IL est de ces moments où la partisanerie sait se faire oublier. La politique cède alors sa place à l’humanité des uns et des autres. La vague de sympathie des Mauriciens tous bords confondus, du citoyen lambda au Premier ministre, envers Bérenger après sa courageuse révélation, donne un visage affectueux du pays aux enfants de la République. Pour une fois, l’exemple est venu d’en haut et les plus tonitruants adversaires du leader de l’opposition ont mis de côté leurs couleurs politiques pour se draper dans une bien meilleure tenue. Il était encourageant d’entendre et de lire les bons mots de Patrick Assirvaden et Nita Deerpalsing, qui d’ordinaire, tirent avec rage sur le leader de l’opposition.
Loin des débats enflammés sinon vulgaires gouvernement/opposition qui caractérisent la scène politique depuis les dernières municipales, loin de ces empoignades auxquelles se sont livrés Ramgoolam et Bérenger à l’Assemblée nationale avant les vacances parlementaires, la déclaration du leader du MMM a ceci de bon : elle nous rappelle qu’au final la politique n’est pas au-dessus de tout. Et que dans les épreuves, adversaires ou pas, les hommes peuvent se montrer solidaires. Au fond, cette nouvelle a forcé nos politiciens à redevenir raisonnables et humains. Du coup, l’on assiste, depuis mercredi dernier, à un certain apaisement sur la scène politique.
Mais si la bravoure de Bérenger a été saluée de part et d’autre, c’est aussi parce que cette annonce survient à un moment crucial du passionné débat ‘Vie privée, vie publique’ qu’a provoqué l’affaire Soornack. En choisissant de ne pas garder secret son mal, malgré la vulnérabilité que lui confère cette annonce (il y a ceux qui n’osent même pas prononcer le mot cancer tandis que d’autres l’associent directement à la mort) Bérenger brise non seulement un tabou mais il envoie également un message clair : la maladie qui relève de l’intime, du privé d’une personnalité, peut être d’intérêt public et mérite d’être révélée. Du moins, de son point de vue.
D’ailleurs, si la population d’une manière générale lui a adressé à travers la presse écrite et parlée, le souhait d’un prompt rétablissement, c’est qu’au-delà de l’admiration, elle a apprécié ce langage de vérité, cette «transparence» qui fait cruellement défaut à la classe politique. À l’heure où l’opposition a le vent en poupe, après sa victoire aux municipales, à un moment où les PNQs sont de véritables bombes à scandale à l’Assemblée nationale, Bérenger aurait pu, comme d’autres, s’envelopper d’un voile opaque ou alors cacher l’exacte nature de ce qui commence à le ronger. D’autant qu’il semblait au top de sa forme ces derniers temps en visant à chaque fois le gouvernement au bon endroit. C’est dire qu’il aurait pu continuer à guerroyer contre l’alliance PTr/PMSD tout en entourant son carnet de santé d’un épais mystère. Mais Bérenger a choisi l’honnêteté. Pour mieux livrer bataille contre ce cancer qu’il dit regarder en face. Et c’est tout à son honneur. Cette guerre-là est juste !