Comment réagissez-vous face à cette hécatombe ?
C’est triste mais nous devons aussi nous dire que, dans toutes les populations, il y a des mortalités de causes naturelles. Même si cela nous affecte, nous savons que la nature est ainsi faite. Si toutefois l’échouage des dauphins n’est pas lié à des causes naturelles mais bel est bien à la marée noire que nous avons eue, ce sera révoltant. Car nous verrons davantage l’impact de la pollution sur notre écosystème marin et ce sera une grande perte pour nous.
Justement, peut-on lier l’échouage de ces dauphins à la marée noire ?
D’un point de vue scientifique, nous ne pouvons pas tirer de conclusions hâtives. Il est préférable d’attendre les rapports toxicologiques car c’est cela qui nous permettra de définir la cause exacte de la mort de ces dauphins dans nos eaux. Nous ne pouvons pas venir dire que c’est dû à une intoxication causée par les produits pétroliers en provenance du vraquier sans preuve à l’appui. Car dans certains pays, les sonars utilisés lors des activités militaires font perdre aux mammifères leurs repères, ils se retrouvent en eau peu profonde où ils ne peuvent pas survivre et retrouver leur chemin vers le large.
Est-ce un phénomène nouveau à Maurice ?
Tous les ans, nous avons des mammifères, dauphins et baleines, qui s’échouent sur nos côtes mais aussi celles de Rodrigues. Cette fois, c’est le nombre conséquent en si peu de jours qui choque. D’ailleurs, j’ai déjà participé à l’autopsie des baleines lors d’un précédent échouage.
Comment pouvons-nous remédier à la situation ?
Définir la cause et savoir quelles actions entreprendre, cela dépendra des résultats des rapports. Le rapport toxicologique lui-même prendra un peu de temps à tomber car il ne peut être fait à Maurice. Ce n’est qu’à partir de là que des actions concrètes pourront être prises. Car il se peut que ces décès soient de cause naturelle ou dus à une contamination secondaire si les dauphins ont mangé du poisson contaminé. Il y a donc plusieurs suppositions. Le mieux, c’est d’attendre les rapports.
Une hécatombe qui choque
Le lundi 24 août, les habitants du Sud-est, toujours très affectés par les dégâts causés par la marée noire, se réveillent face à un nouveau drame. Des dauphins d’Électre morts (ils étaient 39 à l'heure où nous mettions sous presse), ensanglantés et déchiquetés, se sont échoués sur les côtes de la région, notamment à Petit-Sable et Grand-Sable, et leur nombre ne cesse de grimper d’heure en heure. Et hier, plusieurs autres dauphins qui essayaient d'entrer dans notre lagon ont pu être reconduits au large. Même si les habitants de cette région se sentent impuissants face à ce triste événement, ils réclament, comme plusieurs autres Mauriciens, que la lumière soit faite sur cette affaire. Nombreux sont ceux qui clament que la mort de ce grand nombre de cétacés serait liée non seulement au sabordage du Wakashio mais aussi à la présence d’hydrocarbures dans les eaux de la côte du Sud-est en raison de la marée noire causée par le naufrage du vraquier.
Mais c’est une thèse qu’a réfutée le ministre de l’Économie bleue, des ressources marines, de la pêche et de la navigation, Sudheer Maudhoo, lors d’une conférence de presse le mercredi 26 août. Selon lui et les experts présents à ses côtés à cette occasion, la mort de ces dauphins n’est nullement liée au vraquier MV Wakashio mais probablement à un dérèglement de leur système de navigation. Ils affirment même que, jusqu’à présent, aucune trace d’huile n’a été retrouvée sur et dans l’organisme des dauphins, et que les résultats des différentes analyses en cours sont attendus pour écarter la piste de la pollution marine par hydrocarbures.
Le ministre a aussi déclaré, lors de la conférence de presse, que «ce n’est pas nouveau». Une source proche de ce ministère nous a d’ailleurs affirmé qu’il y a eu plusieurs articles de presse entre février et mars 2005 qui font état de 70 dauphins d’Électre qui se sont échoués sur ces mêmes côtes et que 39 d’entre eux sont morts et 31 ont pu être reconduits au large.
Par ailleurs, Reuben Pillay qui a fait plusieurs vidéos sur cette triste réalité a été interpellé hier par la police pour une histoire de drone avant d'être autorisé à partir.