La nº 2 de l’ICAC, l’ex-président du conseil d’administration d’Air Mauritius et l’ancien gouverneur de la Banque de Maurice se retrouvent au cœur de l’actualité. C’est un hebdomadaire qui a publié des extraits d’un enregistrement qui incrimineraient ces personnalités. Celles-ci auraient ourdi un complot contre l’ex-Managing Director d’Air Mauritius.. Zoom sur ces protagonistes.
Nirvan Veerasamy, le professionnel
Il est connu pour être redoutable en business. Nirvan Veerasamy est un homme d’affaires spécialisé dans l’aviation. Sa riche carrière dans ce domaine parle pour lui. De nature calme, mais toujours sûr de lui, il travaille aujourd’hui comme Managing Director chez Veling Ltd, une compagnie qu’il a fondée en 2002 avec Nayak, un homme d’affaires basé à Londres.
Il n’a pas souhaité faire de commentaire sur le complot allégué dont il aurait été victime et qui aurait mis fin à sa carrière à la tête de la compagnie nationale d’aviation.
Sa compagnie actuelle fait des bénéfices en vendant des avions et en proposant du crédit-bail. Cette entreprise fait aussi du asset management et propose des solutions aux compagnies d’aviation. Avant d’atterrir à Air Mauritius, en 2005, où il a occupé le fauteuil de Managing Director pendant un an, Nirvan Veerasamy travaillait pour la compagnie internationale européenne Airbus où il dirigeait, avec succès, les campagnes de ventes en Asie, notamment en Inde, en Malaisie et au Singapour.
Vente à la pelle
À ce jour, le fils de feu Me Sacheedanand Veerasamy, un Senior Attorney qui avait été fait GOSK en mars 2005, a dirigé la vente d’au moins 60 avions. Détenteur d’une maîtrise en Air Transport Management du Cranfield Institute of Technology en Angleterre, il quitte Airbus et fonde la compagnie Aero Services (Mauritius) Ltd en 1993. Sur son site web, on apprend qu’il aurait fait de Maurice une plate-forme pour des transactions dans le domaine de l’aviation. Il avait également obtenu plusieurs mandats de la Singapore Airlines pour vendre leurs avions supplémentaires.
Pendant cette période, il a aussi vendu un A 310-300 à la Belgian Air Force. En 2002, il fait fusionner sa compagnie avec celle de Uday Nayak et fonde la Veling Ltd, une entreprise connue pour être très profitable et qui a vite connu le succès. Il se joint, le 26 septembre 2005 – deux mois après la prise du pouvoir de Navin Ramgoolam –, à la direction d’Air Mauritius à la demande du gouvernement mauricien. Durant son mandat, il aurait apporté, dit-on, des réformes pour diminuer les pertes qui auraient, peut-être, mené à sa perte au Paille-en-Queue Court.
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Indira Manrakhan : Inébranlable… pour l’instant
«I am absolutely fine !”. C’est d’une voix très calme qu’Indira Manrakhan dont le nom a été associé au complot allégué pour virer Nirvan Veerasamy, l’ex-Managing Director d’Air Mauritius, décrit son état d’esprit : «Je n’ai pas peur, je n’ai rien à cacher and I have nothing to be ashamed of. J’ai tout le temps bien fait mon travail et je vais continuer à le faire…»
Mais qui se cache donc derrière cette femme qui, à l’écouter, dégage une si grande assurance ? «Je suis née à Port-Louis», confie la no 2 de l’independent Commission Against Corruption (ICAC). De son père Teeluckdharry – décédé en 1979 – qui travaillait dans l’agriculture, elle a, dit-elle, hérité de son goût pour le travail mais, sa force de caractère lui vient surtout de sa mère Gowry, aujourd’hui âgée de 90 ans : «Elle a toujours été pour moi un role model car elle a une forte personnalité qui m’a toujours inspirée.»
Son enfance, c’est dans la cour du jardin de Pamplemousses où travaillait et habitait son père, qu’elle la passe : «J’y ai vécu de la seconde jusqu’au HSC que j’ai fait au Couvent de Lorette de Port-Louis.» Elle entame par la suite des études supérieures à l’université de Maurice. Elle en ressort détentrice d’un BSc en comptabilité et d’un MSc en finance.
Quelque temps plus tard, elle ajoute une nouvelle corde à son arc après des études à l’Association of Certified Fraud Examiners des Etats-Unis : «J’étais la première Mauricienne à recevoir une qualification de cette instance.» Elle commence, par la suite, sa carrière au département judiciaire de la Cour suprême avant de bouger dans les années 70, au ministère des Finances où elle restera de nombreuses années. En 1996, elle sera nommée Head of Investigation de l’Unified Revenue Board, avant de prendre les rênes de l’Economic Crimes Office, (l’ECO), le 24 août 2000.
À l’époque, deux ministres, notamment Vishnu Bundhun (l’affaire des molletons) et Kishore Deerpalsingh, s’étaient retrouvés dans sa ligne de mire. Les deux ministres seront révoqués.
«Cela n’a pas été tout le temps facile»
Le 21 décembre 2001, le gouvernement d’alors, le MMM-MSM, procède à la dissolution éclair de cette institution. «J’ai par la suite continué à exercer dans les finances car c’est mon domaine de prédilection», précise Indira Manrakhan. En mai 2006, elle est l’unique femme du nouveau conseil d’administration de l’ICAC. «Si on me met là, c’est qu’on a confiance en moi et dans mes capacités», nous avait-elle déclaré à l’époque.
Le moteur de sa vie ? Le travail, affirme cette mère de deux enfants, qui est divorcée. «Cela n’a pas été tout le temps facile de conjuguer les rôles de femme active et de maman mais je me suis accrochée. Aujourd’hui mes deux fils sont de hommes qui sont above 30. L’un est pilote à Dubayy et l’autre avocat au parquet. Ils sont ma fierté.»
Questionnée sur ce qu’elle pense de l’ampleur que prend l’affaire qui l’éclabousse, elle répond : «Je pense que je suis victime d’un complot et je n’arrive pas à m’expliquer cela. De mon côté, je n’ai rien à me reprocher. Je laisse à ceux qui aiment faire du tam-tam le soin de le faire. J’ai un travail à faire et je compte le faire.» Ce qui l’aide à avancer ? «Ma foi et mes principes…»
À ceux qui réclament sa démission, elle répond : «Je ne démissionnerai pas…» et répète une nouvelle fois : «Je n’ai rien à me reprocher.» Comme une dame de fer, elle reste digne : «Je suis sereine…»
----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Sanjay Bhuckory : du clan boolelliste
La simple évocation de son nom provoque des réactions. En ce moment, surtout. On le défend ou on le fustige. Sanjay Bhuckory ne laisse pas indifférent. Il y a ceux qui le soutiennent, pour qui il est un «homme intègre», un «excellent avocat», un «gentleman» et qui croient en son «honnêteté.» Mais, il y a également ceux qui voient en lui un «nominé politique», un «ambitieux», «une marionnette ».
Président du conseil d’administration d’Air Mauritius depuis le 30 septembre 2005 – il a soumis sa démission la semaine dernière –, Sanjay Bhuckory s’est muré dans le silence. Enfin presque. Lundi, sur Radio One, l’ex-président du Bar Council (2004-2005) s’est exprimé sur sa participation au complot allégué contre l’ex-Managing Director d’Air Mauritius, Nirvan Veerasamy : «Je n’ai participé à aucun complot.» Contacté au téléphone, cet habitant de Port-Louis, né le 7 février 1960, n’a pas voulu en dire plus.
L’homme de loi, âgé de 48 ans, n’en est pas à sa première nomination à un board. Il avait été directeur du conseil d’administration de la State Bank of Mauritius. Une nomination politique, pour certains. Une appréciation de ses qualités, pour d’autres. Néanmoins, Sanjay Bhuckory, marié à Kavita, une enseignante, n’a jamais caché ses préférences politiques. Ce père de deux adolescents – Sandip et Sanjana – est proche du Parti travailliste. Comme son oncle maternel, sir Satcam Boolell et son cousin, Arvin Boolell. Mais aussi comme son père Somduth Bhuckory, un avocat qui a été le secrétaire de la ville de Port-Louis et un poète renommé. Sa mère Chandranee, une fonctionnaire, a été vice-directrice de la Tourism Promotion Authority. Un «background familial» que ses proches qualifient de «riche». Comme son parcours académique.
Sanjay Bhuckory a fait ses classes de primaire à l’école Champ-de-Lort, maintenant Raoul Rivet Primary School… Puis, il rejoint le collège Royal de Port-Louis où il opte pour la filière scientifique. Il est head boy en 1979 : «J’avais déjà été accepté pour un cours de Structural Engineering à l’Imperial College of London, mais (…) mon année de head boy (…) (m’a) fait changer d’avis», a-t-il confié à un journal indien C’est ainsi que Sanjay Bhuckory étudie le droit à la London School of Economics & Political Science.
Un choix qui a changé toute sa vie… pour le meilleur ou pour le pire.
---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Dan Maraye : Ancien candidat rouge
Certains l’aiment, d’autres moins. Les avis divergent parmi ceux qui l’ont côtoyé dans le milieu du travail. «C’est un fin professionnel, très consciencieux, toujours à l’écoute», dit quelqu’un qui a connu Dan Maraye en 1989 alors que ce dernier était Senior Lecturer en comptabilité à l’université de Maurice. Pour un autre ancien collègue, «il veut redresser les institutions dans lesquelles il travaille, quitte à faire des mécontents».
Des mécontents, il en a fait ! «Il ne sait pas se mettre à la place des autres et n’accepte pas que ses décisions soient remises en question», déclare un syndicaliste d’Airports of Mauritius Ltd (AML). Celui-ci ne critique pas «ses compétences professionnelles, mais sa façon de gérer».
Dan Maraye avait intégré AML en tant que Chief Executive Officer, en février 2006, avant de démissionner en juin 2007 à la suite de différends avec son conseil d’administration et le syndicat de la compagnie. Il affirme : «C’est parce que je ne suis pas un yes man.» Depuis, il est «Managing Director d’une grande compagnie indienne».
Et, pour l’heure, Dan Maraye ne souhaite pas faire de déclaration sur le complot allégué contre l’ex-directeur d’Air Mauritius, Nirvan Veerasamy.
Ce père de deux garçons et d’une fille – il a aussi trois petits-enfants – avait aussi fait parler de lui à la fin des années 90. En novembre 1998, il démissionne du poste de gouverneur de la Banque de Maurice qu’il occupait depuis 1996. Ce serait après le scandale des nouveaux billets de banque aux écritures inversées, mais, dit-il «je ne veux pas entrer dans les détails de ce départ.»
Par la suite, l’expert-comptable – il a fréquenté l’école primaire St-Enfant-Jésus et le collège New Eton et a fait ses études supérieures à l’université de Maurice et en Angleterre – ouvrira les portes de la Glamis School. Celle-ci est spécialisée dans la formation en management et finance.
Ce natif de Belle-Rose, qui a aussi travaillé en Angleterre à ses débuts et dans divers organismes parapublics à Maurice, a également tâté à la politique active. En 1991, il est candidat malheureux aux législatives dans la circonscription Moka-Quartier-Militaire. Peu après, il s’envole pour l’Écosse pour travailler comme conférencier dans une université. Il rentrera à Maurice après les élections de 1995.