La fièvre électorale fait monter la température tout en baissant drastiquement le niveau des débats. Comme d’habitude, la «réalité» mauricienne nous entraîne dans une spirale de déclarations fracassantes, de menaces, d’attaques, de critiques gratuites sur les adversaires du jour, quand les discours ne deviennent pas pathétiques, surréalistes et dépassent l’entendement.
À tout seigneur tout honneur, c’est le Premier ministre lui-même qui a créé la surprise, samedi dernier, quand il a été approché par des journalistes. Ainsi, a dit le Premier ministre : «Dans zafer Bangaleea zotte dire ki mo dimoune sa. Mais si ti mo dimoune sa, dans sept application pu gagne state land ene au moins li ti pou gagner si li ti mo dimoune.» En clair, devenez les «dimoune» du Premier ministre et choisissez vos terrains. On comprend mieux la rapidité avec laquelle certains démissionnent, intègrent le Parti travailliste en n’oubliant pas de louer le Premier ministre dès qu’un micro se présente…
En parlant de micro, s’il y a une autre déclaration à retenir dans le courant de la semaine, c’est bien celle de Nita Deerpalsing. Pour justifier l’injustifiable décision de l’IBA d’interdire les émissions politiques, à deux semaines des élections municipales, voilà que la députée rouge, celle qui pourtant est une habituée des plateaux radiophoniques, celle qui ne se fait pas prier pour critiquer l’opposition à tout bout de champ, sur toutes les ondes libres confondues, (oui, oui, Nita Deerpalsing peut s’exprimer, mais pas les auditeurs) celle qui d’un côté fustige le niveau de débat des politiciens mauriciens et qui de l’autre s’illustre par ses propos, a décidé de s’en prendre à l’intégrité des radios en estimant que «bann radio faire match arranzé». Donc, selon cette élue rouge, si les auditeurs critiquent le gouvernement lors des émissions radiophoniques, c’est parce que les radios seraient de mèche avec l’opposition. Que n’invente-t-on pas pour censurer la liberté d’expression ? La propagande de la MBC ne suffit plus…
Il n’y a pas que dans le camp du gouvernement qu’on nous gratifie des déclarations fracassantes. Le leader de l’opposition est lui aussi passé maître dans l’art des allégations. Lors d’un meeting à Vacoas, jeudi dernier, il a une fois de plus déclaré qu’il détient des informations sur l’important réseau de drogue qui tient en haleine le pays depuis bientôt quatre mois. «Gro Derek capav gro mais enn ti poisson sa… (..) Mwa mo kone ki sannla zot finn koze lor telephone, ki politicien, ki minis ek ki depité ! » Pour une révélation, faut dire que c’en est une ! L’affaire est sérieuse car le leader de l’opposition est en train de nous dire qu’au moins un ministre et un député sont impliqués dans un réseau de drogue. Interrogation légitime : si Paul Bérenger sait «ki sann la zot fine koz lor telephone, ki politicien, ki minis ek ki dépité» pourquoi ne se rend-il pas à la police ou ne fait-il pas appel aux instances appropriées pour faire ses dénonciations ?
Des dénonciations qui nous ramènent à Cehl Meeah. Au-delà de l’épisode «je vais balancer un ministre, j’ai des preuves, je donne un ultimatum au PM, Ramgoolam voilà les initiales sur un petit bout de papier, tu ne comprends pas, j’écris le nom complet, et puis merde, je ne dénonce plus finalement, je réclame une commission d’enquête et blablabla», le leader du FSM s’est comme trompé de pays cette semaine en annonçant que les femmes n’ont pas leur place en politique. Déclaration condamnable d’un élu de la République qui s’appuie sur ses convictions religieuses pour estimer que cinquante-deux pour cent de la population de Maurice n’a pas son mot à dire dans les affaires du pays. À la maison oui, à l’Assemblée nationale non ! Alors que les Mauriciennes militent depuis de longues années pour que le gouvernement respecte ses engagements pour une meilleure représentativité féminine en politique d’autant que Maurice est signataire des conventions pour l’élimination des discriminations à l’égard des femmes, voilà qu’un député payé des fonds publics s’insurge contre le fait que la nouvelle loi des collectivités locales permet à 30 % de femmes de se jeter dans l’arène politique. Quelle insulte !