Emmanuel Leung Shing et Ivan Collendavelloo
D’une pierre deux coups. Un : le MSM force le MMM à accepter sa formule de proportionnelle. Deux : cette formule pourra supprimer le système de députés correctifs.
Même si c’est aux forceps que le MSM a fait accoucher sa formule, il demeure que celle de Collendavelloo est passée à la trappe. Le consensus, dit-on, a été le maître mot entre les dirigeants de l’alliance au pouvoir.
Le MSM, toutefois, a la victoire modeste. “Ce n’est pas une formule du MSM, mais celle du gouvernement qui prend en considération l’intérêt supérieur du pays ”, dit d’emblée Emmanuel Leung Shing. Il est celui qui avait proposé, au comité d’élite sur la réforme électorale présidé par Ivan Collendavelloo, la formule d’un maximum de douze meilleurs perdants sur les vingt circonscriptions, alors que Collendavelloo avait proposé, suivant les recommandations de Sachs, une ‘party list’ de 30.
La formule MSM ? “Très simple et directe et qui prend en compte les craintes qu’un parti qui rafle une majorité confortable de sièges ne laisse aucune chance à l’Opposition”, avance le ministre MSM de la Justice. Ce qui est loin d’être l’avis d’Ivan Collendavelloo : “Le modèle proposé maintenant se rapproche de celui qu’Albie Sachs avait rejeté”. Comment ? “Il porte le germe de dangereuses possibilités d’instabilité avant, pendant et après les élections ”, renchérit le parlementaire mauve.
De l’eau dans le vin d’Ivan
Même son de cloche de la part d’Arvin Boolell qui dit, dans l’interview en page 8, qu’il faut prévoir une guerre entre les candidats du MSM et ceux du MMM dans les circonscriptions rurales pour se placer en quatrième position. “Où est la loyauté envers le parti?” se demande-t-il. Pour lui, c’est un véritable “cadeau empoisonné du MMM au MSM”.
Emmanuel Leung Shing croit sincèrement que la formule qui sera adoptée comporte plusieurs avantages, et non des moindres. Il prend pour preuve les résultats des six dernières législatives : “Entre 1982 et 2000, des leaders politiques sont tombés. Avec la formule proposée, même s’ils mordent la poussière, ils sont assurés d’être repêchés s’ils se placent à la quatrième place avec un bon pourcentage de votes”. Le ministre avance également qu’un nombre considérable de femmes est prévu sur les meilleurs perdants et que le risque d’une déstabilisation de la majorité est “si ce n’est inexistant, presque inexistant”.
Ivan Collendavelloo est convaincu que la formule recommandée par Sachs et soumise au gouvernement à travers son rapport est la meilleure. Il est prêt à mettre de l’eau dans son vin en proposant de permettre “aux partis politiques de mettre sur la ‘party list’ des personnes qui sont déjà candidates au niveau de leur circonscription”.
Est-ce que cette formule sera à l’avantage du MMM qui, avec une assise dans les régions rurales, peut espérer placer quelques-uns de ses candidats en bonne quatrième place ? “Que ceux qui avancent cette thèse jettent un coup d’oeil sur les résultats des dernières législatives des ‘most unsuccessful unreturned candidates’”, dit Emmanuel Lueung Shing, alors qu’Ivan Collendavelloo est tout en nuance en déclarant que “la formule proposée aurait certainement avantagé le Parti travailliste lors des législatives de septembre 2000”.
Le ‘Best Loser’ supprimé
À bien voir, tous ceux qui sont tombés durant les élections de 1982 (SSR, sir Satcam Boolell, Boolauck, Beeharry, tous du PTr) auraient été repêchés par la formule d’un maximum de douze meilleurs quatrièmes, alors qu’ils ne l’ont pas été avec le ‘Best Loser System’. Il en fut de même en 1983 . Bhorra, Peertum, Sylvio Michel, Candahoo, Nandally, Kamil Ramoly (MSM/PTr) et Paul Bérenger, Minerve, Jawaheer, Alan Ganoo, Siram Sakaram et Swaley Kasenally (MMM) auraient tous fait leur entrée à l’Assemblée nationale avec la nouvelle formule. Le repêchage aux législatives de septembre 2000 aurait bénéficié à Motee Ramdass, Ravi Yerrigadoo, Seeburn, Villa Seenyen, Ahmad Jeewah et Anwar Oomar (MSM/MMM) et James Burty David, Rama Sithanen, Ghurburrun, Xavier-Luc Duval, Vasant Bunwaree et Raj Dayal (PTr/PMXD).
De ces douze candidats repêchés, on constate qu’il y a un brassage ethnique automatique qui respecte la majorité comme les minorités. Comment ? Parce que les candidats des divers partis politiques sont choisis selon des critères ethno-castéistes précis et c’est l’Opposition qui en bénéficie le plus.
Donc, la formule de la proportionnelle du MSM apporte l’équilibre tant sur la représentativité que sur l’ethnicité. De facto, le ‘Best Loser System’ n’a plus sa raison d’être. D’où le deuxième coup du MSM, porté, il est vrai, sans le vouloir.