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Par Sabine Azémia
10 février 2016 14:07
«Nous vivons l’âge d’or de l’information.»C’est ce qu’a déclaré Laurent Joffrin, cogérant, directeur et rédacteur en chef du journal français Libération, lors d’une conférence organisée par le Media Trust, mardi, pour les professionnels de la presse et de la communication au Hennessy Park Hotel. Les thèmes abordés, très d’actualité, étaient La survie de la presse papieret Les journalistes face à la montée du terrorisme. Il a aussi donné une conférence publique sur les mêmes thèmes à l’université de Maurice, jeudi.
Pour Laurent Joffrin, la presse papier, du point de vue de l’information, se porte bien, très bien même. «Je crois que le journalisme pratiqué à travers le monde est du bon journalisme. Bien sûr, la presse par définition est imparfaite. Elle n’est pas parfaite et ce depuis toujours. Et c’est normal (…) Il arrive qu’on aille trop vite, on n’a pas le temps de tout vérifier, du moins tout de suite après l’événement. Et puis, n’importe qui peut faire de l’information et on trouve parfois n’importe quoi dans les journaux. Mais on ne va pas interdire aux gens de faire de l’information.»
En tout cas, pour le rédacteur en chef de Libération, on n’a jamais été «mieux informés car on peut communiquer immédiatement avec les nouvelles technologies. Le système médiatique est complet. L’offre d’information n’a jamais été aussi riche. Le pouvoir est sous l’œil du citoyen».Toutefois, concède-t-il, alors qu’on a une presse papier plus que jamais riche, fiable et pluraliste, celle-ci est menacée par une crise économique. «On est dans une situation très bizarre où nos journaux évoluent au sein d’un système très rapide et instantané mais dans une situation économique difficile. La crise est essentiellement économique, pas technologique», a-t-il souligné.
Cela est dû au fait que le coût de fabrication d’un journal ne cesse d’augmenter, en raison de la hausse du prix du papier surtout, et que l’information est disponible gratuitementsur Internet. Il s’agit de trouver l’équilibre entre le printet le numérique qui est actuellement offert gratuitement par la plupart des journaux – à l’exception de quelques-uns. «90 % de nos chiffres d’affaires viennent du print(…) et il faut qu’on puisse vendre nos articles. L’information doit donc être différente et de qualité pour qu’on puisse la vendre. Il faut cultiver la qualité, la différence, le style, avoir une couleur, une manière qu’on ne voit pas ailleurs.»Pour lui, la presse papier peut aussi survivre en devenant «un acteur civique» avec des causes précises à défendre.
Pour le second volet de la conférence, Le journalisme face à la montée du terrorisme, Laurent Joffrina livré une expérience plus personnelle et intime. Il a raconté notamment comment il a appris avec peine et stupeur l’attentat de Charlie Hebdoet la mort de gens qu’il connaissait bien. Et comment par la suite, son équipe a accueilli celle de Charlie Hebdoau sein de la rédaction avec tout ce que cela suppose de mesures de sécurité. Il a aussi raconté comment lui-même a reçu des lettres de menace dans des cercueils et s’est retrouvé sur une liste de gens à abattre par les terroristes. Mais face à cela, dit-il, il faut continuer à informer, à dénoncer sans pour autant diffamer, appeler à la haine ou atteindre à la vie privée. Pour ne pas laisser gagner ceux qui veulent tout détruire au nom d’une idéologie…
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