Une dynamique est en train de se créer en faveur des travaillistes. Le succès de leur meeting à la Louise vendredi en est une indication. Il vient s’ajouter à la victoire du candidat rouge Rajesh Jeetah à la partielle organisée à Piton-Rivière du Rempart et à la réussite, en termes d’affluence, du meeting du PTr dans le cadre de la fête du Travail.
Le PTr joue sur l’émotion. Sa thématique est demeurée invariable depuis sa débâcle en septembre 2000. Pour ce parti, le gouvernement MSM/MMM favorise « le gros capital » au détriment du «peuple .» Il dénonce ce qu’il appelle la réunification des pouvoirs politique et économique entre les mains d’un même groupe de personnes. Pour les rouges, il faut une « véritable » démocratisation de l’économie. À la Louise, Navin Ramgoolam a exhorté ses partisans de lui donner l’occasion de changer leur vie car, selon lui, la politique économique du gouvernement est un échec.
Un sentiment d’insécurité, sur le plan social et économique, travaille la population. Un nombre grandissant de Mauriciens ont envie de zapper sur l’Opposition comme pour exorciser leurs peurs. Le discours de celle-ci commence à les séduire.
Quand un Premier ministre souligne que nous sommes en état d’urgence économique, cela provoque des inquiétudes d’autant plus que la zone franche textile licencie par vagues. Faisant écho au gouvernement, l’Opposition assure, elle-aussi - le contraire eût étonné - que nous sommes dans une situation peu enviable économiquement mais récuse l’argumentation du Premier ministre qui attribue cet état de choses uniquement aux causes extérieures.
Rama Sithanen, ministre des Finances dans le Cabinet fantôme rouge, s’inscrit en faux contre Paul Bérenger dans notre rubrique ‘Ça fait débat’ en page 9 : « Certes, on subit les effets des changements au niveau international mais il ne faut pas passer sous silence les ‘self- inflicted wounds’. L’échec de notre diplomatie économique à défendre nos intérêts vitaux dans le sucre et le textile. L’irresponsabilité et l’incompétence du gouvernement ont affecté nos chances de dérogation pour le ‘third country fabric’ dans le cadre de l’AGOA. On a tué la consommation avec l’augmentation de 50% de la TVA. L’investissement recule. La confusion dans le processus décisionnel envoie de mauvais signaux. Il y a les mauvaises décisions avec la taxe punitive dans le tourisme et les tergiversations dans la libéralisation du secteur de la télécommunication. »
L’ancien ministre des Finances est un économiste de haut niveau qui a le verbe facile. Quelquefois, il cisèle des petites phrases assassines qui font des dégâts. Face à lui, les hiérarques du gouvernement n’auront pas la partie facile.
Et pendant ce temps-là, que fait l’actuel ministre des Finances ? Au lieu d’apporter la contradiction aux arguments de l’Opposition sur, par exemple, le petit écran face à une audience nationale, Pravind Jugnauth organise un congrès dans chaque circonscription pour prêcher, en grande partie, à des convertis. Sur ces entrefaites, c’est le Premier ministre qui joue les ministres des Finances face à l’opinion.
L’Opposition a le vent en poupe aussi parce que le gouvernement a commis pas mal de maladresses. Il a mal géré l’opinion en vue de la création de la Mauritius Revenue Authority, de la restructuration de la pension de vieillesse et de l’introduction du constat à l’amiable. Sa volonté affichée de serrer la vis aux radios privées apparaît suspecte. La déclaration du ministre de l’emploi à l’effet qu’il n’y a pas de véritables chômeurs à Maurice est une sérieuse sortie de route.
Et puis quand Navin Ramgoolam évoque le « transfert punitif » de Vidhu Madhud-Dassyne du Scene of Crime Office au Forensic Science Laboratory et le passage à la trappe de Indira Manrakhan, ex-directrice du défunt Economic Crime Office, il électrise son électorat.
L’émotion est devenue l’arme fatale des travaillistes.