Le leader de l’Opposition, Navin Ramgoolam, en compagnie du nouveau député Rajesh Jeetah
Le Premier ministre, à travers son ministre des Administrations régionales, a agréé, mardi dernier à l’Assemblée nationale, à la demande de l’Opposition et a nommé une commission d’enquête sur les contrats alloués pour le centre d’enfouissement de Mare Chicose. C’est l’ex-juge Robert Ahnee qui présidera cette commission dont les travaux se dérouleront en public.
Est-ce un piège, se demandaient des parlementaires, vu la facilité avec laquelle Paul Bérenger a accepté la proposition travailliste pour faire la lumière sur le récent appel d’offres et l’exécution des travaux à Mare Chicose, au coût de presque Rs 1 milliard, qui devait revenir à la compagnie STAM, “une filiale d’IBL”, selon Madan Dulloo. Dans une déclaration officielle, le PM indique que le président de la commission d’enquête épluchera ce dossier concernant les ordures à être enfouies, et ce, depuis l’allocation du tout premier contrat. Soit en 1997, sous le régime travailliste.
En fait, la genèse de cette commission d’enquête est la Private Notice Question (PNQ) adressée au tout nouveau ministre des Administrations régionales, Auromuga Putten. L’Opposition voulait savoir le montant payé à ce jour à la compagnie qui gère ce centre d’enfouissement depuis que le contrat est arrivé à expiration en septembre dernier et, surtout, si le ministère a fait des recommandations au Central Tender Board (CTB), chose qui n’est pas permise.
Première PNQ pour un nouveau ministre
Dans une réponse kilométrique, avec force détails techniques et chiffres à l’appui, le nouveau ministre à la barre des Collectivités locales a fait savoir à la Chambre que le premier contrat de six ans avec la firme STAM fut signé sous le règne travailliste, soit en 1997. À l’expiration de ce contrat, en septembre 2003, le gouvernement MSM/MMM décida de le prolonger sur une base mensuelle, avec la même entreprise, le temps que soient finalisées les nouvelles procédures pour un nouvel appel d’offres international. “Le montant payé à STAM entre septembre et décembre 2003 s’élève à Rs 29 millions, soit une moyenne de Rs 8,4 millions par mois; ceci fut approuvé par le CTB”, a dit Auromuga Putten. Toutefois, le ministre précise qu’il existait une “ambiguïté” dans les documents relatifs à l’appel d’offres au sujet de l’inclusion ou non d’une ‘power generation’ du fait qu’il était stipulé qu’une étude de faisabilité devrait être commanditée par la compagnie qui obtiendrait le contrat, “alors qu’une telle étude doit être faite au préalable”. D’où la décision du gouvernement d’annuler cet appel d’offres et le choix porté sur STAM pour de nouvelles procédures. Et c’est sur cette “ambiguïté” et des accusations de pot-de-vin et de malversations que s’est appuyé Navin Ramgoolam pour réclamer une commission d’enquête. Contre toute attente, le PM a acquiescé à son voeu et, dans l’après-midi, annonçait la nouvelle.
La séance de la PNQ a été très mouvementée; en effet, certaines remarques et accusations fusaient de part et d’autre. En revanche, la demi-heure consacrée aux questions adressées au Premier ministre a été plutôt calme. Paul Bérenger, sans s’énerver devant les interrogations de Xavier-Luc Duval sur les brutalités policières, a invité “le public à s’adresser à la Commission des droits de l’homme avant de rapporter l’affaire à la police”.
“I, Rajeshwar Jeetah...”
Il est 11h25. Flanqué de Navin Ramgoolam et des élus de l’Opposition, Rajesh Jeetah, droit comme un I et portant un complet noir sur une chemise blanche et une cravate aux couleurs de son parti, pénètre dans l’hémicycle et se dirige vers la galerie des VIP aux côtés de toute la famille venue en nombre. Papa et maman sont là, également son épouse, Jhotee, drapée dans un beau sari rose. 11h31 : il est appelé pour prêter serment. À cet instant solennel, une flopée de photographes se ruent vers lui, alors que les membres de l’Opposition l’applaudissent. “I, Rajeshwar Jeetah, solemnly affirm...” Applaudissements de l’Opposition et du ‘Front Bench’ gouvernemental. Quelques commentaires piquants sur le dernier sondage accompagnent cette prestation, dont celui du Dr Maudarbocus : “Ki été sa ? Sondage ?” Ce à quoi lui rétorque James Burty David : “Nou sondage pas Synthèse, li appelle Jeetah. Baté bef”. Après quoi le nouveau député rouge a gagné sa place aux côtés du Dr Hookoom. Puis, le PM a proposé la nomination de Dharmaveersing Roopun au poste de ‘Deputy Speaker’ en remplacement d’Auromuga Putten, devenu ministre des Collectivités locales.
OGM : l’intervention de l’OF attendue
L’Opposition s’est demandé si les deux élus de l’Organisation Fraternelle (OF) faisant partie du gouvernement maintiendront leur opposition à l’introduction et à la production des organismes génétiquement modifiés (OGM) à Maurice. Sylvio Michel et Jean-Claude Armance de l’OF interviendront mardi prochain.
Arvin Boolell et James Burty David ont critiqué l’empressement avec lequel le gouvernement introduit ce projet de loi présenté par Nando Bodha. Pour eux, c’est un sujet très controversé de par le monde, du fait que l’on ne sait pas encore les effets des OGM sur l’homme. “Les multinationales s’empressent d’inonder le marché mondial de ces produits, alors que Maurice ne possède pas d’équipements adéquats pour contrôler la présence des gènes modifiés dans les produits de consommation. Quels intérêts ce gouvernement sert-il ?” s’est demandé avec force Arvin Boolell. Il a fait un appel à l’OF/Les Verts : “Je fais un appel aux élus de l’OF. J’espère que vous allez défendre vos valeurs lorsque vous allez intervenir”. Quant à James Burty David, il s’est dit pour tout développement scientifique qui fait avancer le monde, mais se refuse à cautionner un projet de loi sur les OGM “en l’absence de preuves qu’ils ne sont pas nuisibles à la santé. Il faut renvoyer ce projet de loi et ne prendre aucun vote”. Il a aussi lancé un appel aux Verts de Sylvio Michel : “Je crois que le ministre Michel va maintenir sa position sur la question”.
Comme il fallait s’y attendre, le ministre Rajesh Bhagwan et le député de la majorité, Sunil Dowarkasing, ont soutenu l’introduction du projet de loi concernant les OGM même s’ils ont tous deux déclaré “qu’il faut procéder avec précaution” étant donné que les risques pour la santé “ne peuvent être sous-estimés”. D’où la décision du gouvernement, disent-ils, de venir avec une loi cadre pour l’établissement des paramètres et la prise des mesures adéquates.