Jean Maunick a découvert Eckankar qui est selon lui «une religion et pas une secte» alors qu’il était établi en Australie
«Eckankar n’a rien à voir avec ce décès collectif.» Jean Maunick, le fondateur de la branche mauricienne de cette «religion» se dit «choqué ainsi que les autres eckistes par le lien qu’on a établi entre Eckankar qui prêche l’amour de la vie et les dix cadavres retrouvés à St-Paul». Il affirme également qu’Eckankar est «bien une religion et pas une secte.»
En début de semaine, l’enquête policière s’oriente vers Eckankar, une supposée secte. Des médaillons portant les initiales EK, le sigle d’Eckankar, ont été trouvés sur Critika Nundkumar, née Mawooa, et Rajesh Dhayam. Ces derniers étaient parmi les dix morts retrouvés dans la maison des Mawooa à Béchard Lane, St-Paul, le vendredi 27 août.
Les enquêteurs s’attellent dès lors à vérifier s’il y a un lien entre Eckankar et l’empoisonnement collectif des dix personnes dont les corps ont été retrouvés dans un état de décomposition avancée. Cinq d’entre ces personnes sont de la famille Mawooa : Koontee et ses enfants : Ravi, Chinta et Critika ainsi que Devesh, le fils de cette dernière. Les autres cadavres sont ceux de Mayadevi Jhowry, une habitante de Montagne Longue, et de ses deux enfants, Kesha, et Bavish, de Rajesh Dhayam, ex-cadre du MGI et de Paul Hervé Janvier, un clerc de notaire porté disparu depuis deux ans. Ils sont décédés d’un empoisonnement aigu probablement dû, selon les enquêteurs, au cyanure.
Mayadevi Jhowry était, selon ses proches, une très bonne amie de Critika. Ce qui expliquerait sa présence chez les Mawooa à St-Paul. Rajesh Dhayam était, quant à lui, l’amant de Critika. Paul Hervé Janvier est le seul dont la présence chez les Mawooa reste inexpliquée.
Pendant que les enquêteurs tentent d’y voir plus clair, Jean Maunick de son côté persiste et signe : «Ce décès collectif, suicide ou criminel, n’a rien à voir avec Eckankar. On nous a montrés du doigt dans cette affaire mais on va bientôt se rendre compte que nous n’avons rien à voir dans tout cela. Je n’ai rien à me reprocher.»
L’initiateur de cette «religion» à Maurice avoue toutefois que Rajesh Dhayam, l’ex-cadre du MGI, était parmi les premiers fidèles mauriciens d’Eckankar : «Il y est resté jusqu’en 1996. Un jour, il m’a dit qu’il voulait prendre ses distances pour s’adonner à d’autres occupations. Depuis, je ne l’ai que rarement croisé.»
Bande à part
Et qu’en est-il des autres victimes ? «Je ne les connais pas, je ne les ai jamais vues de toute ma vie et elles n’ont jamais assisté aux offices d’Eckankar», affirme Jean Maunick. Il déclare ne pas savoir comment des médaillons portant le sigle EK ont été retrouvés sur Rajesh Dhayam et Critika Nundkumar. «Peut-être que Rajesh Dhayam a voulu faire bande à part ou, un ‘following up’ mais je n’en sais rien».
Lui-même a connu Eckankar après qu’il eut émigré en Australie entre 1968 et le début des années 90 : «J’avais lu un livre qui parlait d’Eckankar; cela m’a intéressé et j’ai voulu en savoir plus. Depuis, j’y suis resté parce que c’est une religion qui me convient.»
Lorsque Jean Maunick rentre définitivement au pays, il fonde la branche locale d’Eckankar. À ce jour, selon lui, il y a une quarantaine d’eckistes (ndlr : le nom des membres d’Eckankar) officiellement recensés. Les offices se déroulent le dimanche matin dans une ancienne boutique à la rue Stein à Beau-Bassin.
«Nous commençons par lire un extrait du ‘Sharyat Ki Sugmad’, la bible d’Eckankar; ensuite nous chantons le Hu qui est un chant d’amour à Dieu et après, nous avons un partage à partir de l’extrait du livre sacré», explique Jean Maunick qui est l’officiant.
Selon ce dernier, les membres doivent payer une capitation de Rs 1500 par an : «Ils peuvent aussi faire des dons à n’importe quel moment s’ils le veulent, mais il ne sont pas obligés.»
En attendant, les enquêteurs tentent de déterminer si c’est un suicide ou un acte criminel qui est à l’origine de l’empoisonnement des dix personnes dont les cadavres ont été retrouvés dans une maison à St-Paul. La thèse de l’empoisonnement accidentel a été écartée par les enquêteurs. Les Eckistes se remettent, quant à eux, de leurs émotions. «C’est un choc, mais nous allons nous en remettre parce que nous savons que la piste Eckankar est une fausse piste», soutient Jean Maunick.
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Secte ou religion?
«C’est seulement en France qu’Eckankar est classé comme secte», affirme Jean Maunick, le fondateur de ce mouvement à Maurice. Eckankar a, en effet, été classé comme secte par les parlementaires francais. Mais pour Jean Maunick, «Eckankar est une religion».
Dans le livret ‘Eckankar, une sagesse ancienne pour aujourd’hui’, Eckankar est défini comme «la religion de la Lumière et du Son de Dieu». Le terme sanskrit ‘Eckankar’ signifie aussi «collaborateur de Dieu.» Le nom sacré de Dieu est, selon le même livret ‘Sugmad’, «la source de toute vie. Sugmad n’est ni masculin ni féminin».
À la tête d’Eckankar dont le siège se trouve au Minnesota en Amérique se trouve le «Mahanta, un Maître ECK Vivant» qui en est le chef spirituel. Actuellement, le Mahanta est Sri Harold Klemp. Il a succédé à Paul Twichell qui a fait connaître Eckankar, «une religion ancienne», dans le monde moderne. Le Shariyat-Ki-Sugmad, qui signifie «La Voie de l’Éternel», constitue l’ouvrage fondamental des eckistes.
Eckankar trouve ses racines dans l’hindouisme, le bouddhisme et la chrétienté, entre autres. Selon Jean Maunick, Eckankar est une religion à but non-lucratif qui enseigne l’amour de Dieu, de la vie, de la famille. «Nous sommes de ce fait contre le suicide».
Il n’y a pas, selon lui, de culte de la personnalité chez Eckankar. «Quand nous nous rencontrons, nous faisons de la contemplation en chantant le Hu, un chant à Dieu. Les eckistes peuvent aussi faire de la contemplation chez eux tous les jours.»
Eckankar croit dans le karma, la réincarnation, l’interprétation des rêves et le voyage de l’âme. Eckankar respecte aussi, selon Jean Maunick, la religion de ses membres. «Ils peuvent rester dans leur religion et adhérer à Eckankar sans se convertir.»
Eckankar est présente dans «une centaine de pays» et compte des milliers de «membres.»
Par Michaëlla Coosnapen, Nadine bernard,
et christophe karghoo