Le couple de multimillionnaires entouré de son fils Steeven et de la fiancée de ce dernier.
Il vient de remporter une belle pactole au loto. Mais pourtant Marimootoo Veerasami n’a rien vraiment changé de ses habitudes. L’avenir, il l’envisage tout simplement.
Un sourire qui vaut de l’or. Celui d’un homme heureux. Tout simplement. En ce début de soirée, alors que le village de Château-Bénarès s’apaise et se prépare pour la nuit, Marimootoo Veerasami nous accueille chez lui. Debout, face aux derniers rayons de soleil qui illuminent ses cheveux blancs, le gagnant du jackpot de Rs 29 millions de la Loterie nationale s’efface pour nous présenter son petit, mais coquet jardin. Il pourrait parler des heures de ses plantes, de son amour pour elles, et des moments qu’il passe à les chouchouter.
Après tout, comme il le dit : il est un jardinier, un vrai. Depuis quelques jours, il a rangé bêche, râteau, jeune pousse, fumier. L’homme de 67 ans prend une petite pause… À ses côtés, son épouse Luxmi le suit comme son ombre. Ensemble depuis longtemps, depuis presque toujours, le couple savoure cet instant de bonheur. Dans leur petite maison «tablissement», comme le décrit le multimillionnaire, qu’ils ont achetée à Rs 65 000 il y a plusieurs années, Marimootoo et Luxmi ont vu naître quatre enfants, ont perdu un fils et ont vu grandir trois autres.
Aujourd’hui, c’est avec fierté qu’ils voient la réussite de Rouben, Steeven et Kovilen. «Nous n’avions pas grand-chose. Mais nous voulions que nos enfants fassent quelque chose de leur vie», explique Luxmi. Alors, avant même d’être multimillionnaires, Marimootoo et Luxmi étaient, disent-ils, heureux. «Regardez-moi ! Ma vie n’a pas vraiment changé. Je suis le même. Je fais les mêmes choses», s’exclame Marimootoo, en nous servant du jus et des biscuits dans le minuscule salon où l’on trouve des dizaines de souvenirs entassés.
Néanmoins, il le sait, sa vie s’apprête à changer : «J’ai dit à mon bourzois que je ne viendrai plus travailler. Mais je sais qu’il a besoin de moi. Alors peut-être qu’une fois le temps, j’irai m’occuper de son jardin. Je ne veux pas lui déplaire.» Un peu philosophe, le multimillionnaire lance, le regard dans le vide : «L’argent, ce n’est pas tout dans la vie. Si on n’a pas d’argent et qu’on a des amis, ce n’est pas la misère. Si on n’a pas d’argent et pas d’amis, c’est la vraie pauvreté.» Alors, comme, depuis quelques jours, il en a les deux, il ne se plaint pas : «C’est un bonheur, oui. Mais même si on n’avait pas grand-chose, avant. On ne manquait de rien.»
Désormais, c’est avec ses fils et ses proches que l’homme, très attaché à sa famille, envisage l’avenir : «Faire construire une maison, acheter une voiture et permettre à mon dernier de poursuivre ses études tertiaires à l’étranger.»
Un mariage
Le mariage de Steeven est aussi au programme. «Si tifi la content so beau père», lance-t-il avec humour à la fiancée de son cadet, assise dans la même pièce. Difficile pour le père de famille de réaliser qu’il peut désormais tout faire ou presque : tout acheter, tout accomplir. «Je pense à l’avenir de mes enfants avant tout. Moi je suis bien.»
Un généreux coup de pouce de la vie pour celui qui a perdu sa mère alors qu’il n’avait que six mois, puis son père quelques années plus tard : «Je venais de commencer l’école. J’ai dû tout arrêter. Aujourd’hui, je peux me débrouiller mais je ne pourrai pas lire un journal.» Ballotté de famille en famille, chez sa sœur, chez des voisins puis chez un oncle, c’est en décidant qu’il ne voulait pas vivre chez ce dernier qu’il va rencontrer sa «nouvelle» fratrie : «J’étais parti de chez mon oncle. J’avais faim. Alors j’ai demandé à un monsieur de m’acheter quelque chose à manger. Cet homme, c’était le papa de ma femme.»
Grâce à un heureux concours de circonstances, c’est avec cette famille rencontrée au hasard, qu’il grandira, apprendra un métier – «j’ai toujours su que j’étais un jardinier» – et qu’il trouvera l’amour. «Nun tombe dakor. Alor nun decide pou marier», raconte avec pudeur celui qui collectionne les prix en jardinage depuis 1988. Et c’est avec celle dont il est tombé amoureux un jour – «ce n’était pas un mariage arranze» – qu’il savoure un nouveau bonheur, qu’il imagine un avenir paisible et en famille. Malgré les difficultés auxquelles il a fait face, malgré le grand bonheur qu’il vit, Marimootoo veut continuer à être un homme heureux, tout simplement.
Le jour où sa vie a changé
Rs 40. C’est la somme que Marimootoo Veerasami a jouée le vendredi précédant le tirage de la Loterie nationale du samedi 12 mai. Après son travail, il rentrait à la maison quand il s’est arrêté au Corps de Garde Libre Service. C’est au hasard qu’il a coché douze numéros, comme il le fait chaque semaine. Néanmoins, le samedi soir, contrairement à ses habitudes, le couple Veerasami ne s’est pas installé devant la télé pour regarder le tirage. «Nous devions nous rendre à un anniversaire chez une de nos nièces», explique Luxmi.
Dimanche, la famille reste à la maison et Marimootoo, avec l’aide d’un de ses fils, s’occupe du jardin : «À aucun moment, on ne s’est dit qu’il fallait vérifier les résultats du Loto». Ce n’est que le lendemain, alors que son fils Steeven revient du village de Rivière-des-Anguilles, que Marimootoo apprend qu’une personne qui a joué à la superette Corps de Garde, a remporté le jackpot : «J’ai vérifié mon ticket. Et là c’était la surprise. Mais je n’étais pas excité. J’ai pris les choses calmement. Je ne sais pas comment.»
Il monte sur sa bicyclette et va s’enquérir auprès des propriétaires : «C’est là qu’ils m’ont proposé de me conduire au siège du Lottotech.» Quelques démarches plus tard, l’homme a en sa possession Rs 29 millions : «Quand nous sommes rentrés nous avons fait un petit get together avec les proches.» Tout simplement…