On peut comprendre la révolte des internautes qui ont visionné la bande vidéo consacrée à la petite fille, Hannah, dont l’histoire a fait grand bruit cette semaine. On peut comprendre la colère et l’indignation de tous ces auditeurs qui se sont exprimés sur les ondes de Radio One depuis que cette histoire a éclaté. On en est donc là à Maurice : on peut un matin expulser une enfant de 5 ans non seulement de sa salle de classe, mais aussi de l’enceinte même de son école, la diriger vers le trottoir, la confier à des personnes qu’elle ne connaît pas (ici il s’agit d’une policière et d’un officier de la CDU) quitte à ce qu’elle soit embarquée dans un véhicule. Et ce, pour aller, semble-t-il, dans un bureau de la CDU, soit là où l’on emmène généralement les enfants en détresse. Pourtant, de détresse, il n’en était rien.
La petite Hannah s’est réveillée ce jour-là, comme elle le faisait chaque matin depuis la grande rentrée de janvier, et s’est rendue à ce qu’elle considérait, à tort ou à raison, comme son école. Ah l’école ! Un lieu où, semble-t-il, les enfants sont entourés d’adultes responsables, un endroit où nos petits se sentent en sécurité, ayant une totale confiance en leurs profs. Surtout quand ils ont 5 ans. Quel désordre cela a dû faire dans la tête d’Hannah, à qui on avait sûrement expliqué auparavant qu’il ne faut en aucun cas suivre les étrangers.
Et dire que cette situation aurait pu être gérée autrement : un coup de fil aux parents, une convocation d’urgence et une solution (à court ou à long termes) face à ce qui, semble-t-il, serait un imbroglio administratif, l’enfant n’habitant pas dans le catchment area de l’institution primaire où elle se rendait pourtant depuis le 11 janvier dernier. À trop vouloir se cacher derrière l’écran de procédures et de règles, on en oublie l’essentiel. Là, c’était la psychologie d’une petite fille de 5 ans et on se demande ce qu’elle a ressenti quand elle a dû prendre ses affaires, quitter son école et suivre deux inconnues.
Au-delà de l’histoire d’Hannah, des torts des uns et des autres, ses parents et les autorités confondus, c’est tout le système de l’admission en standard I qui mérite d’être regardé en face. Les années passent, certains parents ne changent pas. Ils trouvent des subterfuges et contournent la loi pour pouvoir faire admettre leurs gamins dans les star schools. L’équation ou plutôt la perception est connue : Admission dans une star school primaire = meilleurs profs = meilleurs résultats au CPE = Star college. Donc, dès la standard 1, la pression commence. Les parents, stressés, sont prisonniers d’une course qui favorise une élite, tandis que les petits assistent aux mensonges des adultes qui trichent sur leurs véritables adresses. Ainsi dès l’âge de 5 ans, les enfants sont programmés pour la compétition qui les attend quelques années plus tard, en fin du cycle primaire.
L’on apprenait dans le courant de cette semaine que le ministère compte traquer les fraudeurs, que ceux qui ont faussé leurs adresses pour l’obtention d’une école à laquelle ils n’ont pas droit seront poursuivis. Si l’enquête est bien menée – et elle n’est pas titanesque – un grand nombre de parents devront faire face à la justice bientôt. Au fond, le problème n’en serait pas un si toutes les écoles primaires étaient sur un pied d’égalité et si tous les enfants avaient les mêmes chances. Dès 5 ans !