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Les symptômes d’un malaise

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C’est en refusant de travailler que les employés de la CNT ont fait entendre leur voix.

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Suite aux inondations meurtrières du 30 mars, des Mauriciens ont protesté pour réclamer la démission d’Anil Bachoo.

On se met en grève. On critique sans relâche. Et on menace de prendre des actions. Depuis quelque temps, de nombreux Mauriciens ont décidé de se faire entendre… Qu’est-ce que cela démontre ?

C’est la saison des «atchoums». Et Maurice n’a, semble-t-il, pas pu éviter la contagion. Petite baisse de forme due à une grippe sans gravité, ou alors grosse infection dangereuse ? Depuis quelque temps, le pays a petite mine. Résultat de plusieurs mois «d’imprudences» : les récentes allégations de corruption au sein du judiciaire, l’affaire Varma, le manque de performance de certains ministres, la hausse des prix, les problèmes à la CNT, les inondations meurtrières du 30 mars, entre autres. Du coup, expliquent les observateurs sociaux interrogés, de nombreux mouvements de protestation et de revendications sociales ont vu le jour ces derniers temps. Grève, go-slow, marche, frustration déversée sur les radios privées et sur les réseaux sociaux…

En mode antibiotique. Ces différentes initiatives sont une façon de se faire entendre, de faire bouger les choses, faire réagir les autorités et crier à l’injustice. La dernière en date : la marche de protestation des bénéficiaires de l’APEIM, le mercredi 10 juillet, contre le manque d’égards du gouvernement. Le samedi 6 juillet, ce sont les syndicalistes et les employés du secteur privé qui ont manifesté pour une hausse de salaire. Des prêtres, sentant le malaise grandissant, se sont réunis pour demander aux autorités de prendre des mesures pour redresser la situation. Il y a quelques semaines, les employés de la CNT ont paralysé le pays lors d’une grève des autobus.

Et que dire des commentaires qui sont de plus en plus virulents sur Facebook ou sur les forums de discussion ? Pour Jocelyn Chan Low, historien et observateur, on assiste actuellement à «une perception du pourrissement de la situation à Maurice». Il estime qu’une «étincelle» suffirait, désormais, à mettre le feu au pays : «Comme en février 1999.» Tulsiraj Benydin, syndicaliste, abonde dans le même sens : «Tous ces mouvements démontrent qu’il y a un malaise dans le pays. Ici, on laisse pourrir la situation et c’est ensuite, quand il est trop tard, qu’on essaie de réagir.» Il estime qu’il y a un manque de dialogue social : «Il est en panne. Pourtant, pour éviter les conflits et que les personnes montrent leur mécontentement à travers des actions, il est essentiel de dialoguer et de trouver des solutions avant.»

Le syndicaliste pense qu’il y a, actuellement, un sentiment de ras-le-bol qui anime les Mauriciens : «Il n’y a pas de politique salariale, pas de salaire minimum. Les employés du privé se sentent délaissés et frustrés alors que les travailleurs de la fonction publique reçoivent des augmentations, qui sont méritées, bien sûr.» Une frustration «normale» estime Tulsiraj Benydin : «Tout le monde doit faire ses courses, doit dépenser pour ses enfants…» De plus, il met le doigt sur le manque de confiance des Mauriciens envers le gouvernement et les institutions.

La faute aux nombreux scandales, aux passe-droits allégués et à la perception que la loi n’est pas la même pour tous : «Tout cela a créé beaucoup de méfiance. Le climat social est en train de dégénérer.» Dharam Gokhool, ancien ministre, considère, également, que les différents mouvements de protestation sont synonymes «d’un manque de dialogue». Mais au-delà de ce déficit de dialogue, cette crise de confiance en les institutions et la remise en cause de la performance du gouvernement, il y a un autre facteur qui vient attiser les tensions : la situation économique difficile.

Malenn Oodiah, sociologue et observateur, résume dans un billet, «1982, 2013 et l’avenir», son point de vue sur la situation actuelle. La situation économique influerait sur le mood des Mauriciens : «Tous les indicateurs vont dans ce sens: croissance revue à la baisse, chômage en hausse, PME en difficulté, licenciements en hausse, contraction du secteur de la construction, difficultés persistantes du secteur touristique, etc. Il y a de quoi s’inquiéter quand on connaît la toile de fond sociale : une société dépressive.» Néanmoins, pour lui, les solutions économiques ne sont pas les seules à pouvoir sortir le pays de cette «crise sociétale» : «Il faudra une mobilisation de tous autour de valeurs fortes pour porter ensemble un nouveau projet de société. Que ce soit au niveau du pays, des institutions et des entreprises, seuls les leaders exemplaires peuvent le faire.»

Alors, pour une guérison de ce mal qui ronge la société et qui pousse vers la revendication, il faudrait que ceux qui dirigent trouvent un bon remède. Le sociologue prescrit : «Un vrai débat démocratique pour dégager les axes d’une stratégie d’une vraie sortie de crise.»

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