’a laissée tomber. Pourtant, c’était son premier amour. «Je lui ai donné ma virginité», avoue-t-elle aujourd’hui, avec une pointe de regret. Ses parents, ignorant la situation, lui mettent, à ce moment-là, la pression pour qu’elle réussisse ses examens : «Mais mes résultats du School Certificate sont médiocres. Et mon père rentre dans une colère noire.»

 

Privée de sorties, d’accès à Internet, de portable. Le cœur en miettes. Elle craque : «Je me suis sentie tellement mal que je ne savais plus quoi faire, je n’avais personne à qui parler. Puis l’idée du suicide qui trottait dans ma tête depuis un certain temps s’est imposée et j’ai décidé de passer à l’acte. J’avais trop mal, je voulais que ça s’arrête.» Elle dévalise l’armoire à pharmacie de son grand-père, met un peu de musique, s’allonge sur son lit et se laisse aller : «Je sentais que c’était la fin, enfin.» Mais elle se réveille à l’hôpital, complètement perdue : «Je me suis ratée. Mon grand frère est arrivé, j’étais inconsciente. Il a appelé le SAMU.» Les premiers pas de sa nouvelle vie ne sont pas faciles : «Je ressentais plusieurs choses : de la culpabilité, un sentiment d’échec, mais aussi du soulagement.»

 

Reconstruction

 

Ses parents ne rendent pas les choses faciles : «Ma maman n’arrêtait pas de pleurer. Mon papa me disait que je lui faisais honte.» Mais très vite, la famille est prise en charge par un psychologue. Grâce à lui, Rhena arrive à se reconstruire petit à petit : «Mes parents ont aussi changé. Ils ne me culpabilisent plus. Nous parlons plus ouvertement. Même s’ils sont toujours trop protecteurs, ils sont moins sévères, moins demanding.» Les mois qui ont suivi sa tentative de suicide ont été des mois de reconstruction, de dépassement de soi et de remise en question : «Ça a été dur. Mais c’était nécessaire.»

 

Elle se prépare actuellement pour ses examens de HSC, a retrouvé une certaine stabilité et ne regrette pas une seconde d’être en vie : «Ce n’est pas tous les jours facile. J’ai tendance à être déprimée très vite. Mais je sais maintenant comment me gérer pour ne pas tomber trop bas. Alors, je me concentre sur les bonnes choses et je me dis que ma vie est un cadeau.» Si elle n’a pas d’amoureux, il lui reste ses amies qui ne l’ont jamais lâchée : «Elles m’ont soutenue et ont essayé de me comprendre.» David, lui, a pu compter sur sa maman. Tout simplement : «Elle m’en veut encore un peu de ne pas lui avoir parlé plus tôt. Mais elle m’épaule et m’accompagne.»

 

Aujourd’hui, le jeune homme a 22 ans. Il est bien dans sa peau et dans ses pompes. Il a recollé les morceaux de sa vie grâce à celle qui est toujours à ses côtés. Pourtant, il y a trois ans, il voulait tout effacer, faire disparaître son existence. Amoureux fou de Valérie, il se voyait déjà finir sa vie à ses côtés. Mais au final, il a failli mettre un terme à sa vie le jour où la jeune fille l’a quitté. «Notre histoire durait depuis trois ans. Un jour, elle m’a dit qu’elle ne m’aimait plus. Plus tard, j’ai appris qu’elle sortait avec un autre. J’étais effondré. Je ne voulais plus voir personne, plus vivre. Tous mes espoirs étaient anéantis», raconte-t-il. Déprimé, il néglige ses études, reste enfermé dans sa chambre, évite ses amis. Puis, ne pouvant plus supporter la rupture, il décide de se tuer en se jetant du haut d’un pont.

 

S’en sortir

 

Il part en pleine nuit et s’apprête à commettre l’irréparable : «Je pensais à elle, j’en avais assez. Puis, je ne sais pas ce qui s’est passé, mais je n’ai pas sauté. J’ai vu le visage de mes proches, je me suis dit que je devais lutter et que j’allais m’en sortir.» En rentrant chez lui, il se confie à sa mère (son père est décédé depuis longtemps) : «Elle était en colère, puis en larmes. Mais on a beaucoup prié. Elle m’a écouté. Elle ne m’a pas lâché une seconde. C’est elle qui a reconstruit ma vie. Elle m’a donné, tous les jours, une nouvelle raison de vivre. Elle me disait : «Aujourd’hui, il fait beau. On va à la mer», «Il te faut un T-shirt tendance, on va te l’acheter». Chaque jour, il y avait quelque chose de nouveau. Chaque jour, elle me donnait une raison d’avancer.»

 

David aime à nouveau depuis quelques mois : «Mais avec beaucoup de retenu. Je ne suis plus la même personne. Je me protège avant tout. C’est dommage pour cette fille, mais je dois penser à moi. J’aimerais pouvoir tout lui donner, mais je sais que je me mettrais en danger. Je ne peux pas faire ça.» Vouloir mourir ouvre une blessure trop profonde qui demande du temps et de la volonté avant de cicatriser… un peu : «J’aurai toujours ces moments en tête. Comme une ombre. Mais je suis heureux d’être là aujourd’hui, de pouvoir passer du temps avec ma maman, de boucler mes études, de penser à trouver du travail… J’aurais manqué toutes ces choses.» Tous ces moments de bonheur, ces découvertes, ces petits plaisirs, ces sensations nouvelles.

 

Alors, même s’il lui arrive de broyer du noir, il cherche toujours la lumière, désormais. Et quand on veut la trouver, elle est là, explique-t-il.

 


 

En chiffre

 

Janvier à juillet 2014 :  56 cas de suicide enregistrés et 262 tentatives de suicide.

2013 : 82 cas de suicide  et 395 tentatives  de suicide. 

 


 

 

Befrienders, une main tendue

 

Ça ne va pas ? Un coup de blues ? Ne restez pas avec vos problèmes. Vous pouvez en parler aux bénévoles de Befrienders, une association qui œuvre pour la prévention du suicide. Un numéro est à votre disposition : 800 9393 (de lundi à vendredi : de 15 heures à 21 heures – Le samedi : de 9 heures à 21 heures – Le dimanche : de 9 heures à midi et de 18 heures à 21 heures).

 


 

Mieux vaut prévenir…

 

On peut prévenir le suicide. Said Ameerbeg, sociologue et psychologue, en est sûr. L’auteur de l’étude Risk factors associated with suicide in Mauritius fait des propositions concrètes pour faire face à ce problème de société. Il faudrait miser sur la formation, la sensibilisation et la disponibilité de certains services.

 

Formation

 

- Des couples avant le mariage. Ils pourront ainsi donner l’encadrement nécessaire, en tant que parents, afin de produire des citoyens responsables et minimiser la souffrance de l’individu.

 

- Des Team Leaders parmi les jeunes. Ils promouvront la sensibilisation des adolescents contre les fléaux sociaux, incluant le suicide.

 

- Des groupes d’entraide parmi les rescapés de suicide. Pour éviter les rechutes.

 

Sensibilisation

 

- Conscientiser la population à travers les médias et des campagnes sur les billboards, entre autres.

 

- Inculquer les valeurs morales/humaines au primaire et au secondaire.

 

- Sensibiliser la famille contre les fléaux sociaux, incluant le suicide, à travers les chefs religieux.

 

Service

 

- Des services professionnels d’écoute à travers l’île.

 

- Un suivi psychologique pour les familles qui ont perdu un des leurs.

 

- Plus de loisirs aux adultes (centres communautaires) et aux jeunes (centres de jeunesse).