Un écrivain qui s’interroge sur l’identité du Mauricien.
L’homme adore les livres de Stephen King et H. P. Lovecraft.
Incursion dans le monde de deux auteurs récemment récompensés pour leurs œuvres littéraires. D’abord, le lauréat du Prix Jean Fanchette 2013 : Ashvin Krishna Dwarka, notaire dont l’ouvrage Le Neuvième passage (Sic Moriuntur Ismailliae), a été qualifié de «thriller philosophique» par le jury du concours, composé du Prix Nobel de Littérature J.M.G. Le Clézio, de Martha Van der Drift de l’Université de North Carolina, USA, et d’Issa Asgarally. Puis, Thierry Château, lauréat du Prix Adelf-Amopa pour son tout dernier livre : Citoyens du monde – Les Mauriciens sont des gens comme les autres.
Thierry, le citoyen
Votre livre affirme et questionne beaucoup sur l’identité du Mauricien. Après l’avoir écrit, comment vous êtes-vous senti ?
Je dirais que le mot est «satisfaction», car j’ai pu partager mes idées, étant donné que c’est un exercice personnel que chacun est libre d’interpréter à sa manière. La satisfaction est aussi venue avec le Prix Adelf-Amopa (prix de l’Association des écrivains de langue française et de l’Association des membres de l’Ordre des Palmes académiques, en France).
L’ouvrage aborde, avec beaucoup de franchise, plusieurs sujets concernant notamment le communalisme et le racisme. Ressentiez-vous le besoin d’en parler ?
Je suis quelqu’un qui écrit tout d’abord pour le plaisir. Mais j’ai aussi voulu contribuer au débat sur ces choses négatives qui existent dans notre société d’aujourd’hui.
Avez-vous eu des difficultés dans vos recherches sur ces sujets et pour le livre en général ?
Pas vraiment, je dois l’avouer. Étant écrivain (NdlR : Thierry Château a écrit Motorcycle Man, Cité Taule, Porlwi Fam Nwar et Février Noir, entre autres), je lis beaucoup et j’ai beaucoup puisé dans des ouvrages écrits par des historiens et d’autres auteurs.
Et maintenant ?
Comme annoncé lors du lancement et de la remise du prix, cette fois, je m’attelle à un roman. Je ne vais pas en dire plus, mais il sera bientôt, lui aussi, publié chez Osman Publishing.
Ashvin, le mystérieux
Pouvez-vous vous présenter en quelques mots…
Je suis un ancien étudiant du collège Royal de Curepipe, j’ai été lauréat de l’Alliance française en 1994. Mon parcours littéraire se résume à mes lectures, puisque Le Neuvième Passage est mon premier roman. (NdlR : Ashvin a fait ses études à la London School of Economics and Political Science ; il a aussi décroché un Master’s Degree in Civil Law de l’université de Paris)
Comment le notaire de Dwarka Chambers s’est-il retrouvé dans cette aventure littéraire ?
J’avais écrit et terminé le roman en 2005, alors que je travaillais encore à Paris. Mais après mon retour à Maurice fin 2005 et mon entrée dans le monde du notariat, je n’ai guère eu le temps de démarcher des éditeurs. Donc, le texte a dormi dans un tiroir pendant tout ce temps. Je me disais qu’un jour, lorsque ma fille serait grande, elle dépoussiérerait le roman et le publierait sous son nom. C’est par hasard que j’ai vu l’annonce du concours Jean Fanchette sur un numéro de l’express qui était posé sur un coin du bureau de mon associé senior, Me Jean Hugues Maigrot. Je me suis dit : «Pourquoi pas ?»
Parlez-nous de l’écriture du livre ?
J’ai travaillé dessus sur une période d’un peu plus d’un an, alors que je vivais et travaillais comme juriste de droit immobilier à Paris et que mon épouse était enceinte de notre fille. L’écriture du roman m’a demandé six mois de recherche (soirées et week-ends) et environ neuf mois d’écriture. Je n’ai pas cherché l’inspiration, elle est venue presque d’elle-même, et j’ai simplement laissé ma plume (et mon clavier) faire le reste.
Quel sont vos influences littéraires (le jury a notamment fait allusion à Le Nom de la rose d’Umberto Eco) ?
Je vais probablement vous surprendre, mais je n’ai jamais lu Le Nom de la rose. Je n’ai découvert Umberto Eco qu’après avoir complété mon roman, et le seul livre que j’ai lu de cet auteur est Le Pendule de Foucault. Je suis évidemment extrêmement honoré d’avoir été comparé à ce géant de la littérature et ce, par un jury comprenant l’immense J.M.G. Le Clézio. Toutefois, mes influences se situent plus du côté de la science fiction (Philip José Farmer, et sa pentalogie du Monde du Fleuve, que tout adolescent devrait absolument lire) et d’auteurs tels que Stephen King, Bram Stoker, Edgar Allan Poe, Robert Ervin Howard et H. P. Lovecraft. J’ai également été influencé par le philosophe Friedrich W. Nietzsche.
Que pensez-vous de l’état de la littérature, autant artistiquement que commercialement ?
Très vivante artistiquement. Commercialement, je ne sais pas (pas encore, en tout cas). Mais quoi qu’il en soit, il convient de saluer le travail admirable accompli par les organisateurs et les jurés du Prix Jean Fanchette, qui consacrent tant de ressources, d’énergie et de temps à ce concours dans le seul but de faire vivre et respirer la littérature. À une époque où tant de Mauriciens compétents tournent le dos à leur île natale en quête d’herbe prétendument plus verte ailleurs, comment ne pas être ému par ce Prix Nobel de Littérature qui fait l’effort de revenir aussi souvent vers l’île de ses ancêtres immédiats.
Quand le grand public pourra-t-il découvrir le fameux roman ?
Dès que j’aurai trouvé un éditeur. En attendant, il faudra forcer mon coffre pour trouver un exemplaire…
Un autre livre en préparation ?
Trois autres, dont deux thrillers, toujours avec une dimension philosophique, car mon but est non seulement de permettre à mon lecteur de vivre un moment d’évasion, mais également de l’inviter à une réflexion pérenne sur des questions fondamentales, sur les notions de Bien et de Mal, de Morale, de Droit et de Justice.