Roseline Ramen, receveuse à la CNT depuis six mois
Libres de leurs mouvements, libres dans leurs têtes, ces femmes professionnelles sont de tous les métiers. 24 heures dans une journée ne leur suffisent plus. En marge de la Journée internationale de la femme demain, 8 mars, nous avons rencontré quelques-unes de ces boute-en-train. Elles nous racontent leur vie de femme active dans un monde d’hommes.
Pour Daniella Volfrin, mère de deux fillettes, receveuse de la compagnie Triolet Bus Service (TBS), le métier de receveuse est un vrai défi. Elle doit se reveiller chaque matin à 04h00 pour préparer sa journée: “Quand je travaille le matin, je n’ai pas le temps de faire autre chose que de me préparer et préparer le repas de mes enfants.” Mais toutefois, vivant seule avec ses filles, elle nous dit qu’elle s’est habituée à cette vie. Elle est affectée sur la ligne 51 (Pte-aux-Sables/P.Louis), connue pour être une desserte difficile, surtout à la nuit tombée. Mais elle commande le respect, de par sa gentillesse, distributeur de tickets au cou et le sac-banane accroché aux reins.
Quant à Roseline Ramen, receveuse chez CNT sur la ligne 51 (Petite Rivière/P.Louis), elle est également âgée de 33 ans et mère de trois enfants. Elle a le soutien de son mari:”Heureusement que mon mari m’aide; les jours où je dois me réveiller tôt, je lui confie les enfants”. Pour les deux femmes, commencer ce métier a été réellement une rude épreuve. Elles ont dû lutter non seulement contre les maux de pied et la nausée mais aussi contre leur timidité pour se faire accepter par beaucoup de passagers pas toujours commodes.
Concilier progression et vie familiale
Jane Ragoo est, quant à elle, syndicaliste. Concilier profession et vie familiale et sociale est pour elle une question d’organisation. Étant la mère d’un garçon de 13 ans et d’une fillette de 6 ans, elle a le soutien de son mari: ‘Si je rentre à la maison la première, c’est moi qui fais le repas et c’est mon mari qui fait la vaisselle, sinon c’est vice-versa.” Après trois ans dans le syndicalisme, elle affirme que cela a été dur de se faire accepter parce qu’elle est une femme : “Les gens prennent du temps avant de vous faire confiance quand vous êtes une femme mais heureusement que j’ai eu le soutien de mes collègues, dont Jack Bizlall et Reaz Chuttoo. Haneessa M, âgée de 59 ans est, elle, ouvrière dans le secteur textile depuis plus de quarante ans.”Du temps où mes enfants étaient petits, je devais chaque jour me réveiller très tôt pour préparer leurs repas. La vie était dure car je devais m’occuper à la fois de mes quatre enfants; un retard à l’usine signifiait une journée de réprimande”. À cette époque, son mari travaillait comme cordonnier.”Des fois, nous dit-elle, mes enfants restaient plusieurs jours sans me voir puisque je partais travailler avant qu’ils ne se fussent réveillés et je retournais lorsqu’ils étaient déjà endormis”.
Prendre sa place dans le monde professionnel
Françoise Labelle, députée de la criconscription No 20 depuis septembre 2000, avoue pour sa part que ses fonctions prennent la majeure partie de son temps. “Je commence ma journée très tôt et je suis ‘on call’ 24h sur 24 pour mes mandants”, raconte-t-elle. Pour Françoise Labelle, être député dans un monde politique dominé par les hommes ne pose pas vraiment de problème : “Je n’ai pas encore vécu de difficultés que mes collègues hommes ont vécues. Au contraire, je trouve que la population mauricienne est très respectueuse des femmes députés et c’est un avantage”. La députée déplore le fait qu’il n’y a pas assez de femmes à l’Assemblée nationale mais est confiante que cela va changer à l’avenir. Françoise Labelle essaie aussi d’accorder un maximum de temps à ses deux enfants. “Heureusement que la femme a la faculté d’assumer plusieurs fonctions à la fois”. Toutefois, elle confie les tâches ménagères à une employée de maison.
Une autre femme super active est Aline Wong, directrice de l’usine l’Inattendu, membre du Conseil d’administration de l’Industrial Vocational and Training Board, directrice du Board de la ‘School of Design’, chargée de programme pour les femmes entrepreneuses pour l’Afrique, entre autres. Aline Wong estime aussi que la femme a tout à fait sa place dans le monde des chefs d’entreprise et au sein des Conseils d’administration où elles ne sont pas nombreuses. “Ce serait plus représentatif de la réalité d’autant plus que quand les hommes et les femmes travaillent ensemble, ils arrivent à un résultat plus objectif et plus juste”, déclare-t-elle. Aline Wong dit se donner à fond dans son travail où elle a à abattre une somme de travail considérable. “Je m’organise aussi pour passer du temps avec mes deux enfants et mon époux, pour faire du sport car ma forme est très importante, et pour voyager. Il faut être très rigoureux pour arriver à tout faire et je privilégie un temps qualitatif”, déclare-t-elle.
Michaëlla Coosnapen
Jessica Isou
Arianne Navarre-Marie : “J’arrive à assumer mes multiples rôles grâce au soutien de ma famille”
Pour Arianne Navarre-Marie, il n’est pas tout le temps facile de concilier ses fonctions de ministre des Droits de la femme avec son rôle de mère et d’épouse. Elle arrive quand même à le faire grâce au soutien “indéfectible” de son époux et de ses enfants.
“Ces derniers sont probablement ceux qui souffrent le plus, vu que je ne passe pas beaucoup de temps avec eux”, dit Arianne Navarre-Marie, qui affirme avoir pris un engagement pour servir le pays et qu’elle n’est pas en droit de décevoir la population - ceux et celles qui lui ont accordé leur confiance. “De ce fait, même s’il y a des difficultés, je reste positive”. Par ailleurs, la ministre pense qu’être femme active comporte des exigences. “Je ne dirais que c’est chose facile; rien n’est facile si on veut bien faire mais avec la volonté de réussir, on a plus de chance de s’en sortir. De plus, il faut reconnaître qu’il est plus facile d’être une femme active aujourd’hui qu’il ne l’était, il y a quelques années de cela”, dit-elle.
Selon Arianne Navarre-Marie, la société reconnaît de plus en plus les compétences et les qualités que possèdent la femme et le fait qu’on prend de plus en plus en considération l’aspect ‘gender’ aide à rendre les choses plus faciles pour la gent féminine. “On a fait appel à la femme dans divers domaines et elles ont prouvé ce dont elles sont capables. La présence de la femme est toutefois minime dans le domaine de la science et de la technologie, d’où l’approche du ministère d’axer la conscientisation au rôle de la femme dans ce domaine pour encourager les femmes et les étudiantes à se tourner vers ces domaines”, déclare la ministre. Pour elle, la femme pourra s’émanciper davantage professionnellement si les conditions d’emplois prennent en compte les spécificités qui lui sont rattachées en tant que professionnelle. “Les employeurs doivent aussi penser à donner la possibilité aux femmes de démontrer leurs capacités. Il est important qu’il n’y ait aucune discrimination dans le monde du travail pour désavantager les femmes; il faut qu’elles puissent accéder à des postes de responsabilité”. La ministre pense aussi qu’il faut penser en termes de création de structures de soutien aux familles, telles que des crèches et des garderies.
MC