Il y a de ces timings qui sont scrupuleusement respectés sur un calendrier pré-électoral ! Tout n’est ensuite que mise en scène et communication ! Le réajustement des salaires obéit à cette stratégie-là. Voilà une mesure réclamée à cor et à cri – par les syndicalistes et les travailleurs – qui devient finalement une réalité ! Au fond, le réalignement annoncé par pas moins que trois ministres ce vendredi est un dû qui ne fait que corriger une injustice ressentie par une grande majorité d’employés après l’application du salaire et du revenu minimum ! Tout cela sur une toile de fond de cherté de la vie.
Comme le gouvernement ne pouvait se permettre de créer une disparité entre le public et le privé, le recours à une allocation intérimaire a pour objectif de satisfaire les fonctionnaires en attendant la publication du rapport du PRB en janvier 2026 ! Tout était calculé d’avance avec des cartes révélées progressivement pour déboucher sur le résultat du vendredi 9 août.
C’est le Premier ministre lui-même qui avait donné la garantie, lors de la Journée mondiale des fonctionnaires, que le rapport sur la relativité salariale sera pris en compte avant la fin de cette année. «Kan mo donn parol, mo respekte…»
Entre-temps, les syndicats ne lâchaient pas l’affaire avec plusieurs marches, dont une dernière manifestation qui a eu lieu le matin même de l’annonce de la nouvelle grille des salaires.
Personne n’est dupe ! Le moment choisi pour l’application de cette décision attendue une première fois en mars, puis vainement dans le dernier budget, n’est pas une coïncidence quoiqu’en dise le ministre Padayachy qui lors de la conférence de presse, ce vendredi aux côtés de ses camarades Ramdhany et Callichurn, expliquait que ce n’est pas l’imminence des législatives qui a motivé ce geste de la majorité ! Le ministre des Finances évoque la philosophie d’un gouvernement qui a «a ker popilasion, bann retrete ek travayer (…) Popilasion dan so globalite pou tre satisfe ek sa mezir ki pe pran-la !»
Cette proposition, censée soulager les travailleurs, va-t-elle créer un feel-good factor suffisamment fort pour influencer les votes futurs en faveur de la majorité ? Cette impression de main tendue aux travailleurs amène comme d’habitude plusieurs réactions dans son sillage. Si Business Mauritius donne déjà le ton en affirmant que les salaires ne doivent pas être pris comme un enjeu politique, si certaines entreprises ne se redressent qu’à peine après les années difficiles du Covid, et si les PME sont préoccupées par l’avenir, le gouvernement se veut rassurant affirmant déjà qu’une aide sera accordée aux secteurs qui en auront besoin.
Reste les questions habituelles qui surgissent à chaque fois que l'Etat se veut généreux avec l’argent des contribuables : quelle méthodologie utilisera-t-il pour pouvoir satisfaire l’ensemble des demandes qui vont affluer et où trouvera-t-il les fonds nécessaires ?
Alors que cette mesure a pour objectif de «amenn lazwa a bann travayer», le paradoxe veut que les citoyens craignent déjà les répercussions de cette apparente générosité de la majorité. Ainsi, ils sont nombreux à se demander si ce qui est offert d’une main sera repris de l’autre au travers d’une continuelle série d’augmentations de prix des denrées alimentaires et des médicaments ! C’est d’ailleurs la thèse de l’opposition parlementaire, qui par la voix de son leader (Arvin Boolell) affirme déjà qu’il n’y a aucune solution proposée face à la dépréciation de la roupie et la hausse des prix : «Le manque à gagner est énorme pour les Mauriciens et cette somme ne va pas couvrir les coûts à cause de la cherté de la vie qui ne faiblit pas. Ce que le gouvernement ne nous dit pas, c’est comment il va faire pour régler ce problème qui fait suffoquer les Mauriciens.».
Après avoir exprimé ses critiques légitimes, l'opposition, qui prévoit un meeting ce dimanche matin à Quatre-Bornes, partagera-t-elle enfin ses idées pour faire face à cette situation ? Ou, doit-elle aussi respecter scrupuleusement le timing de ses propositions sur le calendrier pré-électoral ?