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«Il est impensable de laisser la classe sociale décider de l’accès à l’éducation tertiaire»

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Iannish Sadien

À partir de cette année, les candidats au Higher School Certificate (HSC) pourront postuler pour 30 bourses supplémentaires, alors qu’il n’y en a que 30 à l’heure actuelle. Iannish Sadien, double lauréat de la cuvée 2007, ayant décroché le SSR Scholarship et la bourse française, nous parle «de la valeur de cette aide financière».

Il y aura, désormais, 30 bourses supplémentaires destinées aux candidats du HSC. Qu’en pensez-vous ?

En tant que boursier, je connais mieux que les autres la valeur de cette aide financière. Beaucoup d’entre nous n’aurions même pas pu rêver d’aller continuer nos études, tant les frais universitaires sont prohibitifs. La valeur d’une bonne formation professionnelle ne peut être surestimée, et augmenter le nombre de bourses, que ce soit pour des études à Maurice ou à l’étranger, contribuera sans aucun doute à améliorer les secteurs clés du pays. La beauté de cette mesure repose sur le fait que cette démocratisation de l’accès aux études tertiaires ne se fait pas au détriment d’une compétition saine, qui, soit dit en passant, est devenue une nécessité dans un monde, où seule la compétitivité promet la survie économique.

Dans un communiqué émis cette semaine, le ministère de l’Éducation parle de «16 scholarships» qui vont être «awarded on the basis of both academic merit and approved social criteria». Votre réaction ?

Je pense que c’est une décision très juste et très réfléchie et qui mérite d’être félicitée. Il est totalement impensable, du moins en théorie, de laisser la classe sociale décider de l’accès à l’éducation tertiaire. Pour un développement vraiment soutenable, il est crucial d’inclure tous les membres de la société dans des secteurs clés et dans le processus de croissance, et cela passe par l’homogénéisation de l’accès à l’éducation tertiaire. Pour moi, il n’y a aucun doute que la démocratisation de l’accès à l’éducation tertiaire passe, avant tout, par un refus catégorique de laisser la classe sociale influencer l’accès à l’éducation primaire et secondaire. Alors que nous avons fait un pas dans la bonne direction, je pousserai même la barre un peu plus haut, en disant que les enfants de familles défavorisées à Maurice devraient avoir une allocation, afin de leur permettre d’acheter du matériel scolaire adéquat. Il reste aussi la question des leçons particulières qui, je pense ne sont pas à la portée de tout le monde. Je trouve, qu’il est donc très naïf de considérer, que cette mesure mettra fin à toutes les inégalités d’accès à l’éducation dans le pays. Ce n’est pas là nécessairement un reproche, mais un rappel qu’il y a bien plus à faire.

En ce qu’il s’agit des modalités de ces nouvelles bourses, celles-ci seront valables dans des institutions locales. Je pense que c’est là encore une très bonne initiative, car il faut donner de la valeur aux institutions tertiaires locales. Il est très important d’encourager l’amélioration de ces institutions qui façonneront dans un futur très proche l’avenir de notre pays. En particulier, j’aimerais voir le domaine de la recherche scientifique et sociale prendre plus d’ampleur à Maurice.

Certains estiment que c’est la méritocratie qui doit primer. Qu’en dites-vous ?

C’est là un très bon principe. Je pense que jusqu’ici, la méritocratie a primé dans l’octroi des bourses et il faut se rappeler que ce système n’a pas changé avec la nouvelle réforme des bourses. Il s’agit juste d’ajouter 16 bourses additionnelles pour les étudiants qui sont parmi les 500 premiers et qui ont une situation financière difficile. En ce qu’il s’agit des huit bourses qui seront octroyées aux étudiants venant de familles touchant moins de Rs 5 000, c’est une façon de rendre la situation encore plus juste et démocratique. Il est stupide de parler de méritocratie sans prendre en compte la situation sociale. En effet, un documents de l’université de New York, publié en 2005, démontre clairement un lien direct entre le statut socio-économique et la performance académique. À Maurice, cela pourrait être dû à des facteurs, comme une meilleure alimentation, un accès plus facile au matériel scolaire ou des leçons particulières. Le fait reste que la méritocratie doit prendre en compte le statut socio économique et cette mesure du gouvernement aidera sans doute à niveler ces inégalités qui existent depuis bien trop longtemps maintenant.

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