vous souvenez-vous des passionnants débats qui avaient lieu dans le sillage de l’affaire Gro Derek, en septembre dernier, quand on découvrait la facilité avec laquelle Rs180 millions pouvaient être blanchies? Vous rappelez-vous cet étrange feeling qu’avaient eu les honnêtes citoyens, les gens ordinaires, ceux qui doivent justifier les moindres transferts bancaires, leurs plus petits achats immobiliers auprès de la MRA ? Que constatait-on alors ? Que c’était chose banale pour une certaine catégorie de personnes de faire circuler du big money en toute impunité, sans éveiller les soupçons, tout comme l’on s’apercevait qu’il était facile d’acquérir des voitures de luxe, sans inquiétude. Quelle analyse n’avait pas été faite pendant les semaines qui ont suivi ce scandale? On espérait que cette affaire provoquerait une prise de conscience de la part des services tels que la police, la MRA, l’ICAC ou les organismes paraétatiques censés exercer une vigilance sur les sources de revenus opaques.
On s’attendait dès lors à une nouvelle structure de collaboration en vue de traquer ces nouveaux multimillionnaires qui gagnaient de l’argent malhonnêtement. Aujourd’hui, que découvre-t-on ? Qu’il est tout aussi possible d’engranger (on est loin des petits Rs180 millions) plus de Rs700 millions (Rs 1 milliard selon Valayden, Rs 1,7 milliard selon Tengur) d’une manière frauduleuse, encore une fois au nez et à la barbe des autorités qui, comme à l’accoutumée, n’ont rien vu venir. Pire, et heureusement que le ridicule ne tue pas, l’on apprend qu’un bureau de la FIU se trouve dans les mêmes locaux que la société White Dot.
Donc, six mois après l’histoire de Gro Derek, l’on assiste à un nouveau scandale de gros sous, cette fois façon Ponzi, mettant en scène de jeunes protagonistes (le présumé cerveau n’a que 23 ans) qui se permettaient le luxe d’opérer sans permis et sans tracas, au mépris de toutes les lois. Comme dans l’affaire Gro Derek, les présumés coupables n’hésitaient pas à s’acheter des dizaines de véhicules, sans qu’ils ne soient inquiétés. Outre l’achat des voitures, des sociétés sœurs ont vu le jour alors que les grands moyens ont été utilisés pour l’ouverture de la pizzeria La Napoletana dans plusieurs régions de l’île. Pourtant, faut dire que tous ceux qui ont eu l’occasion d’aller goûter à leur cuisine furent souvent étonnés de constater que, bizarrement, il y avait plus de serveurs que de clients. N’empêche, la boîte continuait à tourner, ouvrant même d’autres succursales ailleurs sans difficulté.
Il aura fallu l’arrestation des présumés suspects pour que les employés réalisent qu’ils sont les dommages collatéraux de cette fraude. Et devant ces drames humains, encore une fois on y va tous avec la même série de questions : Comment se fait-il que la FSC, la banque de Maurice, la police, entre autres institutions ont manqué à ce point de vigilance sur les transactions illégales de cette société qui opère depuis trois ans ? Certes, si toute cette chaîne d’escroquerie a été rendue possible, c’est en grande partie à cause des victimes elles-mêmes qui voulaient gagner beaucoup d’argent et très vite. Signe symptomatique de notre société dans laquelle certains pensent qu’il est facile de devenir riches sans sacrifice alors que d’autres profitent de ces montages financiers frauduleux pour placer leurs revenus, obtenus d’une manière qui est loin d’être transparente. Et maintenant ? Après la médiatique affaire White Dot est-ce que la police ouvrira les yeux sur toutes ces sociétés qui, semble-t-il, sont connues pour arnaquer des épargnants ? Ou faudra-t-il attendre encore un autre scandale pour découvrir d’autres cas d’escroquerie ?