De nombreux jeunes diplômés peinent à trouver un boulot et ne cessent de faire des recherches, en vain.
Ils sont jeunes. Ils ont fait de brillantes études supérieures et ont, en poche, ce précieux sésame qu’est le diplôme universitaire. Et pourtant, ils ne trouvent aucun travail. Entre chômage et accumulation de petits jobs, ces jeunes diplômés vivent au quotidien un véritable drame. Témoignages…
Ashweena a 26 ans. Alors qu’elle devrait jouir d’une belle carrière après de brillantes études en Histoire et être une jeune femme indépendante, elle passe ses journées à la maison à pleurer et à espérer un avenir meilleur. Après avoir envoyé son curriculum vitae dans toutes les institutions capables de l’embaucher et essuyé plusieurs refus, Ashweena ne sait plus à quel saint se vouer. «Je suis totalement désespérée. J’ai complété mes études en 2009 et je n’ai toujours pas de travail. Ce n’est pas faute d’avoir cherché. J’ai compris sur le tard qu’il n’y avait pas de perspective d’emploi dans ce domaine», dit-elle, désespérée.
Comme elle, ils sont plusieurs centaines de diplômés à faire face au chômage, une dure réalité qui les plonge dans un profond désarroi. Devant un tel constat, une question se pose : le diplôme serait-il une arme majeure contre le chômage ? Cette question suscite de nombreuses interrogations.
Eh oui ! Et si être titulaire d’un diplôme ne garantissait plus la possibilité d’avoir un travail ? Il n’est pas rare, de nos jours, de croiser une diplômée en médecine qui travaille dans un centre d’appels en attendant de pouvoir exercer. Il n’est pas non plus étonnant de croiser un diplômé de l’université travaillant dans un supermarché, faute de trouver un job selon ses compétences.
Qu’ils sortent de l’université ou d’une grande école d’études supérieures, de nombreux jeunes diplômés rencontrent de plus en plus de difficultés à trouver un emploi. Bien sûr, nous sommes presque tous passés par l’étape des recherches qui s’avèrent longues et fatigantes, mais certains jeunes rencontrent aujourd’hui de vraies difficultés à percer dans le monde du travail, la faute probablement à un marché saturé et à des études qui n’offrent pas de grands débouchés.
Le choix de sa filière d’études est une décision importante à laquelle l’on doit accorder toute son attention car elle aura un impact incontestable sur son avenir. Avec tout cela en tête, certains croyaient dur comme fer avoir choisi le bon filon. C’est le cas de Divesh qui a choisi, en 2009, un nouveau cours proposé par l’Université de Maurice : «J’ai fait un BSc. Computer Applications. Avec l’essor de la technologie, je pensais vraiment que c’était un domaine ayant plein d’avenir, mais je me suis trompé.»
Après ses études et lorsqu’il s’est mis en quête d’un travail, il a, dit-il, compris qu’il lui manquait l’expérience du terrain, un atout important et nécessaire qu’exigent de nombreuses entreprises, et que ce qu’il avait appris en cours «ne correspondait pas vraiment aux normes et aux défis du monde du travail» qui évoluent constamment. «Il y a un monde de différence entre ce qu’on nous apprend en cours et ce que recherche l’employeur. Dans mon cas, c’était des outils technologiques dépassés qui n’avaient plus leur raison d’être», dit-il, dépité.
La colère, la déception, la frustration… ce sont là autant de sentiments que nourrissent ces jeunes qui n’arrivent pas à percer. Avoir un travail et un salaire fixe, avoir une carrière digne de ce nom dans son domaine d’expertise, voilà tout ce que demande Riah. À l’aube de ses 28 ans, cette jeune femme travaille actuellement comme Assistant Child Programme Officer sur une base contractuelle, un domaine qui n’a, précise t-elle, rien à voir avec les études qu’elle a faites, un BSc. History and Social Studies.
Frapper à toutes les portes
Quand elle n’enchaîne pas les petits boulots, cette ancienne étudiante arpente les rues, frappe à toutes les portes pour trouver un travail mais de travail justement, elle n’en trouve pas : «Quand j’ai commencé ce cours, on nous disait que nous ne tarderons pas à être embauchés. Mais cinq ans plus tard, toujours rien. Il n’y a que cinq institutions pour 500 élèves dans lesquelles nous pouvons trouver de l’emploi, mais elles ne recrutent pas. C’est simple. Il n’y a pas de place disponible.»
Las d’avoir cherché du boulot, Divesh ne connaît plus que déception. Il aimerait pouvoir trouver un emploi stable et un salaire fixe, mais ne sait plus où chercher et vit tout cela comme un sentiment d’injustice. Diplômés, mais n’ayant pas d’expérience, ces jeunes s’enfoncent dans un cercle vicieux et ont du mal à en sortir. Cette condition d’instabilité est pour eux un cap difficile à franchir. Coincés dans une situation sans issue, ils n’ont aucune perspective d’avenir.
Une situation difficile qui, en plus de les affecter, touche aussi leurs familles. Ashweena, une jeune mariée, est également dans une situation délicate. Le quotidien est pour elle douloureux et synonyme de désespoir. Sans aucune source de revenus, elle se voit dans l’obligation de dépendre financièrement de son époux, ce qui est inacceptable pour cette diplômée. «Des fois, j’ai du travail dans les magasins ou dans les usines, mais c’est toujours sous contrat et c’est très mal payé. Comment accepter cela quand on a fait des études ? C’est très dur. J’ai l’impression d’avoir perdu du temps et d’avoir fait perdre de l’argent à mes parents», confie-t-elle.
Être indépendant, avoir une carrière et un bon salaire, faire des projets d’avenir, c’est tout ce que souhaite aussi Riah. «J’aurais 28 ans bientôt et je n’ai toujours pas de carrière, ni de salaire fixe. Je ne peux ni dépendre de moi-même, ni faire des projets d’avenir. Ça a des répercussions sur ma vie personnelle. Je ne peux pas penser à me marier, avoir une maison et une famille sans être indépendante», déclare-t-elle. Riah n’est pas la seule personne touchée, son état affecte aussi ses parents qui, dit-elle, sont stressés de la voir ainsi : «Je n’avance pas et c’est très frustrant. C’est une frustration qui touche toute ma famille.»
Le combat pour ces jeunes est quotidien, surtout quand ils doivent en plus faire face au regard des autres et subir de nombreux préjugés.
Aujourd’hui, ils ne rêvent plus que d’une chose : sortir enfin de cette impasse.