Heureusement que la chirurgie esthétique peut réparer les dégâts
Des cicatrices qui lui rappelleront toute sa vie la violence de son mari. Veena Ramachundren a eu le visage tailladé au cutter le mardi 7 septembre dernier. Son agresseur n’est autre que son époux, Vythilingum, 32 ans, duquel elle vivait séparée depuis le 10 mars dernier. Il ne supportait pas cette séparation. Traumatisée et défigurée, Veena lance un appel aux femmes battues : «Sortez de votre silence, dénoncez les maris violents».
«C’est ma faute si j’ai été agressée par mon mari, je lui étais trop soumise», regrette Veena. Et d’ajouter «Si je ne m’étais courbée devant lui, il ne m’aurait jamais lacéré le visage comme il l’a fait. » Elle lance donc un appel aux femmes battues pour qu’elles «dénoncent» leurs maris «violents afin que vous ne vous trouviez pas dans la même situation que moi demain».
Ces «violences» ont commencé après la demande en mariage : «Il a fait une demande en mariage et j’ai accepté. Étant donné que je viens d’une famille pauvre, j’ai pensé que mon mariage diminuerait le fardeau de mes parents. Même avant le mariage, mon mari était agressif ; si je ne faisais pas ce qu’il me demandait de faire il m’ enguelait et parfois, je recevais même des coups». Elle a déjà eu un œil au beurre noir : «Je n’ai jamais voulu porter l’affaire à la police, je me suis dit qu’il fallait que je me soumette à mon époux mais cette fois-ci, il est allé trop loin».
Quatre longues entailles recouvertes d’un gel marquent son visage. Plus bas, sur le cou, il y en a une autre aussi impressionnante que les quatre. «Il a voulu m’égorger», déclare Veena en désignant la plaie suturée. «Zamé mo ti a espéré ène acte de violence pareil de mo mari», confie-t-elle
Si Veena a songé à faire disparaître ces traces de violence sur son visage en ayant recours à la chirurgie plastique, son médecin traitant de l’hôpital Jeetoo lui a laissé entendre que ce ne serait pas nécéssaire: « Le médecin m’a dit qu’il a pris toutes les précautions nécessaires en suturant mes plaies pour qu’il n’y ait pas de cicatrices visibles. Si toutefois, elles sont trop visibles, j’aimerai avoir recours à la chirurgie plastique (voir hors - texte sur ce sujet plus loin). Mais c’est une intervention qui coûte très cher et je ne crois pas que j’aurai les moyens suffisants pour le faire».
Ressentant de légers malaises en se déplaçant, cette jeune mère d’un petit Davylen, 3 ans, se dit «soulagée» en parlant de l’arrestation de son époux, son présumé agresseur : «Toutefois, je ressens toujours une frayeur. À chaque fois que je ferme les yeux, je le revois me lacérant le visage avec son cutter».
Veena s’en va
Deux jours avant l’anniversaire de l’indépendance cette année, Veena délaisse le toit conjugal à Cap Malheureux pour rentrer chez ses parents avec son fils. La raison : elle est trop violentée par Vythilingum. «Je n’en pouvais plus d’être humiliée, de vivre dans la peur», explique-t-elle. Son mari ne cesse de la harceler pour qu’elle retourne avec lui mais elle s’obstine dans sa décision de se séparer de lui : «En me séparant de lui, je ne savais pas si je voulais divorcer ou pas». Quand nous lui demandons si après son agression, elle compte divorcer de son mari, elle répond : «Pa enkor konné».
Le jour de l’agression, soit le mardi 7 septembre dernier, Veena, qui a trouvé un emploi comme secrétaire chez un arpenteur juré depuis un mois, s’apprête à quitter le domicile de ses parents à la rue Calcutt, Camp-Yoloff, Port-Louis, pour payer la facture de téléphone. Il est alors 11h15. «Comme j’ai ouvert la porte d’entrée, il est apparu devant moi», raconte-t-elle. Vythilingum, selon son récit, ne lui laisse pas le temps et s’écrie : «Tu vas te remettre avec moi ou pas?». À cette question, Veena répond : «Non, je ne reviendrai pas».
Selon Veena, suite à cette réponse, son époux enroule sa longue chevelure dans sa main droite, la tire vers lui avant de lui lacérer le visage tout en lançant: «Si to pa pu vine pu mwa, to pa pu vine pu personne, la terre ki pu hérite twa»,
En quelques secondes, «la lame d’un cutter neuf m’a défigurée et il m’a blessée à la main gauche alors que je me protégeais», dit-elle. Au moment où le présumé agresseur s’apprête à trancher la gorge de sa victime, des cris le font sursauter : «Ma voisine m’appelait pour me demander si j’allais lui confier mon enfant avant que je ne m’en aille. En entendant ma voisine appeler mon nom, il s’est enfui». Leur fils Davylen assiste à toute la scène. Il racontera plus tard à ses proches : «Papa a pris un couteau et il a coupé mama avec».
Le visage ensanglanté, la peur au ventre, Veena trouve quand même le courage de rechercher de l’aide auprès de sa voisine. «Mes paupières pendaient. J’ai pensé à Dieu et à mon fils et j’ai alors eu le courage d’aller chercher de l’aide». Elle est conduite d’urgence à l’hôpital où elle subira une intervention chirurgicale. Elle a été hospitalisée pendant sept jours.
Quant à son présumé agresseur, son époux Vythilingum, il s’est rendu lundi dernier au poste de police de Trou Fanfaron. Une charge provisoire de tentative d’assassinat a été retenue contre lui. Son avocat, Me Samad Golamaully, nous a déclaré que son client «nie la charge de tentative d’assassinat».
Ses blessures pansées, Veena songe à avoir recours à un psychologue pour «évacuer ce traumatisme».
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Dr Rajendraprasad Gunessee, chirurgien plastique : «Le cas de Veena Ramachundren est traitable. L’opération est gratuite»
«Si les cicatrices sont visibles, j’envisagerai peut-être d’avoir recours à la chirurgie mais j’ai entendu dire que c’est très cher», nous déclare Veena Ramachundren qui a eu le visage tailladé au cutter par son époux Vythilingum, le vendredi 10 septembre dernier.
Le Dr Rajendraprasad Gunessee, chirurgien plastique à l’hôpital Victoria, soutient que le cas de Veena Ramachundren peut être traité gratuitement à l’hôpital si elle le désire : «Cette intervention est gratuite. D’après ce que vous m’expliquez, je pense que pour traiter la patiente, il faudra commencer par la soigner en dessous de la peau. Cette intervention est tout à fait sans risque et on arrive à un résultat surprenant.»
Le Dr Gunessee explique la chirurgie réparatrice: «Il s’agit de réparer des dégâts occasionnés par des accidents ou dans le cas d’une personne souffrant d’une difformité».
Selon le médecin, environ 2 400 patients par an se tournent vers la chirurgie réparatrice: «C’est uniquement la chirurgie réparatrice qui est pratiquée à l’hôpital. Je pratique la chirurgie esthétique uniquement en privé. Généralement, à Maurice, les gens qui viennent me voir dans le privé, me sollicitent pour une liposuccion des hanches ou du ventre. Il s’agit de s’attaquer à la graisse qui s’est amassée dans ces parties du corps. Une autre opération qui est aussi très prisée par les Mauriciennes ,c’est la chirurgie des seins. Les patientes qui viennent me voir peuvent être classées en deux catégories : celles qui viennent pour une réduction et celles qui veulent une augmentation de la taille de leurs seins car dans les deux cas il y a généralement un sentiment de mal-être qui habite ces femmes. Il y a aussi des hommes qui subissent des opérations pour se faire refaire les seins.»
Pour le Dr Gunessee, l’île Maurice n’a rien à envier aux pays d’Europe ou d’Amérique du Nord en termes de technique ou d’équipements modernes en ce qu’il s’agit de la chirurgie plastique et esthétique: «Les opérations coûtent généralement dans la fourchette de Rs 25 000 à Rs 40 000».
Par Nadine Bernard/Christophe Karghoo
et Didier Jeewooth