L’ironie, c’est que Bérenger demandait à ses partisans, lors de la dernière assemblée des délégués, de compter sur lui : il avait toutes les cartes en main, il allait bien les jouer, rassurait-il. Si les dernières déclarations de Bérenger témoignent d’un «bien joué», ses adversaires politiques peuvent dormir tranquille. Car de stratégie MMM, on n’a vu que contradictions, pirouettes, enterrement du fameux principe d’un remake façon 2000 et nouvel appel du pied grotesque – via réforme électorale – à Navin Ramgoolam. Donc, après avoir vendu, malgré l’opposition de sa base militante, le projet du grand retour de SAJ sur la scène politique, un développement qui allait, semble-t-il, déstabiliser le gouvernement Ramgoolam, inciter quelques grosses pointures rouges à démissionner, provoquer une motion de blâme suivie de la chute du gouvernement et d’élections anticipées et un nouveau gouvernement avec le tandem Anerood-Paul à la tête du pays, ne voilà-t-il pas que Bérenger retourne le fusil contre son propre camp.
Cette fois, il annonce qu’il n’y aura pas d’assemblée de délégués pour ratifier le remake avec SAJ tant que le gouvernement ne sera pas en minorité, mais ajoute que lui-même ne croit pas que l’opposition pourra mettre le gouvernement en minorité dans les jours à venir. Autre nouveauté depuis vendredi dernier : s’il n’y a pas de remake, le MMM ira de l’avant avec l’Alliance du cœur et 60 candidats. En clair, et sans aide de décodeur, – après la réaction ou plutôt la non-réaction de SAJ qui ne donne pas du tout l’air de vouloir claquer la porte de la State House – Ramgoolam conservera sa majorité au parlement, l’alliance SAJ-Bérenger agonise, le MMM, malgré la rencontre de ses membres, mercredi dernier, avec Pravind Jugnauth, regarde désormais dans la direction du PTr. Bientôt des koz koze Bérenger-Ramgoolam n’étonneront personne, le leader mauve ayant une fois de plus tendu une perche à Ramgoolam (si le Premier ministre veut empêcher le remake, il n’a qu’a proposer une réforme électorale, a-t-il déclaré, message relayé par Ariane Navarre-Marie, lors de la Journée de la femme) qui l’a saisie à pleines mains. Alors que Bérenger laisse des plumes avec sa stratégie brouillonne, en revanche, Ramgoolam a avancé froidement ses pions en donnant l’impression qu’il a gagné cette manche.
Après s’en être pris au président de la République en début de semaine et avoir encouragé un tir groupé sur ce dernier, laissant même deviner qu’il avait songé sereinement à la succession de SAJ – faisant référence à Madame Ohsan Bellepeau, lors de la Journée internationale de la femme – Ramgoolam, après s’être assuré que les dissidents éventuels de son camp sont rentrés dans les rangs et avoir ménagé son «ami Bérenger qui s’est précipité sur l’option d’un remake», selon lui, s’est fait le porte-parole du Réduit pour annoncer sa satisfaction devant les explications du président. Même si pour l’heure, nous n’avons que sa parole, et même si Bérenger affirme que le Premier ministre n’a pas tout dit dans cette affaire, il n’en demeure pas moins que, valeur du jour, il n’y a eu aucun move de SAJ, encore moins la fameuse surprise que prévoyait Bérenger il y a quelques jours, aucune défection dans les rangs travaillistes. La seule certitude : un nouveau zigzag de Bérenger qui depuis hier regarde à nouveau en direction du square Guy Rozemont, annonçant que le PTr et le MMM sont d’accord sur tous les points pour une réforme électorale. Comme ils ont raison, ceux qui marchaient hier. Une nouvelle république s’impose. Une nouvelle classe politique aussi. Et vite….