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Décès tragique du jockey Nooresh Juglall - Son père Mohunlall : «Linn lev nou nom lao»

24 mai 2021

«Monn perdi enn frer», confie Akash Aucharuz (à dr.), également victime d'une chute le samedi 15 mai.

Il essaie de tenir le coup. Pour sa famille surtout. Mais les événements du samedi 15 mai, Mohunlall Juglall ne peut se les enlever de la tête. Ce jour-là, son fils Nooresh a fait une chute et a été admis aux soins intensifs, avant de rendre l'âme. Depuis, ses proches et lui sont plongés dans une profonde tristesse. Il revient sur ce triste samedi... Ce matin-là, Mohunlall a vu son fils quitter pour la dernière fois le domicile familial afin de se rendre au Champ de Mars. «Normalement, son frère Tejash et lui avaient prévu de s’y rendre dans la même voiture mais cela ne s’est pas fait car Tejash devait récupérer des documents administratifs. Je me rappelle même qu’un des fils de Nooresh pleurait pour qu’il ne s’en aille pas, ce qui l’avait d’ailleurs mis en retard», nous confie Mohunlall, de l'émotion dans la voix.

 

Et plus tard, dans l'après-midi, c'est devant son petit écran que la famille Juglall vit l’horreur. D'abord, deux cavaliers (NdlR : l’apprenti Batchameah et le jockey Aucharuz) font une chute. Puis, c'est au tour de Nooresh de chuter, au niveau de la «route» que le jockey avait traversée des centaines de fois à dos de cheval auparavant. L'aîné des Juglall a été projeté au sol quand sa monture, Rule The Night, a trébuché sur les talons de Golden Tractor.  Percuté dans sa chute par le cheval de l’écurie Jones – qui avait également chuté – à près de 60 km/h, le jockey n’a eu aucune chance face à la violence inouïe de l’impact.

 

«Nou ti fini kone ki sa ti bien grave. Monn pran mo papa ek mo mama e nou finn al deswit klinik», relate Sweta Juglall-Hurchund, la soeur du jockey. Admis à la City Clinic, Nooresh Juglall s’est accroché à la vie tant qu’il le pouvait. Arrivé dans un état semi-comateux, saignant du nez et de la bouche avec plusieurs côtes fracturées qui avaient perforé ses poumons, le jockey a été placé sous respiration artificielle mais il a succombé à ses blessures dans la nuit. «Nous avons gardé espoir jusqu’au bout mais il avait malheureusement subi trop de blessures», concède Sweta Juglall-Hurchund.

 

Une triste fin pour un jockey au parcours atypique. Les études n’ont jamais été la tasse de thé de Nooresh, du propre aveu de son père. Il ne vivait que pour une chose : les courses de chevaux. Et quel parcours que celui réalisé par cet habitant de Sainte-Croix, qui a débuté comme arroseur de piste du Champ de Mars dans son adolescence pour culminer avec le titre de jockey champion de Maurice l’année dernière. «Toute la famille est très reconnaissante envers l’écurie Rousset pour tout ce qu’elle a fait pour elle et Nooresh voulait à tout prix remporter une course classique pour cette écurie cette année», se lamente Mohunlall. 

 

S’il est vrai que Nooresh Juglall a pu compter sur le soutien de plusieurs personnes durant sa carrière, il n’en est pas moins vrai que son abnégation pour y arriver y est pour beaucoup. Une rigueur du travail qui a débuté dans le centre hippique de Ricky Maingard à Mon-Choisy, où sa route a croisé celle d’Akash Aucharuz, de laquelle est née une belle amitié. Les deux garçons se considéraient d’ailleurs comme des frères car leur carrière respective était étroitement liée.

 

«Rann omaz a (mo) frer»

 

«Nous avons vécu ensemble pendant deux ans en Afrique du Sud durant notre apprentissage. Ti ena enn mari koneksion ant nou de. Zordi, monn perdi enn frer», se désole Akash Aucharuz qui n’arrive toujours pas à s’habituer au fait qu’il ne partagera plus aucun souvenir avec son alter ego. Le décès de son «frère», Akash Aucharuz l’a vécu dans sa chair car il se souvient encore du moment où ce dernier est arrivé à la clinique. «On s’occupait encore de moi (NdlR : il s’était blessé au pied) quand j’ai vu Nooresh arriver sur la civière. Il luttait pour respirer. Mo leker ti mari lour. Zame mo ti panse mo ti pou trouv li koumsa enn zour.»

 

Quand il a appris le décès de Nooresh, Akash Aucharuz a tenu absolument à être présent aux funérailles, même si son état de santé ne s’y prêtait pas forcément. «J’étais en fauteuil roulant mais je l’ai suivi dans le cortège en voiture jusqu’au crématoire parce que je voulais qu’il sache que j’étais là pour lui. Je ne garderai que de bons souvenirs de lui. Je sais que rien ne pourra le remplacer mais je resterai toujours disponible pour sa famille comme il l’a été pour moi. He’s the best person I’ve met in this world.»

 

Chez les Juglall, on tente tant bien que mal d’encaisser le choc de cette disparition. Comme le dit si bien son père Mohunlall, «linn (Nooresh) lev nou nom lao». Car le talent de Nooresh Juglall n’était pas seulement reconnu à Maurice mais également au niveau international, lui qui a été un digne ambassadeur du pays de par ses exploits en Afrique du Sud et à Singapour. Son attachement pour sa famille était tel qu’il a décidé de s’établir auprès des siens à son retour au pays en 2019. Une maison où sa bonne humeur et son rire légendaire ne résonneront malheureusement plus.

 

Tejash Juglall, bien que très touché par la disparition de son grand frère, entend bien poursuivre sa carrière de jockey, pour «rann omaz a (mo) frer». Nooresh, qui avait aidé son frère dans le financement de son apprentissage, nourrissait de grands projets pour ses fils, qu’il voyait également embrasser la carrière de jockey. «Pou ena kat zoke dan lafami», aimait-il dire. Reste à savoir si Chaaya, sa veuve, consentira à voir ses garçons poursuivre dans cette vocation, elle qui est encore durement éprouvée par le décès de son époux. Seul le temps le dira...

 

Didier Simanarain



Hommage d'un lecteur : La première journée 2021 et la dernière de Nooresh

 

Ce jockey hors pair s'en est allé le samedi 15 mai. Une grande perte et une nouvelle qui a atterré le monde hippique. Le samedi 15 mai 2021 marquait la première journée de courses de l'année, un jour tant attendu par des milliers de turfistes. Une fois passée, cette journée ne peut que laisser un très mauvais souvenir. Les entraîneurs et jockeys gagnants de chaque course n’avaient même pas fini de fêter leur victoire qu’ils ont été pris par une nouvelle très triste qui a endeuillé le monde hippique. Nooresh laisse derrière lui un grand vide. Son décès a touché aussi bien les turfistes que les sympathisants d'ici et des pays où Nooresh avait exercé. 

 

À ma connaissance, Nooresh est le deuxième jockey à subir un tel sort ; mourir suite à une chute en pleine course au Champ de Mars On dit : «Apre la mor la tizann.» Je me permets de mettre l’accent sur trois courses : The Lall Seesurrun Cup, The Jason Espitalier Noël Cup et The Deanan Doyal Cup. Trois coupes portant les noms de trois jockeys défunts. Ces trois courses courues la première journée ont porté «malheur».

 

Coïncidence ou pas ! Superstition ou pas ! Cette journée a laissé une empreinte ô combien triste et douloureuse. Un très mauvais sort : quatre jockeys ont fait des chutes et celle de Nooresh lui a été fatale. Il nous a quittés pour toujours.

 

Mes sincères condoléances à son père, sa mère, son épouse et ses deux enfants en bas âge ainsi qu’à son frère Tejash. Que Dieu leur donne du courage !

 

J’espère bien que le MTCSL n’oubliera pas la famille et va la soutenir moralement et psychologiquement dans ces moments si difficiles, et surtout trouver des moyens pour subvenir à ses besoins quotidiens.

 

Adieu Nooresh ! Que ton âme repose en paix...

 

Chandan Munoosingh
 

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