Le drame des Mauriciens, c’est de devoir faire face à ces politiciens de tous bords qui insultent continuellement notre intelligence.
Le drame des Mauriciens, c’est de constater qu’il n’y a pas de choix crédible entre un gouvernement dont l’usure du pouvoir se fait cruellement sentir et une opposition essoufflée qui, à force de tractations en coulisses, ne représente plus une dynamique alternative. Le drame des Mauriciens, c’est qu’à une année des législatives, le choix sera pourtant, une nouvelle fois, entre deux blocs que rien ne distingue, si ce n’est l’obsession de leurs intérêts.
Voyons ce qui s’est passé cette semaine avec les propos indignes de Ramgoolam sur Ariel Sharon (qui était loin d’être un saint, mais là n’est pas le sujet) autour de sa «pénitence», ses huit ans de coma. Quand l’on réalise que ces mots-là viennent d’un médecin… Le cynisme opportuniste n’a pas de frontière ! Tant qu’il y a une chance d’engranger des dividendes politiques, l’immoralité se pratiquera toujours de manière normale, banale. Et tant pis si l’on blesse toutes ces familles qui souffrent devant un de leurs proches, plongé actuellement dans le coma.
Ce n’est pas que Ramgoolam s’en fout, mais pouvait-il rater une occasion de faire de la basse politique gratuitement ? Cela dit, qu’est-ce qui différencie les propos du Premier ministre de ceux d’Alan Ganoo qui, lors de la fête Eid de l’an dernier, avait jugé utile faire un réquisitoire et demandait justice pour les condamnés de l’Amicale ? Dans les deux cas, Ramgoolam comme Ganoo ont eu recours à la même méthode : faire du populisme (on dénonce le communalisme hypocritement, mais à la première occasion, on danse sur la corde sensible ethno-castéiste), adapter leurs discours à leur auditoire, en profitant d’une fête religieuse pour séduire une communauté spécifique, dans les deux cas, la communauté musulmane.
À suivre la logique de Ramgoolam et Ganoo, il faudrait comprendre que les Mauriciens d’autres communautés seraient insensibles à la tragédie des Palestiniens ou approuveraient la condamnation des innocents à la prison. Ramgoolam, Ganoo et consorts sous-estiment l’intelligence de la population en pensant que l’indignation face aux injustices commises est sélective et est une affaire de communautés. Certes, personne n’est dupe. Dans les deux camps, on affûte les armes et on est déjà en précampagne électorale pour affronter les prochaines législatives. L’opération séduction a donc déjà commencé et s’intensifiera.
Un langage spécifique à Plaine-Verte, un autre à Triolet. Mais pour autant, est-ce normal et devons-nous assister à ces scènes où l’on nous prend pour des imbéciles, sans broncher ? Non ! D’où l’importance de maintenir la vigilance car les Mauriciens deviendraient tout aussi cyniques que les politiciens s’ils perdaient leur capacité de s’indigner. À une année des élections, il importe de faire une réflexion sur la classe politique dans son ensemble à Maurice. Y a-t-il une différence entre les principaux partis traditionnels ? Est-ce à ceux-là que nous allons confier le destin de notre pays ? Il paraît que nous avons les politiciens que nous méritons. Est-ce que nous méritons que les
politiciens insultent notre intelligence ?