Gilbert Ducasse
Le monde observe, mardi prochain, la Journée internationale de la langue maternelle. L’occasion de donner la parole à un instituteur qui enseigne, depuis janvier, le kreol moricien à des tout-petits.
Il nous parle de ce projet.
Depuis janvier, un peu plus de 3 000 enfants de Std 1 étudient le kreol moricien. Comment est-ce que cela se passe pour vous qui enseignez cette matière ?
Le projet a démarré à une vitesse satisfaisante. Pour ma part, je travaille dans trois écoles : St-François-Xavier à la route Nicolay, Notre-Dame-de-Lorette à la rue Edgar-Laurent et à l’école Bon-Secours à la rue Edith-Cavell. Depuis le début des cours, les choses se passent très bien. Les enseignants disposent de plusieurs outils pédagogiques, notamment le kaye zelev édité par le Mauritius Institute of Education, et le response des enfants est encourageant. J’ai noté l’enthousiasme des élèves en classe et constaté qu’ils se sentent plus à l’aise et plus libres pour s’exprimer. Au cours de ma carrière de prof, j’ai pu me rendre compte que dans bien des cas, des élèves étaient bloqués par la barrière du langage. Souvent, ils avaient la réponse à une question mais ils ne pouvaient pas s’exprimer. Depuis le début des cours, l’engouement de ces petits pour les classes, de même que l’intérêt des parents pour le projet, est palpable. Maintenant, le programme va faire son chemin. Au fur et à mesure, nous allons introduire d’autres aspects de la langue comme, par exemple, l’étude de la grammaire.
Comment se déroulent les cours dans la pratique ?
Les classes de kreol moricien ont lieu au même moment que les cours de langues orientales. On enseigne l’apprentissage d’une langue, en l’occurrence la langue maternelle. L’objectif de l’enseignement du kreol moricien est avant tout d’aider les enfants à communiquer, mais aussi à s’épanouir, à s’ouvrir aux autres, à développer leurs facultés intellectuelles et à se développer socialement et psychologiquement. Les cours, à travers des poèmes et des comptines, entre autres, sont interactifs et incitent les élèves à faire appel à leur créativité.
Qu’est-ce que cela apporte à un enfant de maîtriser sa langue maternelle ?
La langue maternelle fait partie du patrimoine d’un pays et elle est souvent liée à son histoire. D’ailleurs, les plus grandes instances mondiales reconnaissent ce fait. C’est donc important qu’un enfant connaisse et maîtrise sa langue maternelle. Par la même occasion, il apprend aussi la beauté et la richesse de la culture de tout un peuple.
Que souhaitez-vous au kreol moricien ?
Il faut bien faire la distinction : pour le moment le kreol moricien est enseigné comme un sujet et l’utilisation de la langue créole comme médium d’enseignement n’est pas officielle. Je souhaite que cela devienne réalité dans un proche avenir. Je trouve aberrant, par exemple, que les cours de citizenship education ne se fassent pas en créole. L’histoire d’un pays doit obligatoirement être enseignée dans sa langue maternelle.
Une journée internationale et tout un programme
Ce mardi 21 février, à 13 heures, le Département de pédagogie appliquée, en collaboration avec le collège Père Laval, célèbre la Journée internationale de la langue marternelle lors d’une Special Afternoon School Assembly. L’invité d’honneur sera Kadress Pillay, ex-ministre de l’Éducation et actuel Chairman de la National Empowerment Foundation. Le centre Nelson Mandela pour la culture africaine marque aussi cette journée spéciale en organisant une soirée «bring and share» à son siège à la Tour-Koenig à partir de 19 heures. Au programme de cette soirée sur le thème Anou koz nou langaz : «Expozition ek lavant liv, poezi, sirandann ek lamizik».