Les membres de Women in Politics ont participé, jeudi dernier, à un forum sur les changements apportés à la Local Government Act. Megha Venketasamy, secrétaire de cette plate-forme, nous donne son avis sur ces amendements.
Comment accueillez-vous les modifications apportées à la législation pour assurer une grande représentativité des femmes aux élections ?
Je suis une citoyenne engagée à promouvoir la représentativité des femmes en politique. Ces amendements évoquent une avancée historique pour le pays et la région. Ce quota est gender neutral et bénéficiera aux hommes comme aux femmes. Il faut aussi savoir que le quota est un mécanisme essentiel pour que les portes de la politique s’ouvrent aux femmes. Il introduit une dynamique et bouleverse l’ordre établi. Il est également très important que ce changement commence par les élections régionales. Les Mauriciens sont tous concernés par la gestion d’une ville ou d’un village.
Nous avons vu que nous ne pouvions pas compter sur les partis politiques pour augmenter la représentativité des femmes en politique. Historiquement, les femmes en politique, à Maurice, font de redoutables activistes. Elles sont des maillons essentiels d’une campagne électorale réussie. Cependant, dès qu’il s’agit d’une candidature aux élections, elles sont écartées du pouvoir par les lobbys. Avec ces amendements, on vient dire que la politique ne doit pas être qu’une affaire d’hommes.
Croyez-vous qu’il y ait suffisamment de femmes pour répondre à cette attente ?
Oui ! Il faut d’abord compter toutes ces femmes qui sont membres des ailes féminines des partis politiques. C’est de là que devraient émerger, tout logiquement, les nouvelles candidates aux élections municipales et villageoises. De notre côté, Women in Politics (WIP) sillonne l’île depuis 2010 et propose une formation gratuite en Electoral Skills. L’objectif est de donner à ces femmes, des outils et la confiance nécessaires pour se lancer. Elles peuvent décider d’intégrer le parti de leur choix ou de monter leur propre parti. Et le response sur le terrain est incroyablement encourageant.
Les femmes de toutes les générations ont assisté à ces cours, de Quatre-Cocos à Flacq, en passant par Curepipe ou encore Port-Louis. À ce jour, WIP a formé plus de 500 femmes. Elles sont nombreuses à vouloir participer aux élections. Il faut aussi compter les femmes formées par d’autres organisations telles que MediaWatch-Gender Links. La question n’est donc pas de savoir s’il y aura suffisamment de femmes mais si les partis politiques donneront la chance aux femmes ? Résisteront-ils aux lobbys ?
Pensez-vous qu’il faudrait sanctionner les partis politiques qui ne respectent pas cette disposition de la loi ?
Non. Parler de sanction, c’est chercher une échappatoire. C’est une manœuvre de contournement. La loi est claire. Les partis politiques, grands ou petits, doivent enfin accepter une chose : leur liste devra comporter un minimum de 30 % de femmes ou 30 % d’hommes. Si ce n’est pas le cas, leur liste sera rejetée. Si vous n’êtes pas un citoyen mauricien, vous ne pouvez pas vous présenter aux élections à Maurice. Un point, c’est tout. Vous n’êtes pas sanctionné ! Si des sanctions sont introduites, cela donnera aux partis la possibilité de présenter des listes d’hommes seulement et de rejeter, une fois de plus, la candidature des femmes. C’est le cas dans de nombreux pays où les partis préfèrent payer des amendes plutôt que de chercher des candidates.
La France prône un quota de 50 % mais la majorité des grands partis préfère payer des amendes parce qu’ils en ont les moyens. Nous devrons, par ailleurs, aspirer à faire comme la Belgique, qui rejette de facto une liste non respectueuse du quota, ou l’Espagne, qui accorde aux partis un délai afin de présenter une liste amendée, respectant le quota requis. Nous aurions préféré que les partis politiques locaux présentent leurs listes de candidats et de candidates, ainsi que leurs visions et leurs projets pour nos villes et villages, au lieu de se concentrer sur les sanctions.