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«Goulous» de Stanley Harmon : dessine-moi l’esclavage 

L’artiste a lancé sa nouvelle bande dessinée qui parle, bien sûr, d’esclavage et de marronnage, ce 15 février, au Centre Nelson Mandela. C’était dans le cadre des activités autour de Nouvo Iknographi Esclavaz (la nouvelle iconographie de l’esclavage), avec aussi une expo-vente artistique jusqu’au 8 mars. Stanley Harmon nous en dit un peu plus sur lui et son projet. 

Tout d’abord, présentez-vous…

 

D’abord, il y a eu les études. La bande dessinée et moi, ça a commencé au collège St Mary’s. À l’époque, il y avait des concours de bande dessinée organisés par l’Alliance française de Maurice où j’ai brillé à deux reprises avec mes amis. Puis, il y a eu le théâtre auquel j’ai quand même donné pas mal d’années, avec notamment Agaléga 1806 en 2009 lors du Festival International Kreol. L’artiste, à Maurice, a besoin de se «diversifier» pour survivre. Après un parcours tertiaire au MGI, j’ai fait des illustrations de livres, des fresques, de la BD encore, de la peinture, de la vidéo 3D et, en ce moment même, je fais de la réalisation de film.

 

Parlez-nous du projet «Goulous»...

 

D’abord, je remercie le Centre Nelson Mandela pour la Culture Africaine (NMCAC) d’avoir porté ce projet avec moi. Goulous est une suite évidente d’un premier projet réalisé en 2004, soit la première BD en créole sur l’esclavage à Maurice, Zeek Melia, d’Alain Romaine avec qui j’ai collaboré en tant que bédéiste. Bien sûr, entre 2004 et 2024, j’ai fait plein de choses. Mais c’est lors d’une expo au NMCAC que j’ai fait la proposition à Stéphan Karghoo, le directeur, et à Oliver Thomas, le Chairperson, de renouer avec ce type de projets.

 

En quoi ce projet vous tenait-il à coeur ?

 

Il y a un besoin artistique d’être présent «pédagogiquement» et «culturellement». Depuis un an, avec Priyanka Soodhoo et Ansuya Bhonoo, nous avons, suite à une réflexion, identifié un certain manque dans la vitrine actuelle de l’art Made in Mauritius. L’art est florissant, mais ceux qui possèdent une certaine expertise académique, culturelle et professionnelle ont le devoir de «montrer» et pas uniquement d’«expliquer». De ce fait, nous avons démarré de nombreux projets ensemble. Et bien que cette BD soit «mon bébé à moi», la raison est claire : j’ai eu un parcours où j’ai été témoin des travaux d’historiens, je suis bédéiste et enseignant, j’ai côtoyé des gens avec des expériences de vie qui demandent à être racontées, j’ai avec moi des gens comme Cynthia Pernet-Antoine et Alessandro Chiara qui sont des professionnels du kreol morisien et du monde scénique…

 

Y a-t-il des obstacles pour publier une BD à l’île Maurice ?

 

Bien sûr… Un album en couverture cartonnée vous coûte environ Rs 400 l’unité si vous pensez faire environ 200 exemplaires. Le bédéiste, à moins d’être millionnaire, doit prendre un prêt à la banque, espérer que son public soit suffisamment riche et croire en une certaine culture de la BD bien ancrée chez les Mauriciens. Voilà pourquoi l’aide du Centre Nelson Mandela est incontournable et j’en suis très reconnaissant. Il faut comprendre aussi que l’aide de l’État à ce genre de projets d’art nécessite quand même un certain standard pour qu’on ne ponde pas du n’importe quoi. Il ne suffit pas d’avoir envie de faire de la BD en kreol morisien.

 

Parlez-nous du style visuel de la BD...

 

D’abord, même si la BD Goulous, n’est pas une suite de Zeek Melia, j’ai quand même voulu maintenir le même style : du réaliste légèrement stylisé. Mais il fait reconnaître que le marronnage est un sujet sombre : il est question d’être traqué, de se retrouver dans un lieu où on cherche refuge mais où l’aspect sauvage nous maintient dans une angoisse constante. C’est de cette densité que j’ai voulu traiter en termes de couleurs : sombres mais abordables pour un jeune lecteur.

 

Pourquoi ce choix du kreol morisien ?

 

Un choix bien réfléchi je dirais… Si je me basais sur la question de la «rentabilité», je ne l’aurais pas fait. La BD dans le monde a toujours été un véhicule dynamique de langue maternelle, une culture qui offre une certaine noblesse à une langue populaire. Les Japonais ont leur manga, les Américains ont leur panoplie de super-héros, et tous finissent sur nos écrans de télé ou de ciné. Paradoxalement, il existe très peu de BD en créole. Et comme je vous l’ai dit, il faut bien, quand même, que des artistes répondent présent.

 

D’autres projets après celui-ci ?

 

Ah oui ! Du cinéma avec un film ayant pour titre Rays of Life avant une prochaine BD avec Alain Gordon-Gentil.