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Par Yvonne Stephen
14 mai 2020 17:01
Moment type dans une journée de femme surchargée (en confinement). Elle planche sur un dossier super urgent, pense à appeler la nounou, fait l’inventaire mental du frigo pour savoir quoi cuisiner avec ce qu’il y a, suit les devoirs et les leçons de son/ses enfants, s’interroge sur les difficultés du confinement de la sœur de sa belle-mère qui vit seule, se demande si elle se souvient des conseils du pédiatre (qu’elle a trouvé le temps d’appeler) pour le petit qui tousse, s’inquiète de ne pas trouver le temps de faire un gâteau pour le goûter (c’est que ça mange des tonnes en confinement la famille), se fait un planning mental des choses à faire pour que la maison ne ressemble pas au dépotoir de Mare-Chicose, s’inquiète des factures qui ne cessent de s’accumuler et des rentrées d’argent qui sont incertaines…
On s’arrête là ? Oui, il vaut mieux. Ça surchauffe déjà ! Le concept de la charge mentale met en lumière le postulat suivant : il ne suffit pas d’accomplir les tâches au moment T, il faut y penser, les planifier, les hiérarchiser, les anticiper et ne pas les oublier (surtout). Alors pour les femmes qui sont appelées – oh monde impitoyable – à tout gérer, il n’y a pas une seconde de répit. Un surmenage propice à l’accumulation des frustrations, surtout en confinement. La psychologue Girisha Dhunnoo le constate. Le lockdown est plus difficile pour les femmes (et c’est sans parler du quotidien avec un partenaire physiquement et émotionnellement abusif) : «Presque tout le monde work from home en ce moment. Il y a les tâches ménagères, la gestion de la vie de famille, de l’éducation des enfants… Ce n’est pas évident pour les femmes de prendre un moment de repos. Ça peut devenir très challenging si on n’a pas un partenaire compréhensif.» Et même si on en a un, ce n’est pas évident de modifier un fonctionnement ancré au creux des femmes. S’il y a une chose à retenir du machin de Mars et de Venus, c’est que les femmes emmagasinent. Dans leur tête, plusieurs work in progress : plusieurs compartiments restent ouverts en permanence. Mais c’est évident que si le mari/papa/boyfriend/cousin pense à dire «relaxe, je gère», ça peut, quand même, changer pas mal de choses.
Mais pourquoi tout repose sur les femmes, hein ? La vie n’est pas la plus fastoche pour les madam (maison, boulot, mari, enfant : ça a l’air banal mais c’est une pression inimaginable) : «Dans la culture mauricienne, on s’attend à ce que ce soit la femme qui soit le home maker, même si elle travaille. C’est ancré dans notre culture, même si ça bouge timidement avec la nouvelle génération, cela va prendre encore beaucoup de temps pour casser ce code.»
Allez, on gère ! Le temps du confinement ne permettra pas un miracle incroyable : les mentalités, on l’a compris, ne changeront pas du jour au lendemain. Alors, femme surmenée, ceci vous concerne. Voici des conseils pour souffler.
On dédramatise. Vous n’avez pas pensé à TOUT ? Siloy sa ! Ne pas avoir appelé le tonton, changé le bol d’eau du chat et fait des collages pour le devoir de maternelle de la petite dans le bon ordre des couleurs de paillettes, cela ne va pas mettre en danger de mort la planète Terre. La recherche de la perfection est une quête épuisante. Vous n’avez pas à être la petite fille parfaite pour être aimée ; you are enough ! «Ne soyez pas trop dure envers vous-même. Oui, les femmes ont tendance à vouloir se surpasser mais cela peut entraîner de l’anxiété, de la fatigue chronique et même la dépression. Prenez votre journée normalement : vous ferez ce que vous pourrez», explique Girisha Dhunnoo.
On apprivoise ses frustrations. Votre enfant n’a pas mis la table comme vous le lui aviez demandé. Pourtant, vous faites tout dans cette maison. Un mini coup de main, ce n’est pas trop demandé, non ? On est bien d’accord. Mais il serait plus judicieux de garder son calme pour lui parler afin de ne pas le braquer : c’est une bonne occasion de s’asseoir et de discuter un peu afin de mettre les points sur les «i». Pour ne pas vous laisser submerger par les émotions, il serait judicieux de s’inspirer des cours de relaxation et de yoga. On inspire, on expire. Et on essaie de se trouver des plages de sérénité.
On écrit. Prendre le temps de coucher sur papier ce que vous ressentez vous permettra de prendre de la distance.
On ne refoule pas. Dites, partagez, exigez : il vaut mieux s’exprimer que de laisser s’entasser les frustrations et d’exploser de fatigue, de nervosité, de pa kone. La psychologue le dit : «Vous n’avez pas à essayer à tout faire vous-même. Partagez les tâches ménagères.»
On se défoule, on se fait du bien. On fait du sport. On prend des pauses : «Prendre un break, ça peut vraiment aider. On peut aussi faire des choses qui nous rendent heureuses : jardiner, lire un livre, regarder la télé. Le me-time est essentiel.» Ce n’est pas être égoïste, hein. Tirez ça de votre tête !
On ne s’acharne pas. Le tempo ne veut pas souffler ? Pourtant, ça fait des heures que vos haricots rouges cuisent. Vous pouvez tempêter sur des choses que vous ne pouvez pas contrôler sauf si vous avez la science de la cocotte-minute. Acceptez la situation, quittez ce moment pénible… et demandez aux enfants/au mari de préparer des frites ! Vous avez compris le concept, non ?
On accepte. Oui, tout ne peut pas être parfait comme Chris Hemsworth. Il y a un peu d’Edward Cullen (joué par Robert Pattinson dans Twilight) dans la vie.
La psychologue Girisha Dhunnoo propose un service d’écoute en ligne gratuit et confidentiel. Pour y accéder, rendez-vous sur ce lien qui mène à une page Facebook : https://bit.ly/Girishapsy.
Dans une série de dessins, la dessinatrice française Emma a mis en lumière le concept de charge mentale. Au fil des dessins, à consulter sur Facebook, on voit une femme s’occuper de tout. Et quand elle exprime sa frustration, ceux en face d’elle osent un : «Fallait demander.»
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