Il existe différents Conversion Centres dans l’île.
Il existe différents Conversion Centres dans l’île.
Ils sont plus de 10 000 Mauriciens à avoir entamé les procédures afin d’obtenir la nouvelle pièce d’identité. Pour l’instant, ce sont les 18 ans- 22 ans qui sont concernés. Alors que pensent-ils de ce changement ?
Elle vient tout juste de fêter ses 18 ans. 18 ans ! Elle attendait ce «grand âge» avec impatience. Le «bonheur» d’être, enfin, une «adulte». L’impression de débuter une nouvelle vie, la joie de pouvoir prendre ses propres décisions : «C’est un symbole de liberté. Je suis responsable de moi-même. C’est chouette», confie la jeune fille. Alors Rosabelle Louis n’a pas hésité beaucoup avant d’entamer les procédures afin d’obtenir sa carte d’identité. Le document qui a représenté pendant des années le sésame de l’accession à l’âge adulte pour elle. Ils sont nombreux à s’être rendus aux différents ID card Conversion Centres de l’île, ces dernières semaines, afin d’obtenir la toute nouvelle carte d’identité qui reste, néanmoins, au centre de la controverse (voir hors-texte).
Rosabelle, étudiante en Form V au collège New Devton, a bien entendu parler de la polémique. Du fait que la nouvelle carte comporterait trop d’informations personnelles, qu’elle serait anticonstitutionnelle et dangereuse pour la liberté de tout citoyen car elle comporte des données biométriques et des empreintes digitales (arguments avancés par les détracteurs de la new ID Card). Néanmoins, la demoiselle, habitante de Quatre-Bornes, a voulu réaliser son rêve. Tout simplement : «J’ai entendu parler de tout ça. Mais moi je voulais ma carte d’identité. Alors, j’ai fait ce qu’il fallait. Mais je dois avouer que je ne comprends pas vraiment pourquoi il était nécessaire de tout changer. Je préférais l’ancienne.» Et elle n’est pas la seule…
Le petit bout de papier plastifié, Yashvin l’aimait beaucoup. Surtout qu’il n’avait pas besoin de le trimballer partout. À 22 ans, le jeune homme, employé dans le privé, avait déjà en poche l’ancienne carte d’identité. Et ça lui allait très bien comme ça. Mais comme il ne veut ni faire de la prison ni payer une amende pharamineuse (si un citoyen mauricien n’est pas capable de produire une preuve d’identité, il risque une amende de Rs 100 000 et une peine de prison de cinq ans), alors il a décidé de se lancer. Quand il avait un peu de temps, quand le centre qui se situe à Port-Louis n’était pas trop bondé : «Je ne me suis pas posé un million de questions, j’ai fait ce qu’il y avait à faire, c’est tout.»
Néanmoins, tout ça lui a paru bien long. Faire des photos, prendre des empreintes, vérifier et contre-vérifier toutes les informations. Et l’attente de deux semaines ! Pour Rosabelle, c’est une vraie torture : «J’aurais préféré avoir ma carte entre mes mains, tout de suite», confie-t-elle. La séance photo : son pire moment. Les données sont désormais biométriques, peut-être, mais les photographies ne se sont pas améliorées : «Je ne suis pas satisfaite du résultat. Et, pourtant, on a refait la photo trois fois.» Elle pourra «admirer» le résultat final dans quelques jours.
Melissa Barry, 19 ans, également. Et cette habitante de Petite-Rivière a hâte de découvrir sa nouvelle pièce d’identité «J’aime bien l’idée d’avoir une carte au format d’une carte bancaire et qui soit à la pointe de la technologie.» Elle estime que «les démarches administratives ou commerciales» seront, désormais, facilitées : «Ce sera beaucoup plus pratique.» Et tout cela malgré les réserves qu’elle exprime : «Même si c’est un danger pour les libertés publiques et que certaines personnes pourraient accéder à des informations qu’on ne souhaite pas dévoiler. Mais selon le gouvernement ça va nous protéger de l’usurpation d’identité.»
Comme Yashvin, elle a entamé les procédures «parce que la loi prévoit une peine d’emprisonnement et une amende pour ceux qui refusent.» Malgré cet argument de taille, Sailesh, lui, a pris un peu de temps avant de se décider. Les débats pour ou contre l’ont intéressé pendant un temps. Mais pendant un temps seulement. Il ne croit pas que les contestataires pourront renverser une décision gouvernementale.
Du coup, il a décidé de lancer les procédures pour obtenir sa nouvelle carte d’identité dans quelques jours. À 20 ans, le jeune homme est étudiant à l’Université de Maurice et confie que les discussions autour de la nouvelle carte d’identité nationale ne passionnent pas les étudiants. Sur le campus, ce n’est pas le talk of the town : «Je crois que tout le monde a son avis. C’est un sujet assez sensible. C’est pour ça que les gens ne veulent pas forcément témoigner à visage découvert», explique-t-il.
Ses 18 ans ne sont pas bien loin. Mais, ça fait un moment qu’il ne se fait plus d’illusion sur le pouvoir d’une pièce d’identité. Rosabelle, elle, y croit toujours.
La contestation continue…
Motivés. Et ce n’est pas une mauvaise nouvelle qui va freiner ceux qui sont contre la nouvelle carte d’identité nationale. Si le juge David Chan Kan Cheong a rejeté en début de semaine, la demande d’injonction réclamée par le Dr Maharajah Madhewoo contre l’introduction de la nouvelle carte d’identité, ce n’est pas une raison pour arrêter le combat, estiment les membres de la Plateforme No to New ID Card. Ils comptent faire appel de ce jugement dans les jours qui viennent.
Par ailleurs, Pravind Jugnauth a logé son «main case» en Cour suprême, en fin de semaine, afin de contester le projet de la nouvelle carte d’identité. Il a déclaré, lors d’un point de presse, le vendredi 18 octobre, qu’être obligé de fournir des photos biométriques et des empreintes digitales constitue une atteinte à la vie privée des citoyens. Il a également affirmé que ce combat, il le menait pour les Mauriciens.
D’autre part, le ministre des TIC, Tassarajen Pillay Chedumbrum, s’est également exprimé sur la nouvelle carte d’identité nationale, cette semaine. Selon lui, la décision de justice du juge David Chan Kan Cheong prouve bien que ce nouveau document n’est pas anticonstitutionnel. Il déplore que de «nombreuses faussetés» sont véhiculées et il demande que cesse «toute opération de dénigrement».
Ça bouge !
Il existe, désormais, des unités mobiles pour faciliter la migration vers la nouvelle carte d’identité nationale. Cette semaine, une équipe du Mauritius National Identity Scheme était à l’usine Princes Tuna. Ce sont 20 000 employés du secteur privé qui pourront bénéficier de ce service dans les semaines à venir.