Ses proches avaient clamé la brutalité policière dès le départ. Quand Jacquelin Juliette est décédé de manière brusque et inattendue quatre jours après son 36e anniversaire – des faits qui remontent au 5 janvier 2023 –, les membres de sa famille s’étaient tournés vers les hommes de loi Rama Valayden, Anoop Goodary et Sanjeev Teeluckdharry, soupçonnant que le trentenaire avait succombé à brutalités infligées par des officiers de l’Anti Drug and Smuggling Unit (ADSU). Même si une autopsie pratiquée par le Dr Sudesh Kumar Gungadin, chef du département médicolégal de la police, avait conclu à une crise cardiaque, ils avaient toujours refusé de croire que le trentenaire, qui n’aurait jamais eu de problèmes de santé avant sa mort, avait pu les quitter de cette manière. Hélas, aucune enquête approfondie n’avait été initiée en ce sens, les contraignant à cesser de se battre pour connaître «la vérité». Ce n’est que cette année, après que des extraits de conversations téléphoniques ont été partagés sur la page YouTube de Missie Moustass, que l’enquête a été relancée.
Monica, la veuve de Jacquelin Juliette, est plus que jamais déterminée à connaître la vérité. Lesdites bandes sonores partagées sur les réseaux sociaux au mois d’octobre, rappelons-le, laissent supposer qu’il y aurait eu un cover-up à plusieurs niveaux pour maquiller l’éventuel homicide de Jacquelin Juliette. Sur l’une d’elles, une voix s’apparentant à celle du SP Jagai raconte à un autre policier ce qui s’est produit à Cité Sainte-Claire, soit chez Jacquelin Juliette, lors d’une descente de la brigade antidrogue quelques heures avant sa mort. «Bann-la pe dir linn gagn koutpie dan p*** apre zot finn trangle li. Aster linn al lopital pou sa dimal dan p*** la, linn mor akoz sa.» Sur un autre enregistrement, une voix s’apparentant à celle de l’ancien CP Dip semble donner des instructions au médecin légiste de la police pour que la mort du trentenaire soit attribuée à une cause naturelle sur le rapport d’autopsie. Pour que cette affaire soit tirée au clair, le Directeur des poursuites publiques a jugé nécessaire qu’une enquête judiciaire soit instaurée. Celle-ci a démarré le 28 octobre.
D’atroces douleurs aux parties intimes
À ce jour, plusieurs personnes ont été auditionnées devant le tribunal de Pamplemousses dans le cadre de cette affaire ; l’une des premières a été Monica, l’épouse du défunt. Elle est revenue sur sa dernière journée à ses côtés, expliquant qu’il se serait plaint d’atroces douleurs aux parties intimes après qu’il aurait été brutalisé par un membre des forces de l’ordre. Elle a, cependant, indiqué qu’il aurait refusé de se rendre à l’hôpital pour des soins. Un peu plus tard, Jacquelin Juliette se serait écroulé alors qu’il était chez son 14a, lui-même, fait la Une des journaux en 2022 après avoir été victime de brutalités policières. Il a également été amené à témoigner en tant que témoin et a formulé de graves accusations contre les limiers de l’ADSU ayant effectué une descente au domicile du trentenaire, le jour fatidique, ainsi que contre le médecin légiste de la police chargé de conduire l’autopsie.
Comme Monica, il a raconté que Jacquelin Juliette souffrait atrocement mais refusait de se rendre à l’hôpital, étant bien trop préoccupé par le sort de son frère, qui avait été appréhendé pour trafic de drogue ce jour-là. Il allègue que les forces de l’ordre lui auraient fait signer des documents vierges, qu’elles auraient, par la suite, remplis pour indiquer que la famille de la victime de souhaitait pas avoir recours à un médecin du privé pour une autre autopsie. Auditionné à son tour, le Senior Enquiry Officer de l’Independent Police Complaints Commission (IPCC), Mumtaz Ali Chamroo, a, pour sa part, indiqué que l’enquête menée par la commission avait conclu qu’il n’y avait eu aucune trace de brutalité policière. Les travaux reprendront le 21 janvier prochain.
Bien qu’elle ne sache pas encore quel sera le dénouement dans cette affaire, Monica, la veuve de la victime, continue d’y croire : «Mo espere ki lazistis pou fer so travay. Mem si li pran letan, mo pou kontign lager pou ki mo misie kapav repoz an pe pou ki mo fami ousi kapav gagn so trankilite».