Pose-photo avec deux des acteurs principaux du film : Kristeven Moothien et Vinaya Sungkur.
Le public a répondu présent à cet avant-première, même s’il restait encore des sièges vides.
C’est jeudi dernier que l’écrivaine Ananda Devi a présenté le film adapté de son livre Eve de ses décombres au cinéma Star de Bagatelle. Le quatuor au centre de ce long-métrage, réalisé par le fils et l’époux de la romancière, nous parle de cette expérience.
C’est sombre, et ça se passe à l’île Maurice. L’histoire de quatre jeunes : Eve, la prostituée, Sad, amoureux d’elle, Savita, compagne d’Eve, et Clélio, jeune homme affecté par le départ de son frère vers l’étranger. Mésaventures, désillusions dans une île Maurice loin des standards touristiques. L’histoire d’Eve de ses décombres a été adaptée au cinéma pour devenir Les enfants de Troumaron. Un film réalisé par Harrekrishna et Sharvan Anenden, époux et fils de l’écrivaine, et présenté en avant-première, jeudi, au Star de Bagatelle, en présence de l’auteure et des acteurs.
Le quatuor central du film est composé de Kitty Philips, Vinaya Sungkur, Roshan Hassamal et Kristeven Moothien. La première interprète Eve, un rôle difficile de prostituée adolescente, battue, malmenée, violentée. «Ça remonte à loin car le tournage s’est déroulé en 2009, mais je me rappelle que les acteurs étaient complices, ce qui nous a beaucoup aidés pendant les scènes dures, de violence ou de langage cru. Il fallait aussi pouvoir tenir le rythme du tournage, d’autant que c’était ma première expérience au cinéma (elle a été retenue après un casting fait par l’équipe du film, quelques mois avant le tournage). Mais on s’en est bien sortis», confie la jeune femme qui a aussi un pied dans la mode pour avoir été mannequin.
Vinaya Sungkur a plus d’expérience. Elle a notamment fait du théâtre et joué dans des courts-métrages locaux. Elle décrit les six semaines de tournage intensives : «C’était une super expérience, avec des acteurs qui étaient très complices. On a pu bien entrer dans la peau des personnages. J’ai en tout cas beaucoup appris.»
Roshan Hassamal, le Sad frustré du film, a retenu… une rencontre. «Ce que je retiens le plus, c’est ma rencontre avec Ananda Devi, dont j’adore les films et avec qui j’ai, en plus, travaillé ! Mis à part cela, il y a quand même eu d’autres belles rencontres, notamment avec les acteurs. Bref, une belle aventure humaine», souligne le jeune homme.
C’est le deuxième long-métrage où l’on retrouve Kristeven Moothien. Le premier était Benarès de Barlen Pyamootoo. Toutefois, avant de se lancer dans l’aventure, l’acteur n’a pas lu le livre : «J’ai préféré avoir ma vision du personnage dans le script et sur le tournage. C’est un film qui n’a pas été tourné avec d’énormes moyens, souvent à l’arraché mais, au final, le tournage était sympa, les acteurs s’entendaient bien, et on a passé de très bons moments, malgré le sujet sombre de l’histoire.»
Les enfants de Troumaron, qu’Ananda Devi a décrit jeudi soir comme «un paquebot(…) qui n’est pas un jugement mais une interrogation», écumera les festivals à travers le monde pour trouver des distributeurs. Si c’est le cas, on espère bien une exploitation en salle chez nous….
Et le film ?
C’est un pari risqué que d’adapter un livre aussi intense qu’Eve de ses décombres. Et pourtant on peut dire que son adaptation cinématographique contient de nombreuses qualités. Une adaptation plus ou moins réussie, car fidèle au matériel d’origine, fidèle dans ses dialogues et dans sa trame.
Sauf que les réflexions des personnages, en Voix off, et certains dialogues ont beaucoup plus de puissance dans le livre de Devi. À l’écran où ça alterne souvent entre dialogues en français et en créole, ce n’est pas tout le temps très réaliste, mais on se doute bien que ça doit sûrement être un parti pris des réalisateurs.
N’empêche, Les enfants de Troumaron, profite d’une belle photographie, d’un montage soigné, d’acteurs un peu inégaux, mais où l’on retient notamment la performance de Kitty Philips, qui s’est beaucoup investie dans son rôle. LA belle trouvaille de ce film pas parfait mais que l’on retiendra pour sa vision sombre mais plus ou moins juste d’une île Maurice.