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“Je ne crois pas au ‘free vote’ sur une question aussi importante que la réforme électorale”

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Alors qu’au MSM, certains n’hésitent pas à rejeter le rapport Collendavelloo sur l’introduction d’une dose de proportionnelle dans notre système électoral, Me Ivan Collendavelloo, secrétaire général du MMM, et président du Select Committee sur l’introduction d’une dose de proportionnelle dans notre système électoral, estime que sur une question aussi importante que la réforme électorale, il ne croit pas en un “free vote” et parle de solidarité ministérielle.

Q : Résumez-nous votre rapport sur une dose de proportionnelle à être introduite dans notre système électoral.
R :
Avant de faire un résumé du rapport, il est important de situer le contexte qui a débouché sur ce rapport. Depuis des années, tous les partis politiques ont, à un moment ou à un autre, réclamé une réforme de notre système électoral. Mais il n’y a jamais eu d’unanimité. Depuis 1995, le Parti Travailliste et le MMM étaient plus ou moins sur la même longueur d’onde et, à l’époque de la Fédération, le MMM et le MSM avaient préparé ensemble un projet de réforme. Le MMM avait alors suggéré que tout parti recueillant plus de 10%de votes à une élection générale aurait droit à un ‘proportionally elected member’ pour chaque 5 % de votes recueillis.
Q : En clair ?
R :
Si un parti obtenait 25 % de votes, il aurait droit à 5 sièges au Parlement. Après les élections de 2000, le MSM et le MMM au gouvernement avaient nommé la Commission Sachs pour faire une étude approfondie du problème. Le gouvernement avait soumis cette proposition MMM devant Sachs. Cette proposition MMM était donc devenue une proposition gouvernementale. Devant la Commission, le VPM d’alors, Paul Bérenger, est venu clairement dire que cette proposition n’était qu’un début et que le gouvernement n’attachait pas une importance particulière à ce modèle proposé et le VPM se fit un devoir de préciser que le rôle de la Commission était de proposer un système ‘which would best compensate for the gross under-representation of Opposition parties produced by the present system, taking into account the realities of Mauritius and building on what had already been achieved’. En clair, la Commission ne devrait pas se sentir obligée par la proposition gouvernementale, puisque le gouvernement lui-même traitait cette proposition comme une simple illustration de son désir de progresser.
Q : La Commission Sachs devait donc trouver la formule idéale ?
R :
Quel est le problème avec le présent système ? Le Pr Kasenally, en 1983, n’a pu se faire élire en dépit de ses 47 % de votes, alors que Kamil Ramoly est arrivé à se faire élire avec 16 % de votes. Le MSM lui-même, en 1995, avec presque 20 % de votes, ne put faire élire son leader, sir Anerood Jugnauth,  alors que le PGD y est arrivé avec 6 %. Pire, le Hizbullah avec moins de 2 % de votes est arrivé à faire élire un député. Si quelqu’un de raisonnable voit que ce système est bon, c’est que la raison ne se trouve pas dans le camp des démocrates.
Q : En bref, la Commission Sachs propose quoi ?
R :
En gros, la Commission propose qu’on garde le système présent et les ‘Best Losers’. Mais pour apporter un peu plus de justice et de démocratie dans le système, les électeurs auront à voter pour le parti de leur choix qu’ils désirent voir au gouvernement à travers un deuxième bulletin. C’est sur la base de ces bulletins qu’on va compter le nombre de votes que chaque parti aura recueilli. Ensuite, on prend ces votes, on les divise par le nombre de députés que ce parti aura fait élire en ajoutant le chiffre 1, parce que 0 ne peut jamais diviser un chiffre, et on aura un résultat. Celui qui a un meilleur résultat obtient un siège additionnel. Pour le deuxième siège, on refait le même calcul, ainsi de suite jusqu’à ce qu’on arrive au chiffre 30.
Q : Ce chiffre 30 vient-il de Sachs?
R :
Le chiffre 30 vient de Sachs. Mais c’était un chiffre unanimement accepté, car le chiffre 20 menaçait la stablilité, car à 20 on corrige les représentations, mais on n’apporte pas de stabilité. Au-delà de 30, c’est l’inverse qui se produit.
Q : Vous dites que le chiffre 30 a été unanimement accepté, même par le MSM ?
R :
Il n’y a eu aucune note discordante à ce sujet. La preuve, c’est qu’après la publication du rapport, le gouvernement l’a soumis à l’Assemblée nationale. Des discussions ont eu  lieu et l’Assemblée nationale a nommé un Select Committee composé de neuf députés de tous bords afin d’examiner le rapport et de faire des recommandations sur les modalités. Cette motion fut votée à l’unanimité à l’Assemblée nationale. Le Select Committee n’était pas là comme une Cour d’appel pour juger si Sachs avait raison ou tort. C’était le voeu unanime de tous les députés, y compris ceux du MSM. Tous ceux qui avaient pris la parole lors des débats au Parlement avaient bien insisté là-dessus. Dès lors, il était hors de question que le Select Committee vienne avec une autre proposition. Le Select Committee avait à examiner les modalités, en d’autres termes, les détails et non l’essentiel.
Q : Concernant les simulations selon la formule préconisée par Sachs, aux élections législatives de 1987, le MSM/PTr/PMSD pouvait voir sa majorité de 18 sièges disparaître pour faire de la perdante, MMM/MTD, la gagnante. Est-ce normal, selon vous ?
R :
La raison est tellement simple : ceux qui érigent 1987 en exemple oublient que, pour ces élections, le PMSD se présentait séparément du MSM/PTR mais que ces trois partis avaient un simple arrangement électoral qui interdisait le MSM de se présenter là où le PMSD se présentait et vice-versa. C’est ainsi qu’un candidat travailliste se présentait sous la bannière du PMSD à Curepipe. Ce qui veut dire que le MSM donnait ses électeurs en cadeau au PMSD. Évidemment, le MSM/PTR récoltait moins de votes et était ‘overrepresented’. La même chose s’était produite en 1983 mais avec la différence que l’écart était tellement grand que l’effet n’aurait pu être ressenti. Le contexte de l’époque avait amené ces partis à décider ainsi. Le raisonnement est faussé sinon tordu.
Q : Pravind Jugnauth et beaucoup au sein du MSM, qui trouvent que votre rapport apporte un “germe d’instabilité”, sont contre le chiffre 30 proposé pour la proportionnelle et optent pour que ce nombre soit limité à 10. Vos commentaires ?
R :
Si ces propositions contiennent un germe d’instabilité, il ne fallait pas les voter. Proposer que le chiffre soit ramené à dix ne résiste pas à l’analyse. À dix, vous faussez le résultat encore plus.
Q : Les huit ‘Best Losers’ officiels sont aussi des perdants qui siègent pourtant au Parlement.
R :
Le système de ‘Best Losers’ a été instauré pour assurer une représentation communale. Le système qui est proposé par Leung Shing veut qu’on nomme les huit ‘Best Losers’ d’abord; les 30 meilleurs perdants rentrent au Parlement ensuite. Ces perdants vont venir complètement changer les proportions communales à l’Assemblée. Le système Sachs est clair : c’est après tout l’exercice de la proportionnelle qu’on vérifie la balance communale. S’il y a des communautés qui sont sous-représentées, c’est là que l’application des ‘Best Losers’ est considérée. Par contre, le système proposé par Emmanuel Leung Shing, qui est à l’Annexe B du rapport, vient dire de nommer huit ‘Best Losers’; ensuite on cherche les 30 meilleurs quatrièmes pour les faire entrer au Parlement.
Q : Ce système a le mérite de nommer des meilleurs perdants, sans tenir compte de leur appartenance religieuse et ethnique.
R :
Oui, ce système fait de la place pour des députés, indistinctement de leur appartenance religieuse et ethnique, mais pourquoi avoir nommé huit Best Losers avant alors ? Vous corrigez la ‘communal imbalance’ puis vous ajoutez la ‘communal imbalance’. Qu’est-ce qui arrive si ce sont 30 musulmans qui rentrent au Parlement avec ce système? Cela s’applique à 30 hindous ou à 30 créoles également.
Q : Êtes-vous personnellement contre le système de Best Losers ?
R :
Personnellement, je suis contre le ‘Best Losers’ System. S’il n’en tenait qu’à moi, j’abolirais ce système-là, mais je vis à Maurice et ce que je pense ne compte pas. J’obéis aux directives que j’ai reçues de l’Assemblée nationale, car je suis un démocrate solidaire de mes institutions.
Q : L’Attorney General, Emmanuel Leung Shing, membre du MSM, a qualifié votre rapport “d’Alice aux pays des Merveilles”. Vos commentaires ?
R :
Si on commence à aller chercher des titres de romans, je peux trouver au moins une dizaine d’autres titres pour qualifier les propositions Leung Shing. Vous voulez le ‘Wizard of Oz’ ou ‘Batman’ ?
Q : Quelle sera la position du MMM par rapport à l’inflexibilité du MSM concernant votre rapport ?
R :
Je ne suis pas très sûr qu’il y ait une inflexibilité. Je pense que le MSM fait preuve de grande flexibilité, puisqu’au Parlement, ce parti a voté pour ce système et aujourd’hui, nous entendons des voix qui parlent contre ce qu’elles ont voté elles-mêmes. Plus flexible que ça, tu meurs.
Q : Est-ce que la Muslim Personal Law et la proportionnelle ne constituent pas un gros macadam dans les relations entre le MSM et le MMM ?
R :
Ne mélangeons pas la MPL et la représentation proportionnelle. La MPL est un débat différent. La MPL n’a jamais fait l’unanimité à Maurice. La représentation proportionelle, telle que préconisée par Sachs, a fait l’unanimité. Si chacun va commencer à avoir des états d’âme, il ne fallait pas voter pour le rapport Sachs au départ. On ne peut pas un jour voter quelque chose et le lendemain se réveiller en disant qu’on a des états d’âme à Maurice. On a pris une position publique; même si on change d’opinion, on doit à la population le respect de maintenir ce qu’on a dit publiquement et officiellement.
Q : Avec du recul, peut-être que le MSM constate-t-il que ce que propose Sachs est au détriment de ce parti.
R :
Je ne vais pas faire de spéculations. Mais, en 1995, qui aurait bénéficié de ce système? Certes, pas le MMM ni le Parti travailliste. Vous voulez me dire quoi là : que certains députés n’avaient pas étudié le rapport avant de prendre la parole au Parlement et féliciter Sachs pour son travail ? Je ne peux croire en une pareille  chose.
Q : Au MSM encore, on dit que ce rapport est très ‘tailor-made’ pour le MMM.
R :
‘Tailor-made’ pour le MMM ? Pourquoi  n’avons -nous pas proposé le système MMM alors ? Au contraire, la proposition Leung Shing est ‘MMM created’. D’ailleurs, il y a certaines phrases de cette proposition qui sont copiées exactement du modèle MMM. Mais nous au MMM, nous avons pensé à cela avant 1993, nous avons évolué, nous avons étudié le rapport Sachs avant d’ouvrir notre grande bouche au Parlement pour dire que nous applaudissons Sachs. Le MSM avait également réfléchi comme nous. Qu’on ne vienne pas me dire que le rapport est ‘tailor-made’ pour le MMM quand Sachs a rejeté ce que le MMM proposait.
Q : Et si le projet de loi arrive au Parlement et le MSM est réticent à voter avec le MMM ?
R :
Moi, je ne fais pas de spéculations, on m’a demandé de faire un travail, je l’ai fait; maintenant, ce que les gens font de mon travail est une autre question. Le Premier ministre est le Premier ministre du pays. Ce sera au PM de décider et le Conseil des ministres aura à suivre les principes de base de notre démocratie, c’est-à-dire la solidarité ministérielle. Je ne crois pas au ‘free vote’ sur une question aussi importante que cela. On n’est pas en train de parler de la peine de mort où il y a une question de conscience. Nous parlons d’un système électoral où il faut avoir de la raison et non de l’émotion. Un ‘free vote’ voudra dire accepter que la réforme électorale soit quelque chose d’émotionnel.
Q : Le MSM est obligatoirement lié au MMM sur cette question ?
R :
Moi, je me base sur les ‘records’ du Parlement. Le MSM est lié par le MSM. Ce parti ayant adopté cette attitude d’une façon consistante, je ne peux m’imaginer que ces spéculations puissent être vraies. Il y a eu deux déclarations individuelles. Mais le MSM a pris un stand en  tant que parti et ce stand est officiellement ‘recorded in Parliament’.
Q : La ‘Party List’ ne favorise-t-elle pas les caciques et les béni-oui-oui d’un parti politique, comme le laissait entendre le ministre Emmanuel Leung Shing ?
R :
Excusez-moi si je ne comprends pas trop mon ami Leung Shing. Je fais de la politique depuis plus de 20 ans. Pourquoi venir dire que les caciques vont entrer au Parlement par la ‘Party List’ ? Ces listes seront publiées en avance, les électeurs verront qui sont ceux qui sont sur cette liste et, s’ils aiment ces gens, ils voteront pour la liste. C’est cela l’avantage de la ‘Party List’, ce sont les gagnants qui rentrent au Parlement et non les perdants.
Q : Pour que le ministre Leung Shing ait fait cette sortie, il a dû avoir l’aval de son leader, n’est-ce pas ?
R :
Je n’appelle pas cela une sortie, mais des états d’âme. Je n’ai pas l’intention de me bagarrer avec Emmanuel Leung Shing à travers les colonnes d’un journal. C’est un partenaire, il exprime son opinion et je dis ce que je pense de ses opinions.
Q : Quelle est votre position sur les politiciens qui tiennent des discours politiques sur des plateformes religieuses ?
R :
Je n’ai pas d’opinion sur ce sujet, car c’est un sujet extrêmement délicat qui relève de la foi d’un individu et de ceux qui l’invitent. À partir de là, on va parler de Mgr Piat à Bel Air et on va entrer dans des débats. Personnellement, je sais ce que je fais ou ne fais pas. Je sais ce que mes collègues font et ne font pas.
Q : La semaine prochaine, le MMM réunit son assemblée de délégués qui sera une réunion comme une autre avec les mêmes têtes, les mêmes résolutions. Pourtant, le MMM était à ses débuts un parti des idées. Que pense le secrétaire général que vous êtes de ce changement ?
R :
Je partage l’opinion qu’il n’y aura pas de révolution à cette assemblée de délégués. C’est une occasion de réunir la grande famille des militants qui seront appelés à exprimer leurs opinions sur la situation. Si la presse croit qu’il y aura de grands cyclones, elle se trompe. Cette assemblée se réunit pour la première fois avec Paul Bérenger comme Premier ministre.
Q : Les délégués avaliseront ce que décidera la direction, comme d’habitude.
R :
Pas du tout. Je n’ai jamais assisté à une assemblée de délégués qui a été un ‘one man show’. Au contraire, les opinions sont échangées et exprimées en toute liberté. Le MMM est un grand parti démocratique et c’est cela qui fait la différence.

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