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“Les Verts/OF doivent aller seuls aux prochaines élections”

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Le président des Verts/OF, Élie Michel, tient des propos contradictoires en disant être persuadé que le gouvernement respectera ses engagements envers son parti tout en avouant ses doutes si ces engagements seront finalement respectés avant la fin du présent mandat. Il laisse entendre que les Verts/OF doivent briguer les prochaines élections seuls.

Q : Pourquoi les Verts/OF ont-ils boudé la plateforme de l’alliance MSM/MMM pour tenir leur rassemblement du 1er Mai à Mahébourg?

R : En 2000, cette alliance nous avait promis qu’elle allait respecter les six points soumis par notre parti et, en 2004, on constate que la plupart de ces points n’ont pas été respectés. On a décidé de faire bande à part et je tiens ici à signaler que nous avions eu une foule équivalente à celle de l’alliance MSM/MMM à Rose-Hill. Nos sympathisants sont venus de leur plein gré et ont payé les frais de transport, pas comme certains à Rose-Hill à qui on a offert bus et repas gratuits pour qu’ils viennent.

Q : Quels sont les six points des Verts/OF?

R : L’introduction de la langue créole à l’école, la vente des maisons de cité à un prix forfaitaire, le congé du 1er février, le recrutement au niveau de la PSC, la compensation aux descendants d’esclaves et les informations en créole.

Q : Combien de ces six points ont-ils été respectés?

R : Que deux points : le congé pour la commémoration de l’abolition de l’esclavage et les informations en créole qui sont passées de midi à 19h00. Quant au reste, le gouvernement tergiverse trop et les Verts ne peuvent accepter cela.

Q : D’où la décision de réunir vos troupes à Mahébourg et non à Rose-Hill ?

R : Des dirigeants de notre parti avaient eu une rencontre avec neuf ministres du gouvernement le lundi de Pâques et ils nous ont demandé d’être à Rose-Hill. Mais on leur a fait comprendre que c’était notre comité qui décidait. Et vous connaissez la décision. Lors de cette même réunion, les discussions ont porté sur des points qui avaient été négligés volontairement. Le Premier ministre nous a dit qu’il n’avait pas encore soulevé la question au niveau de son comité; Pravind Jugnauth a, lui, dit qu’il n’avait pas eu de temps non plus.

Q : Qui de Bérenger ou de Pravind Jugnauth est à blâmer ?

R : En août 2000, les Verts/OF ont conclu un accord avec le MSM, en présence de sir Anerood Jugnauth, son fils Pravind et Joe Lesjongard. Ensuite, il y a eu l’accord Med Point. Je blâme davantage Pravind Jugnauth pour ce qui nous arrive, car au moment de l’accord entre le MSM et les Verts/OF, Paul Bérenger n’était pas là. Pourquoi le MSM a-t-il respecté son accord avec le MMM et pas avec les Verts/OF? Est-ce parce qu’on est un petit parti que le leader du MSM se contente des deux tickets et du ministère qu’on nous a offerts et se lave ensuite les mains ? Qu’en est-il de notre programme, M. Pravind Jugnauth? J’ai l’impression que le leader du MSM nous laisse entre les mains du MMM et que les deux leaders nous roulent dans la farine.

Q : Avez-vous un regret de vous être joint à l’alliance MSM/MMM?

R : Personnellement, je ne voulais pas entrer en alliance avec le MSM/MMM. Mais le comité du parti en avait alors décidé autrement. Pour moi, les Verts/OF devaient aller seuls aux élections en 2000.

Q : La position de Sylvio Michel, votre frère, est ambiguë. Il vote contre la loi sur les OGM, il boude le meeting du 1er Mai de l’alliance MSM/MMM, il prend un congé sabbatique et ne manque pas de critiquer le gouvernement. En même temps, il reste accroché à son fauteuil ministériel. Expliquez-nous.

R : Sylvio Michel demeure au gouvernement pour faire respecter l’accord que le MSM a conclu avec les Verts/OF en août 2000.

- La fin du mandat du gouvernement arrive dans une année et demie et il reste beaucoup de points de désaccord entre les Verts et le gouvernement. On a l’impression que vous vous êtes fait avoir.

R : La lutte est difficile, je le reconnais. On reste avec le gouvernement qui doit prendre ses responsabilités à notre égard. Soit l’alliance MSM/MMM applique notre programme, soit ses dirigeants prennent une décision sur les Verts/OF. Si Sylvio Michel est révoqué, c’est toute la famille des Verts qui est mise à la porte. On va forcer le gouvernement à respecter son accord avec nous et je suis persuadé que nous allons réussir. À la fin du mois, on va prendre une décision sur la question, car il faut un partage équitable pour chaque communauté. D’un côté, on voit que dans une famille, les parents travaillent dans les services gouvernementaux et les enfants aussi sont bien placés. De l’autre, il y a les descendants d’esclaves qui sont frappés par le chômage. Est-ce cela la justice sociale ? Il y a une discrimination envers les descendants d’esclaves. Un historien a récemment dit que nous sommes des paresseux. C’est du préjugé de la part de certains.

Q : Est-ce que les Verts/OF vont vers une logique de cassure ?

R : Si le comité de notre parti décide, à la fin du mois, que Sylvio Michel doit quitter le gouvernement, il devra le faire. Le comité avait décidé que Sylvio Michel devrait être avec nous à Mahébourg et non à Rose-Hill et il l’a fait. Mais, pour le moment, on reste au gouvernement.

Q : Qu’en sera-t-il pour les législatives 2005 ?

R : Personnellement, je pense que les Verts/OF ne pourront pas soutenir l’alliance MSM/MMM aux prochaines élections. Si l’alliance au pouvoir n’a pu respecter son accord avec nous durant cinq ans, va-t-il le faire après 2005 ?

Q : Quel bloc politique soutiendriez-vous alors ?

R : Je n’ai plus confiance en aucune formation politique. Les Verts/OF doivent aller seuls aux prochaines élections. Qu’importe la configuration politique en 2005.

Q : On dit que vous avez une grande influence sur votre frère. Est-ce vrai ?

R : Sylvio et moi sommes souvent en désaccord sur plusieurs points, il est vrai. Mais on est complémentaires, du fait qu’on luttera jusqu’à ce qu’on obtienne ce que nous voulons.

- Parlez-nous de votre combat pour une compensation aux descendants d’esclaves.

R : Nous menons ce combat depuis plus de 36 ans pour obtenir réparation pour les descendants d’esclaves. Depuis l’indépendance de Maurice, la plupart des descendants d’esclaves sont dans une piteuse situation. Les prisons sont remplies à 90 % par ces gens-là, à tel point que le gouvernement songe à construire d’autres prisons. Pour qui ? Pour les descendants d’esclaves qui sont forcés de voler afin de survivre, forcés de vendre de la drogue, de voler des fruits pour faire vivre la maisonnée. La violence a pignon sur rue. Lorsque les esclaves avaient été libérés, le gouvernement britannique leur avait offert, à chacun d’eux, une forte somme pour qu’ils puissent construire une maison et refaire leur vie. Cet argent n’est jamais parvenu à ces esclaves. On a donné au gouvernement une copie de la liste de tous ceux qui ont bénéficié de cette compensation à la place des esclaves.

Q : Où est passé l’argent et comment le récupérer?

R : L’argent des esclaves a été pris par les gros capitalistes de notre pays. Le jour où l’esclavagisme sera reconnu comme un crime contre l’humanité dans nos textes de loi, les Verts/OF pourront alors réclamer légalement que ces gros capitalistes rendent cet argent aux descendants d’esclaves.

Q : Est-ce à dire que les Verts/OF comptent poursuivre les descendants de ces gros capitalistes d’alors?

R : Les enfants des gros capitalistes, qui sont des milliardaires aujourd’hui, sont toujours en vie. (ndlr : il cite des noms de grandes familles de la communauté blanche). Ces capitalistes se sont enrichis sur le dos des esclaves. Ils sont devenus de gros capitalistes grâce à l’argent des esclaves qu’ils ont libérés sans les encadrer. Ils ont commis un crime, ils doivent payer. Zour ti libère esclaves, ène tante ration pas ti donne zotte. Je constate, heureusement, que le gouvernement a décidé que la Montagne du Morne soit reconnue comme patrimoine national et que le projet de l’Integrated Resorts Scheme (IRS) a été abandonné. Ma joie est d’autant plus grande par le fait que les gros capitalistes ne pourront faire de l’argent sur le dos des descendants d’esclaves, comme leurs grands-parents capitalistes l’ont fait avec les esclaves. C’est pour cela que je suis confiant que le gouvernement va reconnaître dans nos textes de loi l’esclavagisme comme crime contre l’humanité. Cette injustice, cette discrimination et cette domination exercée sur les descendants d’esclaves doivent être réparées. Après cela, je pourrai tranquillement fermer les yeux.

Q : Quel est votre sentiment sur Paul Bérenger en tant que Premier ministre ?

R : Paul Bérenger est prisonnier de lobbies. Pour construire une nation mauricienne, il doit être ferme et ne pas se laisser piéger par ces groupuscules.

jc.dedans@5plusltd.com

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