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Dans la peau d’un séropositif…

3 décembre 2014

Den, Emilie et Nagim se battent contre la maladie au quotidien.

Une maladie qui a tendance à créer des mythes, de la discrimination ou de la stigmatisation. Le sida (syndrome d’immunodéficience acquise) est un ensemble d’infections rares et de cancers qui surviennent chez des personnes ayant un système immunitaire très faible. Le sida est, en effet, la conséquence grave du stade avancé du VIH. Nous avons recueilli les témoignages de trois séropositifs qui se confient entièrement, expliquant comment ils ont appris qu’ils étaient porteurs du virus. Ils parlent également de leur vie au quotidien, de la réaction de leur entourage, dans le milieu professionnel, et de toutes les difficultés rencontrées à cause de leur séropositivité.

 


Nagim M, 41 ans, père de deux enfants, vivant séparé de sa femme, a appris qu’il était séropositif en 2005. «Ce fut un choc énorme pour moi d’apprendre que j’étais séropositif. Je croyais que j’étais condamné à mort.» Cette nouvelle a complètement bouleversé son existence. «Après l’annonce de la maladie, ma vie a été chamboulée, ma famille a commencé à s’éloigner de moi et c’est là que ma femme s’est séparée de moi», confie Nagim, avec tristesse.

 


Repoussé par ses proches, il finira par se retrouver à la rue pendant une année entière. «C’est à ce moment-là que les gens de PILS m’ont approché. Maintenant, je me sens mieux dans ma peau, cela a été un nouveau départ pour moi, après les conseils et les cours de soutien offerts par l’association.» Afin de rester en bonne santé et dans l’espoir de vivre plus longtemps, Nagim suit des traitements au quotidien. Il déplore toutefois une chose : «La stigmatisation qui se fait dans le domaine hospitalier, car le regard des autres nous affectent beaucoup.» La stigmatisation, il en est aussi toujours victime dans son entourage, malgré les précautions qu’il prend tous les jours et ses tentatives pour sensibiliser les autres à ce qu’il a appris.

 


Malheureusement, dit-il, «je me retrouve parfois dans des situations où certains proches ne boivent pas dans le même verre que moi, ont peur de me faire un bisou ou de partager une assiette avec moi, par crainte de contracter la maladie. Malgré tout, on m’accepte petit à petit dans la famille. De plus, j’aide mon père de 86 ans au quotidien». Un conseil que Nagim aimerait donner aux citoyens : «Il faut s’informer sur la maladie au lieu de stigmatiser les gens, car une majorité de séropositifs souffrent de dépression à cause du regard des autres.» Selon lui, cette maladie «pa get figir ek mo bien tris zordi zour akoz mo bann zanfan pa vinn get mwa, sirtou kan ena fet leker fermal.»

 


Beaucoup de séropositifs ont hélas appris leur maladie alors qu’ils étaient en train de vivre des étapes difficiles dans leur vie. C’est le cas d’Émilie (prénom fictif), 36 ans, mère de cinq enfants. «Il y a huit ans on m’a appris, lors d’un test médical, que j’étais séropositive», témoigne-t-elle. Bien que la nouvelle a eu l’effet d’une bombe et que les traitements antirétroviraux qu’elle suit maintenant demandent un suivi au quotidien, cette mère de famille essaie de rester forte. «Je ne me suis pas laissée abattre par l’annonce, car bien qu’on ne puisse pas en guérir, je vis très bien au quotidien. Mon état de santé s’est amélioré avec les médicaments.»

 


Elle œuvre maintenant au sein d’une association afin d’apporter son soutien à d’autres femmes comme elle : «J’essaie autant que possible de sensibiliser les travailleuses du sexe à l’usage du préservatif et aux tests de dépistage pour la prévention.» Du soutien, elle-même en reçoit de la part de ses enfants et de sa famille. La chose qu’elle trouve dommage, c’est «le manque de personnel médical formé afin d’aider les séropositifs à suivre leurs traitements. On entend aussi souvent des commentaires comme : “Ou séropositif, vedir ou drogue ou enn travayer du sexe”. Ce n’est pas bien de coller ainsi des étiquettes».  

 


Den Ramasamy, vice-président de Ravanne Océan Indien, a, lui, appris qu’il était séropositif en 2005. «Ce fut réellement un choc pour moi, je pensais que j’allais mourir», lance-t-il. Avec le temps, il a vraiment pris conscience de ce qu’était le sida. «Je me suis renseigné afin d’éclairer mon entourage et ma qualité de vie s’est améloirée avec les traitements.» Toutefois, Den doit être doublement vigilant, car il souffre aussi d’hépatite C (co-infection). «Je dois éviter de me stresser, car autrement mes défenses immunitaires vont baisser. Par ailleurs, les personnes malades, par exemple celles atteintes d’une grippe, doivent faire attention à ne pas me contaminer.» Il regrette aussi que les traitements pour l’hépatite C ne se fassent pas dans le service hospitalier à Maurice. «J’ai dû me rendre à La Réunion pour mes traitements», dit-il.

 


Comme beaucoup d’autres Mauriciens, Den, Emilie et Nagim se battent non seulement contre la maladie, mais aussi, hélas, contre les discriminations liées au VIH.

 


 


Une campagne pour lutter contre la discrimination

 


«HIV doesn’t discriminate. People do. Let’s change the way we see it.» Une campagne contre la stigmatisation et la discrimination a été lancée par la Standard Chartered Bank, le 21 novembre, afin de changer le comportement vis-à-vis des personnes séropositives. Elle est surtout axée sur trois principaux messages : «Accept», «Respect» et «Support». Selon le Dr Amita Pathack, National AIDS Coordinator de la National Aids Secretariat (NAS), il reste encore du chemin à parcourir pour que ceux atteints de VIH soient traités comme les autres. «La stigmatisation est une barrière qui empêche ceux souffrant du VIH/SIDA d’avoir un accès adéquat au traitement. Nous voyons que les femmes souffrent encore plus que les hommes du regard des gens.» La campagne est visible sur les billboards jusqu’au 1er décembre, qui marquera la Journée mondiale de la lutte contre le Sida.

 


 

Nicolas Ritter, directeur exécutif de PILS, et Sridhar Nagarajan, Chief Executive Officer de Standard Chartered Mauritius.

 



Questions à Nicolas Ritter (Directeur Exécutif de PILS)

 


Quels sont les nouveaux traitements existants pour le VIH ?

 


On a aujourd’hui des antirétroviraux de plus en plus puissants, avec moins d’effets secondaires, qui ne sont pas encore disponibles à Maurice. Nous avons des médicaments beaucoup plus efficaces et moins lourds mais, malheureusement, on meurt toujours du sida aujourd’hui. Et ce n’est pas à cause des traitements, mais parce que les gens ne se font pas dépister.

 


Pensez-vous que l’île Maurice pourra un jour éradiquer le VIH. Si oui, comment ?

 


Je suis confiant que l’île Maurice pourra un jour éradiquer le VIH. Nous sommes un des rares pays où ce rêve peut être concrétisé vu la superficie de l’île, notre niveau d’éducation et surtout du fait que les soins sont gratuits. Il faut aussi prendre en compte le faible nombre de personnes souffrant du VIH et c’est une des raisons pour lesquelles nous pouvons tout à fait espérer bloquer l’épidémie d’ici 10 ans.

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