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Par Yvonne Stephen
14 juin 2025 18:39
Ça se frite ! Au sein du mouvement fervent défenseur de la légalisation et de la dépénalisation du gandia, ce ne sont pas que des good vibes… Pa siloy !
File-t-il un mauvais… joint ? Le Kolektif 420, connu pour son engagement pour la légalisation/dépénalisation du gandia, vit des moments kas nisa ! Après deux marches à Rose-Hill (d’abord, contre les drogues dures/synthétiques, ensuite, pour la dépénalisation/légalisation du gandia), il y a eu le refus de la municipalité de Port-Louis de lui accorder un droit au rassemblement pour le dimanche 1er juin et l’annulation de la grève de la faim entamée le samedi 7 juin (voir ci-contre). Mais aussi, et surtout, le retrait de trois présidents, dont plus récemment, Julien Rivet et Nathalie Samine Dupré, qui se confie ci-contre et qui accuse le fondateur du mouvement, Jameel Peerally, de l’avoir éjectée. Elle dénonce l’opacité dans la gestion du groupe et des fonds. Ainsi que l’absence d’enregistrement officiel du mouvement qui aurait permis plus de «transparence et de structure», estime-t-elle.
De la Thaïlande, où il se trouve actuellement, Jameel Peerally répond aux accusations de Nathalie Samine Dupré, artiste engagée. Il rappelle que, même «en mission», il participe activement aux prises de décision et que le Kolektif n’est en rien une autocratie. Pour lui, les récentes «démissions» ont été motivées par des problèmes de gestion d’argent, avec des personnes qui ont «misuse the money». Il évoque notamment Rs 15 000 détournées pendant trois jours – une somme, dit-il, restituée sous pression. La personne concernée conteste ces accusations. Jameel Peerally, lui, parle aussi d’insultes et de menaces.
Le groupe vit, explique-t-il, grâce aux dons de particuliers qui soutiennent la cause : «Il n’y a pas beaucoup d’argent, mais quand même.» Des informations émanant de ceux.celles qui ont quitté le groupe font état de transfert de cet argent sur le compte en banque de Jameel Peerally : «De petites sommes, oui. Ça a pu arriver, mais pas souvent. D’abord, il faut payer pour les conférences de presse ! Et je suis en mission pour les futures générations, pour mon pays. C’est normal qu’il y ait des dépenses.» En quoi consiste cette mission ? Nous n’en saurons pas plus. Samal Bundhoo estime que la discrétion doit être le maître-mot. Oui, même pour un Kolektif qui s’est donné une mission publique : «Nous connaissons, dans le groupe, les actions de Jameel Peerally ; ça a des coûts et nous l’acceptons. Je ne peux rien divulguer du travail de notre fondateur. Je peux simplement dire qu’il œuvre pour que la jeunesse puisse consommer du naturel.» Concernant la façon dont les fonds sont utilisés, il dit ne pas comprendre les critiques : «Si, par exemple, je fais des démarches pour le Kolektif, n’est-ce pas logique qu’on me rembourse mon transport ?» L’important, aujourd’hui, dit-il, c’est le combat. Pas les divergences d’opinion ou les allégations.
What next pour le Kolektif 420 ? Son enregistrement formel comme une association reconnue ? «Nous travaillons dessus», lance-t-il. L’actuel président, nous rappelle qu’il ne «faut pas dévoiler» la stratégie du groupe : «Plus les gens ont des informations en avance, plis zot blok nou.»
Sa grève de la faim a été suspendue - Samal Bundhoo : «Aucun enfant n’est à l’abri»
Le samedi 7 juin, le président du Kolektif 420 décidait d’entamer une grève de la faim pour se faire entendre des autorités. Néanmoins, le kiosque du jardin de la Compagnie, reconnu, explique Samal Bundhoo, comme étant l’esplanade des Droits humains (qui en a connu des combats !) leur a été refusé.
«Plus de place !» «La police nous a forcés à arrêter la grève. Nous n’avons pas compris pourquoi. Ce kiosque est un espace de combat reconnu. La mairie n’avait pas le droit de se prononcer sur notre occupation de ce haut lieu symbolique. Nous avons essayé d’obtenir un "asile" auprès de la cathédrale ; cela a été refusé. Les autres églises de la capitale que nous avons contactées ne nous ont toujours pas répondu. Il n’y a donc plus de place pour mener une grève de la faim à Port-Louis. Avec certainement le concours des politiciens en place ! Ena enn sitiasion bien grav, zot pe blok nou, pe anpes nou fer ek dir seki bizin!»
Pourquoi il a fait ce choix. «J’ai décidé de quitter ma maison dans le Sud et d’arrêter de manger pour mon pays. La situation est alarmante. On ne peut plus dire que telle ou telle région est affectée ; les ravages sont partout. Aucun enfant n’est à l’abri. J’ai pris cette décision parce que tous les jours, je vois des jeunes qui tombent dans la drogue. Tous les jours, des mamans nous appellent et pleurent : elles racontent l’horreur des situations auxquelles elles font face. Les autorités ne trouvent aucune solution. Il paraît ki zot pa anvi trouv okenn solision !»
«J’ai été trompé». «Je suis tombé dans cet enfer moi aussi. J’ai été trompé. On m’a présenté la drogue synthétique comme étant du zamal. Je me suis laissé prendre. Heureusement que je n’ai pas totalement sombré. Zordi mo kapav dibout. Alors, je parle, je me bats pour les gens qui ne savent pas. Certains trafiquants trempent du synthétique dans du gandia ou trafiquent les feuilles. Ou krwar ou pe pran natirel, mais non. C’est de la trahison. Il faut le dire, sinon les gens continueront à se faire piéger.»
Nathalie Samine Dupré : «J’ai été remplacée sans discussion ni vote»
Vous n’êtes plus la présidente du Kolektif. Que s’est-il passé ?
Je n’ai jamais démissionné. J’ai simplement été remplacée sans discussion ni vote. C’est Jameel Peerally qui a pris cette décision unilatéralement. J’ai mis du temps à comprendre ce qui se passait, mais il est clair que cela ne s’est pas fait dans la transparence.
Quelles sont vos divergences avec la direction actuelle du Kolektif ?
Il n’y a pas de fonctionnement démocratique. Toutes les décisions viennent du fondateur. Il n’y a pas non plus de clarté sur les finances, ni de structure formelle, car le groupe n’est même pas enregistré. Je pense qu’une cause aussi importante mérite une organisation solide, transparente et respectueuse. Il faut se battre pour la légalisation, mais sans instrumentaliser des conflits personnels avec des politiciens.
Pourquoi est-ce, selon vous, une question de santé publique ?
Interdire le cannabis ne protège pas. Cela expose au contraire les consommateurs à des produits dangereux du marché noir, comme la drogue synthétique. C’est une urgence de santé publique, mais aussi de justice. Le gandia n’a jamais été dangereux en soi. Il a été interdit pour des raisons politiques et économiques, au profit des mafias, des industries pharmaceutiques, de l’alcool et du tabac. Ce sont les plus vulnérables – jeunes, personnes précaires, Rastas – qui en paient le prix. La légalisation mettrait fin à cette injustice, à la stigmatisation et permettrait une consommation encadrée, tout en reconnaissant ses bienfaits médicaux et environnementaux.
Comment continuez-vous votre combat ?
Je poursuis mon engagement à travers d'autres associations sérieuses. Nous préparons un calendrier d’actions collectives avec des artistes et des ONG pour continuer à sensibiliser. Nous rappelons au gouvernement sa promesse électorale d’ouvrir le dialogue autour de la légalisation. Je suis aussi investie dans Mozorey, Mozepol, un mouvement de femmes de toutes croyances, qui utilisent le cannabis à des fins thérapeutiques. Cette consommation maîtrisée permet de soulager le stress, la dépression, l’insomnie, les douleurs menstruelles, l’endométriose et même le baby blues ou la dépression post-partum. Il est temps de sortir du tabou et d’apporter des solutions humaines.
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