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Par Rehade Jhuboo
21 avril 2025 01:30
Vingt ans sur la même feuille de match, ou presque. En signant à la rédaction de 5-Plus dimanche en 2007, alors basée à la rue Brown Sequard, à Port-Louis, j’ai eu le sentiment d’être un joueur réalisant un transfert de rêve. Après avoir fait mes classes et usé mes premiers crampons dans une autre division chez le regretté Impact News – une étape cruciale où j’avais appris la discipline tactique du journalisme et décrypté les schémas de jeu nécessaires à la fabrication d’un journal –, je débarquais dans un club d’une autre dimension comme lors d’un mercato.
Je misais gros sur ce bagage technique pour gagner ma place de titulaire au sein de cette nouvelle formation prestigieuse. Car 5-Plus dimanche, ce n’est pas juste un journal ; c’est une institution légendaire, qui a vu défiler des Ballons d’Or de la presse mauricienne. À mes yeux, il avait l’aura d’un Real Madrid ou l’âme d’un Liverpool.
Passionné de ballon rond comme je l’étais, chaque journée de travail se transformait en une préparation de match. Se rendre à la rédaction, c’était comme rejoindre le centre d’entraînement ou entrer sur le terrain. Le fameux escalier en bois menant aux locaux avait même des airs du tunnel mythique d’Anfield, celui que les joueurs de Liverpool et leurs adversaires empruntent avant d’entrer sur la pelouse. Pour le supporter des Reds que je suis, le décor était planté et l’inspiration ne manquait jamais. Il ne manquait plus qu’une plaque «This is 5-Plus» au-dessus de nos têtes, pour parfaire l’illusion.
Et nos supporters ? Ce sont nos lecteurs. Un public fidèle mais exigeant, qui nous porte chaque semaine autant qu’il analyse nos performances, décortiquant nos écrits comme les meilleures actions de jeu. Au sein de l’effectif de 5-Plus dimanche, les journalistes sportifs ne bénéficient d’aucun traitement de faveur sur le plan tactique. Nous sommes tous convoqués aux mêmes briefings d’avant-match : les conférences de rédaction, cruciales pour échanger les idées et définir la stratégie collective.
C’est là que la rédactrice en chef, notre coach principale, distille ses consignes, souvent épaulée par son adjointe, tel un entraîneur sur son banc. Sa mission : lire le jeu en permanence et adapter le dispositif. Car notre adversaire direct, c’est l’actualité, un joueur insaisissable qui peut changer le cours du match à tout moment. Le plan de jeu établi le matin peut ainsi être rendu caduc par un fait nouveau avant même la mi-temps de l’après-midi.
Il y une équipe de staff technique, qui, dans le cas d’un journal, est incarnée par les secrétaires de rédaction, les correcteurs, les photographes et les graphistes, qui sont un maillon très essentiel dans la fabrication de chaque édition. Le public connaît les Salah, Ronaldo ou Mbappé et les jugent mais ne savent pas que tout ce beau monde est épaulé en coulisses.
Sur le terrain de l’information, nous sommes des coéquipiers : on mouille le maillot ensemble pour aller chercher la victoire, et on encaisse les défaites collectivement. L’esprit de vestiaire est fondamental : on reste soudés, on s’entraide. C’est le collectif qui prime ; faire la passe décisive dans l’intérêt de l’équipe est une seconde nature. On s’échange les informations clés, les contacts précieux, comme on distillerait une ouverture lumineuse vers un partenaire démarqué.
Il n’est d’ailleurs pas rare de voir un défenseur central comme Virgil Van Dijk monter aux avant-postes pour inscrire le but de la victoire. C’est exactement l’esprit 5-Plus dimanche : un journaliste de la rubrique sportive peut être sollicité pour aller prêter main-forte sur un sujet d’actualité générale brûlant. Entre collègues, on maîtrise l’art de la passe courte comme celui de la transversale millimétrée. C’est cette fluidité dans le jeu collectif, cette solidarité à toute épreuve, qui constituent notre véritable force.
Chaque début de semaine sonne le coup d’envoi d’une nouvelle semaine de compétition, un nouveau match à préparer méticuleusement, car nos supporters – nos lecteurs – attendent notre performance chaque dimanche. Nous ne soulevons peut-être pas de trophées, mais notre plus grande fierté, notre Ligue des Champions à nous, c’est de vous savoir accompagnés : grâce à nous, vous ne marchez jamais seuls («you’ll never walk alone») le dimanche, votre rendez-vous lecture étant assuré.
Le FC Barcelone a pour devise «Més que un club» (Plus qu’un club). Dans cet esprit, 5-Plus dimanche est, et a toujours été, bien plus qu’un simple journal, on est une équipe, bref, une famille. Cela dure depuis 35 ans, avec moi comme un footballeur qui suis entré en cours de match.
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