Tout va mal. Nos prisons sont devenues infréquentables, même pour les visiteurs. L’inspecteur Hector Tuyau et l’avocat Samad Goolamaully peuvent en témoigner.
Ce qui s’est passé à la New Wing de la Prison centrale jeudi dernier est grave. Venu pour entendre les confessions d’Antoine Chetty sur la mort au cyanure de l’activiste travailliste Rameswur Indur, l’inspecteur de police aurait pu ne jamais en repartir vivant.
Des prisonniers, pour la plupart infectés du virus du sida, ont voulu lui faire la peau avec un ‘cutter’ fabriqué maison. Il y en avait même un qui avait en sa possession une seringue qu’il menaçait de lancer sur l’inspecteur Tuyau pour l’infecter du virus du sida.
Ces prisonniers n’ont rien à perdre, on le sait. Ils pourrissent derrière les barreaux pour des délits commis et certains savent qu’ils sont condamnés à cause de la terrible maladie.
A-t-on songé un seul instant, du côté des responsables des prisons, à la sécurité des visiteurs venus dans ces lieux dans l’exercice de leurs fonctions ?
Il semble que les choses n’ont pas beaucoup évolué depuis le départ de l’ex-Commissaire des Prisons, M. Brojmohun. Celui qui le remplace temporairement continue dans la même lignée. Pour le moindre problème survenu à la prison et rapporté dans la presse, le commentaire usuel est: RAS. Rien à signaler.
Souvenez-vous du cas du prisonnier Lafleur, retrouvé presque mort après une opération musclée à la Prison centrale. Le rapport officiel envoyé par la direction des prisons au Premier ministre avait fait état d’une petite rixe sans gravité. Alors que la vie du détenu était en danger réel. Le Premier ministre avait même remercié Dieu quand il avait appris que le jeune Lafleur était sorti du coma. Il prenait ainsi la mesure des implications si le détenu avait rendu l’âme.
Il faut reconnaître à Paul Bérenger d’avoir fait montre de bonnes intentions pour améliorer les conditions dans les prisons. Il voulait, disait-il, des prisons les mieux gérées du monde. Pour ce faire, il avait nommé l’ACP Dass Joganah à la tête d’un comité spécial ayant pour tâche de voir les failles derrière les barreaux et proposer des solutions.
Pas de surprise. Le tableau peint par Dass Joganah est sombre : la drogue se vend librement, la sodomie entre détenus est pratiquée au vu et au su en échange de quelques cigarettes, le sida fait rage, les portables circulent, les détenus misent sur des chevaux.
Que s’est-il passé par la suite, M. le Premier ministre ? Les intentions à elles seules ne suffisent pas. Il faut des actions et elles se font encore attendre. À trop attendre, la situation s’est aggravée depuis. D’où l’empressement de chercher de l’aide ailleurs. Pour parer au plus pressé.
Là encore, on se permet d’être sceptique. Le Britannique Bill Duff, déjà en poste officieusement, aura-t-il les coudées franches pour apporter des réformes ?
Il est permis d’en douter car il a dans les pattes quelques cadres qui rechignent à tout changement et qui attendent ardemment que vienne l’âge de la retraite. Bill Duff pourra-t-il travailler dans un environnement où, pour certains, l’amateurisme n’est plus l’exception, mais la règle ?
Bill Duff n’a pas confiance dans les officiers qui dirigent nos prisons. Il l’a démontré, hier matin, quand il a cru bon de superviser personnellement une reconstitution des faits à la Prison centrale dans l’incident impliquant l’inspecteur Tuyau, l’avocat Goolamaully et des prisonniers. Son rapport sera remis au Premier ministre cette semaine.
Gageons que ce que va dire Bill Duff sera plus fidèle à ce qui s’est réellement passé jeudi dernier lors de l’indicent. Car, un premier rapport rédigé par des supérieurs de nos services pénitentiaires maintient que les prisonniers n’ont jamais eu l’intention d’agresser physiquement le policier et l’avocat. L’altercation n’était que verbale. Pas de cutter, bien sûr, encore moins de seringue contaminée.
Bref, rien à signaler.