Pourquoi donc cet acharnement contre Jacques Pereira ? Doit-on finir par croire, comme il le dit lui-même (page 10), qu’on veut sa tête ?
Ainsi, pendant tout le long de cette affaire, la PSSA, organisme qui gère les collèges privés, a contesté la nomination de Jacques Pereira à la tête du collège Père Laval parce que ce dernier n’aurait pas les qualifications requises. La PSSA, selon ses porte-parole, s’appuyait sur le rapport du PRB qui fait parait-il provision de «2 A levels at the same sitting» pour ce poste.
Selon la PSSA donc, Jacques Pereira ne serait pas éligible au poste de principal parce qu’il ne possède pas les deux «A Levels at the same sitting.» Car, il faut dire que les deux ‘A Levels’, Jacques Pereira les a, sauf qu’ils n’ont pas été obtenus à ce fameux «same sitting.»
On peut ici discourir sur l’importance ou la petitesse de cet argument compte tenu que Jacques Pereira possède son ‘Bachelor in Education’, qu’il a 37 ans de service dans l’éducation, qu’il est reconnu comme un bon pédagogue, qu’au collège Père Laval il fait l’unanimité, et que finalement deux ‘A Levels ‘«at the same sitting » ou pas ne changent pas vraiment grand-chose. Mais enfin, à chacun son interprétation.
On peut aussi se demander pourquoi a-t-on laissé Jacques Pereira assumer l’intérim au poste de principal de ce collège depuis janvier 2003 si dès le départ on l’avait jugé incompétent dans ce rôle ? Serait-il uniquement qualifié pour l’intérim ?
Ce sont des questions que l’on s’est posé dès lundi avec l’éclatement de l’affaire Pereira, qui a entraîné dans son sillage quelques manifestations, à Sainte Croix et devant le bureau du Premier ministre, deux veillées nocturnes et la perturbation des examens des étudiants de cette école.
Des démonstrations de force en manière de soutien à Jacques Pereira qui n’ont pas laissé le Premier ministre insensible. Ce dernier, comme à l’accoutumée, s’est revêtu mercredi de sa cape de sauveur en recevant les membres de l’Association des parents d’élèves de cette école, ceux-là qui réclament à cor et à cri la nomination de Jacques Pereira.
Le communiqué du Cabinet ministériel émis hier ne fait aucun doute quant sur le mood du PM : «Le Premier ministre et le ministre de l’Éducation et de la Recherche scientifique étudieront le cas avec toutes les parties concernées la semaine prochaine en vue d’arriver à une solution urgente qui serait à la satisfaction de toutes les parties concernées.» C’est dire que le PM, pour reprendre une de ces déclarations favorites, «pé suive la sitiation de très près.»
Mais dans tout ce remue-ménage, tout le monde – de Jacques Pereira lui-même aux journalistes - avait oublié de demander l’essentiel : Est-ce qu’effectivement le rapport du PRB fait provision de ces incontournables « 2 A levels at one and same sitting», cet ennuyant obstacle ? Depuis jeudi dernier, la réponse est connue. Mention n’est nulle part faite dans le rapport du PRB 2003 de cette clause « at one and same sitting. »
La PSSA ignorait-elle donc cette information ? Il est difficile de croire que cet organisme n’était pas en présence de cette donnée. Dans un article que nous publions en page 10, l’un des responsables de la PRB, interrogé sur cette absence de mention de «one and same sitting» répond que «le terme A level veut tout dire.»
Sauf qu’il s’agit là d’une interprétation. On peut aussi se demander - si ce n’est pas mentionné dans le rapport - d’où est sorti cet argument « at one and same sitting. » On n’ira certainement pas jusqu’à penser que quelqu’un quelque part l’aurait ajouté ou suggéré.
Mais alors, que s’est-il donc passé ? Serait-ce un cafouillage, une bourde, un malentendu ? Ou alors Jacques Pereira n’aura-t-il été qu’une malheureuse victime d’un rapport de force entre plusieurs parties concernées ?
Car cet homme « blessé et révolté » qu’est aujourd’hui Jacques Pereira n’a pas eu la partie facile dans cette joute. Contre toute attente, c’est au sein même du syndicat du personnel enseignant des écoles catholiques que la réticence est féroce à la nomination de Jacques Pereira.
Les mots de la présidente du syndicat traduisent bien les relations entre les responsables des écoles catholiques et le BEC. «Nous dénonçons l’attitude de la nouvelle équipe du BEC qui pendant toute une année a essayé de titulariser M. Pereira même s’il n’est pas qualifié». (Page 10)
Maintenant qu’il est clair que le rapport du PRB ne stipulait pas que les deux «A levels» auraient dû être obligatoirement obtenus « at one and same sittitng », quel autre argument trouvera-t-on pour dire non à la nomination de Jacques Pereira, un homme dont les compétences sont louées au collège Père Laval de Sainte Croix ?
Victime d’un faux procès pendant ces derniers jours, l’avenir nous dira si effectivement on voulait la « tête » de Pereira.