Les accidents dits mineurs sont souvent source de gros embouteillages. La nouvelle loi vise à éviter cet état des choses
Le constat à l’amiable vise à prévenir des embouteillages inutiles lors des accidents mineurs et à diminuer le travail des policiers. Mais cette pratique peut encourager de « faux accidents » et augmenter les coûts des compagnies d’assurances. Les assureurs ne voulant pas casquer, s’organisent.
Axel Pellegrin, secrétaire général de l’association des assureurs, n’étant pas disponible, vendredi dernier, nous avons approché un membre de l’association, Gawtam Basant Rai.
Ce ‘Claims Manager’ de Ceylincostella Insurance Ltd, membre de l’association des assureurs, accueille cette nouvelle loi. Il met quand même un bémol à sa joie. D’abord, il pense que cette mesure peut pousser certains conducteurs à déclarer « de faux accidents en s’arrangeant entre eux pour toucher les primes d’assurances ».
À titre d’exemple, il cite le cas d’un conducteur dont le véhicule a été légèrement endommagé, autre que dans un accident, et qu’il peut lui venir à l’esprit de faire passer cela pour un accident. «Quelles preuves pourions-nous fournir pour prouver le contraire, même si nous faisions l’expertise ? », dit Gawtam Basant Rai. Il craint qu’il y ait « plus de réclamations » de la part des clients des compagnies d’assurances.
Autre chose qui le chiffonne est qu’avec le principe du constat à l’amiable, toute la responsabilité de vérification des cas d’accidents mineurs reposera sur les compagnies d’assurances : « La police n’aura plus à s’occuper des cas mineurs d’accidents et ce sont les compagnies d’assurances qui devront désormais les prendre en charge. Cela va représenter un coût additionnel, car il va nous falloir avoir plus d’employés sur le terrain ».
Pour ce qui est de la définition des accidents mineurs, Gawtam Basant Rai dit que l’association des assureurs a demandé plus de détails, surtout en ce qui concerne des dommages qui peuvent paraître bénins vus de l’extérieur et qui, après examens en profondeur, il se peut qu’ils soient plus considérables et classés ‘total loss’.
Gawtam Basant Rai pense que les autorités devraient s’assurer que les motocyclistes qui ont des motocyclettes dont le HP est en-dessous de 50 cc et qui ne paient pas de déclaration soient forcés d’avoir une vignette d’assurances collée sur la moto. «Comme ça, on est sûrs que s’il y a un accident considéré comme mineur et que le motocycliste soit en tort, son assurance puisse indemniser l’autre partie impliquée», dit le ‘Claims Manager’ de Ceylincostella.
Give the devil his due
Pour le ministre Anil Baichoo, il se dit être très heureux que cette loi sera en vigueur à Maurice, comme en France et en Angleterre : « Le constat à l’amiable va aider à décongestionner les routes en cas d’accidents sans grande gravité et aidera la police à se concentrer sur autre chose et à ne pas perdre du temps pour les constats ».
Xavier-Luc Duval, qui avait initié le concept de constat à l’amiable quand il était le No 3 du gouvernement travailliste en août 2000, il explique que cette loi va aider la police, quitte à faire des mécontents du côté des assureurs. « Quand j’avais initié le projet, la réticence des compagnies d’assurances était terrible. Elles avaient peur des abus. Mais, avec le dialogue, on était arrivé à leur faire comprendre de la nécessité de ce concept qui a fait ses preuves ailleurs et qui aide à décongestionner les routes. Et le projet avait été approuvé par le Conseil des ministres dirigé par Navin Ramgoolam, sur ma proposition », dit le leader du Parti Mauricien Xavier Duval (PMXD).
Il explique qu’il avait dû batailler dur face à des assureurs qui ne voulaient pas faire le travail de la police : « Avant, la responsabilité revenait aux policiers de faire les constats pour le moindre petit accident. Les policiers travaillent gratuitement pour les assureurs. Ces derniers doivent désormais prendre leurs dispositions pour le faire. » Le député de l’Opposition déclare que la police, ici comme ailleurs, considère les accidents mineurs comme une affaire civile que deux parties règlent entre elles.
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Mode d’emploi pour conducteurs
Tout conducteur doit avoir dans son véhicule une craie jaune. En cas d’accident mineur, il s’explique avec l’autre conducteur s’ils sont d’accord pour un constat à l’amiable. En cas d’acceptation, ils doivent, à l’aide de la craie, tracer l’emplacement des deux véhicules au moment de l’accident avant de les déplacer. Puis, tous deux, munis de leur permis de conduire - qu’ils doivent impérativement avoir sur eux à partir du 1er août prochain - remplissent un formulaire, le ‘agreed statement of facts’, disponible bientôt chez les compagnies d’assurances. Ce ‘statement’ doit être bien visible dans tout véhicule.
Sur ce formulaire, toutes les informations requises doivent y être inscrites concernant les dégâts causés, la couleur des véhicules, l’adresse et les noms, l’heure de l’accident et un croquis montrant la position des deux véhicules impliqués. Cette opération ne détermine en aucune façon la responsabilité. Ce formulaire doit alors parvenir aux deux compagnies d’assurances dans un délai de cinq jours et l’indemnisation suivra dans un délai de 21 jours. Si dans le cas où l’un des conducteurs n’est pas d’accord pour un constat à l’amiable, il peut avoir recours à la police.
Le constat à l’amiable n’est pas valable pour les accidents où il y a des blessés ou que l’un des conducteurs est sous l’effet de l’alcool. Il n’est pas aussi applicable pour des véhicules de l’État.