Co-leader du mouvement Azir Moris, Havish Gokool monte au front. Il se dresse comme un chien de garde et ne mâche pas ses mots. Après avoir porté plainte contre Somduth Dulthumun et Dan Callikhan pour incitation à la haine raciale, il continue la lutte contre le projet de CT-Power. Entretien…
Le collectif Azir Moris a porté plainte contre le président de la Mauritius Sanathan Dharma Temples Federation (MSDTF), Somduth Dulthumun, et le directeur de la Mauritius Broadcasting Corporation (MBC), Dan Callikhan pour incitation à la haine raciale. Pourquoi une telle démarche ?
En tant que citoyen mauricien, je trouve ces propos inacceptables. Comment peut-il représenter 500 mille hindous à lui seul ? Je suis un Mauricien de foi hindoue mais je désapprouve le langage de Somduth Dulthumun. Qu’il travaille pour le bien-être de la communauté au lieu de se mêler de choses n’ayant aucune relation avec la communauté hindoue !
Somduth Dulthumun a porté atteinte à l’article 282 de la Criminal Code Act et nous pensons que de telles choses ne doivent pas se reproduire. Il faut souligner qu’il est aussi Board Member de l’Independent Broadcasting Authority. Comment peut-il être «judge and party» en même temps ? Cela dit, Dan Callikhan, en tant que directeur général de la MBC, n’aurait pas dû diffuser ce discours à la télé. Il est également responsable et c’est un acte tout aussi condamnable. Nous demandons la démission, voire la révocation, de ces deux personnes.
Maintenant que la plainte est déposée, qu’attendez-vous de la justice ?
Nous avons confiance en la justice et nous estimons que les actes de Dulthumun et Callikhan doivent être condamnés. Si la police n’initie aucune action, nous allons faire ce qu’il faut pour que justice soit faite.
Dulthumun et les siens estiment qu’il y a un «hindu bashing» de la part de certains journaux. Qu’en pensez-vous ?
Dénoncer les pratiques douteuses de quelques individus est premier devoir de la presse. Et ce n’est que pure coïncidence si les noms de Soornack et de Gooljaury ont été pris dans un engrenage lié à une simple histoire de photo. Il n’y a pas eu de véritablement «pointage de doigt ou cassage en règle».
Et puis, soyons un peu pragmatique. Si la communauté hindoue compte plus de 60 % de la population, il est normal que sur trois noms lus dans la presse, deux en soient issus. Mais là, on ne parle pas de Champions du monde mais d’une femme d’affaires qui a très vite gravi les échelons et d’un businessman qui a vendu un bâtiment invisible à la SICOM pour 600 millions. Ça fait tache en effet !
Azir Moris est également engagé dans la lutte contre CT-Power. Certains Mauriciens critiquent ce mouvement de protestation en arguant que si c’était un autre village et non pas Albion, la mobilisation n’aurait certainement pas été la même. Qu’en pensez-vous ?
Je comprends aisément d’où provient l’amalgame. Le fait que Jameel Peerally, leader d’Azir Moris, habite à Albion donne à notre revendication une teinte «albionnaise». C’est un peu normal, j’ai envie de dire. Cependant, la défense de son pays commence par la protection de son environnement immédiat. Mais voilà, Azir Moris, ce n’est pas que Jameel Peerally ! Nous formons un groupe de citoyens mauriciens qui veut se tenir en chien de garde et en tant que Whistleblower par rapport à toute situation qui viendrait à causer des problèmes à notre peuple.
L’action d’Azir Moris a été précipitée par l’affaire CT-Power, c’est vrai, mais notre message est constant, clair et sans équivoque : NO TO COAL... que ce soit à Albion, à Maurice ou dans le monde. Dans cette lutte, nous nous mettons dans une posture globale car le problème concerne tout un chacun directement. Le combat s’insère dans une logique de vie durable, d’un futur meilleur. C’est un problème mauricien avant tout.
Pourquoi est-ce que Azir Moris manifeste-t-il uniquement contre CT-Power alors qu’il existe d’autres centrales à charbon ?
L’installation d’une usine à charbon de 110MW est la promesse d’une baisse de l’espérance de vie de 30 %, de maladies pulmonaires, de cancers et d’autres problèmes de sécurité sociale. C’est un peu notre Kraken ! La lutte contre CT-Power, c’est le commencement d’une campagne visant à rendre la production de l’énergie à partir du charbon illégale à Maurice. Dans un certain sens, cette action s’inscrira contre les usines qui utilisent cette matière polluante actuellement.
Il faut comprendre qu’à l’époque de la mise en place des Independent Power Producers (IPP), très peu d’informations filtraient et notre conscience écologique n’était pas encore née. Et nous n’étions tout simplement pas là ! Aujourd’hui le contexte est différent, il est au vert. La technologie de communication sociale est différente, elle permet une transmission d’information rapide et efficace. Les gens ont changé, ils sont mieux informés des risques sanitaires du charbon.
Les contrats liant le Central Electricity Board et les IPP ont finalement été rendus publics. Avez-vous pris connaissance des documents ? Qu’en pensez-vous ?
Azir Moris n’a pas demandé les contrats des IPP. Par contre, le contrat de CT-Power doit être passé à la loupe. Il ne faut pas mélanger les choses. Le problème des IPP n’est pas le même que celui de CT-Power. Je suis d’accord qu’on parle toujours du charbon mais l’heure viendra quand les IPP devront chercher d’autres options au charbon.