Il veut la jouer différemment. Navin Ramgoolam a promis, jeudi dernier à Palma, que pour les prochaines législatives en 2005, le choix de ses candidats ne sera pas fait en fonction de leur appartenance ethnique et du profil sociologique des circonscriptions.
Le leader des rouges vend-il des rêves en cuves et des promesses en conserves ?
Dans son éventuel prochain gouvernement, il dit vouloir à ses côtés des hommes et des femmes «capables d’intervenir au Parlement». Il ne veut plus de marionnettes. Il promet aussi de bien choisir les nominés politiques, «parce que certains conseillers agissent comme s’ils étaient des ministres».
Le leader du PTr faisait ici référence à un de ses ex-conseillers de la ‘Policy Unit’ qui est actuellement accusé par Antoine Chetty d’avoir ourdi un complot pour agresser le petit ami de sa nièce.
Navin Ramgoolam a-t-il le courage d’aller jusqu’au bout de ses convictions ? Ou n’est-ce qu’un effet d’annonce comme en raffolent les politiciens ?
On se souvient encore du début des années 90 quand le leader de l’Opposition s’était présenté comme le ‘lion’ de la politique locale au moment où il se jetait dans l’arène politique. Il voulait être quelqu’un de différent. Il promettait de brasser large. Lui, le gentleman fraîchement débarqué de Londres, faisait alors rêver. Comme tant d’autres avant lui.
Qu’est devenu Navin Ramgoolam aujourd’hui ? Il est un homme coincé. Lui qui avait promis de ne pas répondre positivement aux invitations des organisations socioculturelles n’a pu faire autrement. Comme les autres, en tant que Premier ministre, il a marqué sa présence à ces fonctions. Sans doute contre son gré.
En sus du fait de constater l’omniprésence des associations socioculturelles, Navin Ramgoolam a bien vite compris l’une des autres réalités mauriciennes. Il aura beau clamer devant des convaincus rouges à Palma que nous sommes tous égaux, que quand les coolies sont venus, personne ne s’arrêtait sur leurs différentes castes et que «nou tou dan meme bato », il ne va convaincre personne quand il avance qu’il veut faire la politique différemment.
On voudrait se tromper. Mais l’ethnicité a tellement gangrené la politique à Maurice que malgré toute sa bonne volonté, le leader du PTr ne pourra pas nager à contre-courant.
À moins qu’en 2005, il puisse nous prouver qu’on se trompe, comment Navin Ramgoolam pourra-t-il nommer un non-musulman parmi les trois représentants travaillistes à Plaine Verte ? Pourtant, cette circonscription comporte un bon nombre d’électeurs de la population générale à Roche-Bois. Autre circonscription qui a changé de profil sociologique : celle du leader de l’Opposition lui-même, le No 5. Là-bas, il y a, depuis peu, une forte concentration de votants de la population générale. Ceux-là ont toujours voté des candidats autres que ceux issus de leur communauté. Pourra-t-il faire briguer un candidat non issu de la communauté hindoue ? D’autres exemples existent encore à travers le pays.
Pour que Navin Ramgoolam soit crédible quand il vient dire qu’il ne tiendra pas compte des considérations ethniques, il lui faut avoir le courage politique. Il peut laisser ce soin à Paul Bérenger qui excelle dans le calcul ethno-castéiste depuis des années.
S’il suit sa logique, le leader du PTr aurait ouvert la voie.
Navin Ramgoolam, en disant encore une fois vouloir des « élections claires et nettes », annonce la couleur. L’affrontement sera de taille entre ses troupes et l’alliance MSM/MMM en 2005. À moins d’un coup de patte de l’Histoire de dernière minute.
Tout compte fait, le risque électoral est trop grand, à notre sens, pour que Navin Ramgoolam respecte sa promesse de ne pas considérer la réalité ethnique du pays. C’est dommage. Ce sera, de sa part, une nouvelle promesse bidon.