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Affaire Saint-Louis : gouvernement cherche lumière…

5 octobre 2020

Une charge de blanchiment d’argent pèse contre Alain Hao Thyn Chuan Ha Shun, aussi connu comme Alain Hao Thyn Voon.

Lui, il ne s’intéresse pas à tout ça. Affaire Saint-Louis ? Interpellations, interrogatoires, arrestation ? Mystère ? Leaked documents ?  Ce député de la majorité, dont l’agacement court-circuite le bref entretien, ne veut pas parler du scandale politique qui est revenu briy la bou cette semaine (l’affaire qui a coûté son poste à Ivan Collendavelloo a éclaté en juin : voir hors-texte pour se rafraîchir la mémoire). L’arrestation du big boss de PadCo (voir ci-contre, un résumé des événements de la semaine) a appuyé sur le take lalimier, braquant à nouveau les projecteurs sur les allégations de fraudulent act autour d’un contrat alloué à une entreprise danoise pour l’achat et l’installation de turbines pour le CEB : «Vous voulez que je vous dise quoi ? Ça ne met personne mal à l’aise. Au contraire. Qu’est-ce que ça prouve ce qui se passe en ce moment ? Que les institutions fonctionnent, que le gouvernement souhaite la transparence et que la vérité soit faite sur cette affaire…» Que la lumière se fasse, quoi.

 

Mais pas trop quand même. Une transparence-opaque, estiment de nombreux observateurs ; d’autres révélations contre des proches du MSM ne seraient pas les bienvenues. Surtout que la question de fuites de document reste toujours entière. Il y a dans chaque étape de l’allocation du contrat des questions qui restent sans réponse. L’ICAC cherche à savoir comment la compagnie PadCo se serait retrouvée en possession des détails techniques de cet exercice avant même que celui-ci ne débute. L’opposition, elle, ne lâche pas l’affaire : l’ombre du gouvernement plane sur toute cette histoire, estime-t-elle. Dans les coulisses du pouvoir, malgré le détachement apparent du député interrogé, l’affaire Saint-Louis, qui polarise l’attention, c’est encore enn fizib ki pe sote : «On n’avait pas besoin de ça, on est bien d’accord. Le mood n’est pas bon, il y a la perception, véhiculée par un petit groupe de personnes, que rien ne va et le retour de cette affaire n’aide pas. Mais, je suis confiant que les gens vont finir par voir la réalité : nous sommes un gouvernement intègre qui fait du bon travail. Le Premier ministre a pris les décisions qui s’imposaient au moment qu’il fallait», précise un proche de l’équipe de Pravind Jugnauth. 

 

Il évoque la gestion de la Covid-19, l’aide aux employés du secteur hôtelier, la construction de logements sociaux : «Se pa bann Bruneau ki kapav vinn kont bann fe etabli, letan pou donn nou rezon.» Notre interlocuteur évite soigneusement d’évoquer le naufrage du Wakashio, la marée noire, la quarantaine payante, les pertes d’emploi et du pouvoir d’achat… Et tous ces koz-koze qui nourrissent les frustrations : la rumeur autour d’un mariage, les allégations sur l’achat d’une propriété. «L’affaire Saint-Louis, et c’est une chance pour le gouvernement, n’intéresse pas forcément les Mauriciens. Mais ceux qui nous gouvernent ont d’autres problèmes on their plate. Et pour l’instant, je ne vois pas un damage-control efficace et pertinent», précise un ancien du MSM, fan inconditionnel de Jugnauth senior. Mais lui s’y intéresse… Et il n’est pas le seul.

 

Pour situer

 

Des achats de turbines par le CEB. En 2014, le CEB lance un premier appel d’offres. Le but : permettre l’installation de turbines de 15 MW à la centrale de Saint­-Louis. Burmeister & Wain Scandinavian Contractor (BWSC), qui vient de la Danemark, décroche le contrat. Le Bid Evaluation Committee rejette l’appel d’offres. Quand la Banque africaine de développement (BAD), soutien financier du projet, demande de relancer un tender, en 2015, c’est la BWSC qui est encore choisie.  Elle obtient le contrat de ce projet de Rs 4,3 milliards en mars 2016.

 

Des allégations de pots-­de­-vin.  Une enquête a été initiée par la BAD suite aux informations fournies par un whistleblower, concernant un contrat d’achat de turbines par le CEB. Les conclusions ? Il est suspecté que des officiels mauriciens auraient reçu des bribes afin que des informations secrètes soient transmises à la firme danoise, BWSC, et pas aux autres soumissionnaires. Dans un résumé du rapport d’enquête, que Pravind Jugnauth ne souhaite pas rendre public à cause d’une clause de confidentialité, plusieurs noms apparaîtraient. Le chef du gouvernement n’en a divulgué que deux, ceux d’Ivan Collendavelloo et de Paul Bérenger. En septembre, soupçonné d’être un intermédiaire, Bertrand Lagesse avait été arrêté par l’ICAC

 

Arrestation, interpellations, interrogatoires et libération sous caution

 

Le mardi 29 septembre, Phillipe Alain Hao Thyn Chuan Ha Shun, directeur exécutif de PadCo, entreprise qui a travaillé avec la BWSC, a été arrêté par les enquêteurs de l’ICAC. Il a été détenu jusqu’au jeudi 1er octobre, date à laquelle il a été libéré contre une caution de Rs 300 000 (il a également signé une reconnaissance de dette de Rs 5 millions). Son avocat, Me Shailesh Seebaruth, a expliqué que son client doit répondre d’une accusation de Money Laundering et que ce dernier nie les faits qui lui sont reprochés. Au cœur de tout ; une somme de Rs 49 millions que les officiers de l’ICAC suspectent d’être le fruit d’une activité criminelle (il est question de pots-de-vin) en lien avec l’allocation du contrat du CEB à la BWSC.
• Trois autres employés de PadCo ont été entendus par la Commission.

 

• Rakesh Kumar Dhununjoy, Senior Engineer, et Manoj Kumar Jahajeeah, Principal Engineer, tous deux du CEB, ont aussi été interrogés par l’ICAC. Ils auraient été impliqués dans l’exercice d’appel d’offres. L’ICAC veut savoir comment PadCo aurait eu accès à des détails techniques avant le début de l’exercice de tender.

 

• Christelle Sohun, ancienne membre de l’Independent Review Panel (IRP), a également été entendue par l’ICAC cette semaine. La Commission veut comprendre qui est à l’origine des leaked documents. La principale concernée a confié à l’express avoir toujours travaillé dans un souci d’intégrité et de responsabilité, et a précisé qu’elle n’a jamais fuité aucun document.

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