Des visages défaits. C’était le triste spectacle dans les unités
de Floréal Knitwear qui ont fermé leurs portes jeudi dernier
«Lor ki critère fine met mwa déhor ? La direction ti dire pa pu licencié bane vieux», lance Sadna Joomun. Cette employée de l’unité de Floréal Knitwear de St-Paul, âgée de 49 ans et comptant 31 ans de service au sein du groupe, a reçu, jeudi dernier, sa lettre de licenciement et un chèque représentant l’indemnité qui lui est accordée.
Le regard de Sadna en dit long. Les yeux rougis, les traits tirés, elle allègue qu’aucun critère établi par la direction n’a été appliqué par celle-ci : «La plupart meilleure travailler ki fine met déhor. Critère ancienneté pa fine respecté».
Après avoir annoncé un plan de restructuration et la suppression d’environ 900 des 4000 emplois le vendredi 30 juillet dernier, la direction de Floréal avait déclaré avoir établi quatre critères pour choisir celles et ceux qui seront licenciés, à savoir l’ancienneté, la performance, la qualité et la régularité.
Comme Sadna Joomun, les autres licenciés, qui sont au nombre de 920, se posent la même question car la lettre de licenciement, signée conjointement par Veena Ghurburrun et Neera Munisamy, respectivement ‘Human Resources Manager’ et ‘Production Executive’, ne fait nullement mention des raisons du licenciement.
Nicolas Maigrot, ‘Executive Director’ de Floréal, explique que la principale raison du licenciement demeure la restructuration à la question de savoir pourquoi les lettres de licenciement ne faisaient pas mention des raisons du licenciement : «C’est malheureux pour ceux qui nous ont quittés mais tout a été fait dans la plus grande justice». Il ajoute que «la direction de Floréal est consciente de la contribution de ces employés affectés par cette restructuration. Conscients de notre responsabilité sociale, nous avons mis en œuvre un plan d’accompagnement élaboré qui permettra à tous ceux concernés d’avoir la possibilité de se recycler et de se former dans un autre domaine.
Moohit Ramkissoon, 54 ans, est, par conséquent, révolté : «Mone travail 33 ans dan mécanik dan sa lizine la. Zordi pé met mwa déhor. Mone rentre dan lizine la zen, mo pé sorti vié. Mo éna quatre zenfan parmi ene ki ena deux ans. Sa laz la ki sanla pu oulé prend mwa pu travail ?».
«Ki nu pu fer aster»
Geneviève, 42 ans, une veuve qui comptait 18 ans de service, déplore pour sa part que «pa même donne nu explication kan nu demandé kifer fine met nu déhor. Ploré pa ploré pa pu reprend nu. Ki nu pu fer aster».
La direction de Floréal soutient à ce sujet qu’elle a mis sur pied un plan d’accompagnement social en exposant des possibilités d’emploi dans d’autres secteurs et assurant une formation dans certains domaines aux licenciés. Ainsi, un ‘job fair’ sera organisé demain au gymnase de l’IVTB d’Ebène. Un ‘Reskilling/Retraining Fair’ sera aussi organisé ce jeudi au collège Royal de Curepipe.
Les cours dans les domaines suivants seront offerts : l’artisanat, l’hôtellerie, la conservation et la préservation de fruits, la pâtisserie,les soins aux personnes âgées, la bijouterie, l’habillement (chemises, t-shirts, broderie) et l’agriculture.
Mais les licenciés demeurent sceptiques. «Sé ki ti pé envi allé volontairement zot pane laisse allé. A 41 ans ki mo pu alle suivre cours pu travail dan lotel. Reste à savoir si nu pu gagne travail aster», s’inquiète Dorine, 41 ans. Maryse dit pour sa part que «mo pu alle cour la même si li pa pu servi nu narnié».
Les commentaires vont bon train, surtout que ceux qui ont été licenciés lors du dernier exercice de restructuration n’ont toujours pas obtenu un emploi. «Si Floréal ine met nu déhor eski aster lézot lizine pu ramasse nu ?».
Jessy, 54 ans, ex-machiniste, soutient qu’elle est toujours au chômage alors qu’elle a été licenciée le 2 juin 2000 : «Mo pé bisin vend ti gato lor simé pu gagne mo lavi, pourtant kan ti met mwa déhors ti promet mwa mo pu regagne travail».
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Yusuf Sooklall : «Le ministre Soodhun doit assumer ses responsabilités»
Le syndicaliste Yusuf Sooklall n’a pas été tendre envers le ministre du Travail, Showkutally Soodhun. C’était lors d’une conférence de presse vendredi dernier. «Le ministre Soodhun doit assumer ses responsabilités. Kan travailleur fini perdi travail lerla ki li organiz tripartite. Trop tard aster», a-t-il dit. Il en a aussi profité pour faire le procès de Floréal : «La direction de Floréal et le ministère du Travail nous ont mis devant les faits accomplis». Il a également dénoncé la façon dont la direction de Floréal et le ministre Soodhun ont traité les licenciés : «Sé kine arrivé hier (jeudi dernier) péna mot pu décrire sa. Aukune critère pane respecté». Yusuf Sooklall a déclaré qu’il a écrit au leader de l’Opposition, le Dr Navin Ramgooalm, pour que cette affaire soit soulevée à l’Assemblée nationale ce mardi. Une autre correspondance a été envoyée au PM Paul Bérenger. Le syndicaliste réclame un rendez-vous avec le PM, n’ayant pas été satisfait de l’exercice de licenciement.