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Sir Bhinod Bacha : pourquoi je pardonne à mon agresseur

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«Cela va l’aider à réfléchir à ce qu’il a fait et à s’améliorer dans la vie. Pour moi, j’ai excusé un frère»

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Avec ses pansements après sa mésaventure en décembre 2003.

Il interprète le geste de son agresseur comme un acte désespéré et espère que ce dernier aura une autre chance dans la vie. Faire grâce est, pour lui, une façon d’aider quelqu’un à se réformer.

Il a vu la mort en face mais il ne ressent aucune haine envers celui qui a failli le tuer. Pourquoi ? Le regard lointain, passant la main dans ses cheveux, sir Bhinod Bacha répond simplement : "Je l'ai dit : pardonner, c'est divin. Il faut être croyant dans la vie." Il explique que son geste lui apporte la paix intérieure.

Il est sept heures du matin en ce 15 décembre 2003 à Quatre-Bornes. Sir Bhinod arrête sa voiture devant la boulangerie Baguette Magique. Un homme, James Edmund Sanhye, s'approche de lui et lui demande ses clés en le menaçant avec un cutter. Sir Bhinod tente de s'enfuir. James Edmund Sanhye lui assène un coup à l'abdomen et un autre au dos. Il est transporté d'urgence à l'hôpital Candos. En cour, l'agresseur dira qu'il voulait voler la voiture de la victime.

"Cela fait quand même un bout de temps depuis cette agression. On ne peut jamais lire dans les pensées d'une personne. C'est peut-être un geste de désespoir, poussé par la pauvreté. Dieu a épargné ma vie. Quand la défense m'a demandé si j'étais prêt à l'excuser, en face de moi, c'est un père de famille que j'ai vu. À la base, il n'y a aucun être humain qui est méchant. Tout au long de ma vie, j'ai toujours accordé mon pardon. Même à des personnes qui ont porté des jugements sur moi."

Sir Bhinod raconte qu'il a beaucoup appris dans sa vie, surtout en tant que chef de la fonction publique. Il a fini par comprendre que l'erreur est humaine.

"J'espère qu'à travers mon geste, mon agresseur trouvera une paix intérieure, deviendra une meilleure personne et jouera son rôle dans la société. Je lui souhaite bonne chance. Lorsque je lui ai pardonné en Cour, je l'ai ensuite regardé. Il a baissé la tête et, sur ses lèvres, se lisait un "merci". Le pardon donne une chance à celui qui le reçoit. Cela va l'aider à réfléchir à ce qu'il a fait et à s'améliorer dans la vie. Pourquoi ne pas donner une chance à cet être humain de se réinventer ?

Le pardon aide à réformer les gens. Pour moi, j'ai excusé un frère. L'homme n'a-t-il pas été fait à l'image de Dieu et, à ce titre, n'est-il pas un frère ?"

Il ne croit pas qu'un humain doit être motivé par le ressentiment car c'est le pardon qui fait tourner le monde. Selon lui, s'il y a des pays et des religions constamment en guerre, c'est, explique-t-il, parce qu'un esprit de vengeance les anime et ils ne sont jamais prêts à chercher un compromis.

"Gracier est un facteur positif. Toutes les grandes religions et les grandes philosophies vous disent l'importance pour un être humain d'épargner. C'est beaucoup plus facile de pardonner quand on oublie. Cela me fait penser à ce grand dicton africain : Il faut qu'hier soit moins bien qu'aujourd'hui et que demain soit meilleur qu'aujourd'hui. Il faut qu'on pratique ce qu'on a appris en littérature et en philosophie."

Sir Bhinod rappelle qu'il a côtoyé et travaillé avec les grands du pays : sir Seewoosagur Ramgoolam, sir Gaëtan Duval, sir Satcam Boolell, sir Raman Osman et sir Veerasamy Ringadoo, entre autres. Pour lui, ce sont des personnes qui ont fait preuve de tolérance tout au long de leur carrière et qui avaient beaucoup d'amour pour leur prochain. Cette qualité, il a souhaité l'adopter.

"Je mets aussi en pratique l'éducation que j'ai reçue de mes parents et de ma famille. Respecter la dignité d'autrui est très important. Les personnes traitées comme indignes agiront tout le temps en tant que telles. Pour moi, chaque naissance est une valeur sûre pour l'humanité mais la soif du pouvoir et l'argent poussent bien des hommes intelligents à commettre des actes barbares."

Qu'en est-il du fait que son agresseur est en cavale pour éviter d'être condamné ? Sir Bhinod dit qu'il éprouve du chagrin que les choses se compliquent tellement pour cet homme qui a commis un acte "irréfléchi".

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Qui est l'ex-chef de la fonction publique ?

Son nom hante toujours les couloirs du Bureau du Premier ministre. La fonction publique se souvient de lui comme son chef. Il ne s'agit d'autre que sir Bhinod Bacha : "En 1968, il y a eu un examen pour entrer dans la fonction publique. J'ai été classé premier sur une liste de plus de 100 gradués avant d'être posté au Bureau du Premier ministre. En 12 ans, je suis devenu le principal conseiller privé de Sir Seewoosagur Ramgoolam. En 1981, j'ai été promu secrétaire de la défense avant de passer au poste de chef de la fonction publique."

Sir Bhinod raconte que ses meilleurs souvenirs sont quand il a organisé la visite du pape en 1989 et le Sommet de la Francophonie en 1993 : "C'était de très grands moments. Il fallait veiller à tout et même préparer les discours." Son pire souvenir, c'est l'incendie de sa maison en 1994 dans lequel son fils Popo et son épouse Lady Kathleen devaient périr. Il s'est depuis remarié à Joyce Castellano. Sir Bhinod est aujourd'hui conseiller au ministère des Terres et du Logement.

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Le coupable en cavale

L'heure de savoir combien de temps il allait passer en prison a sonné jeudi. Mais James Sanhye est introuvable. Le prévenu a, de son propre gré, accepté la charge d'agression avec préméditation. La sentence devait être prononcée à 10 heures, la séance a été repoussée à 13 heures, le temps que la police essaye de le retrouver, mais sans succès. La magistrate Shameem Hamuth-Laulloo a alors émis un mandat d'arrêt contre le fugitif.

À l'heure où nous mettions sous presse, il était toujours en cavale. James Edmund Sanhye a été trouvé coupable lundi par la cour intermédiaire d'agression sur la personne de sir Bhinod Bacha en décembre 2003.

Par Rudy Veeramundar

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