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Enquête judiciaire au tribunal de Souillac

Le Dr Sudesh Kumar Gungadin : «Pravin Kanakiah était déjà mort lorsque son corps est tombé à l’eau»

26 février 2025

Le chef du département médico-légal de la police quittant le tribunal de Souillac après son audition devant la magistrate Ameerah Dhunnoo. Photo : Jean Marie Gangaram  

Le rapport d’autopsie du Dr Sudesh Kumar Gungadin sur Pravin Kanakiah a été décortiqué dans les moindres détails au tribunal de Souillac où le Directeur des poursuites publiques a initié une enquête judiciaire pour faire la lumière sur les circonstances troublantes entourant le décès du fonctionnaire. Le Chief Police Medical Officer a évoqué deux thèses après la découverte du cadavre de l’habitant de Plaine-Magnien, à la Roche-qui-Pleure, le 11 décembre 2020. La première est que sa tête a pu heurter une surface dure, causant sa mort. La seconde est une possibilité de foul play. Il a expliqué que le défunt est mort après avoir reçu plusieurs coups à la tête avec un objet dur. Il a aussi affirmé que la victime avait déjà rendu l’âme lorsque son corps est tombé à l’eau. Récit.

La dernière séance de l’enquête judiciaire initiée au tribunal de Souillac sur le décès troublant de Pravin Kanakiah a été très riche en révélations. Pour cause : on en sait un peu plus sur les circonstances entourant la mort de cet ancien fonctionnaire du ministère des Finances. La dépouille de ce Procurement & Supply Officer affecté à la Government Analyst Division, à Réduit, avait été retrouvée à la Roche-qui-Pleure, le 11 décembre 2020, au lendemain de sa mystérieuse disparition. Dans son rapport d’autopsie, le Dr Sudesh Kumar Gungadin a attribué son décès à une «traumatic subarachnoid haemorrhage». Le Chief Police Medical Officer a été auditionné devant la magistrate Ameerah Dhunnoo à ce sujet. Il est catégorique. 

La mort de l’habitant de Plaine-Magnien n’est pas «of natural origin». Elle est due à un «trauma». Dans son rapport de cinq pages, il évoque deux thèses pour soutenir la cause du décès. Selon le Dr Gungadin, Pravin Kanakiah a, entre autres, eu des saignements «over the surface of the brain» causés par un mouvement violent du cerveau. Lors de son interrogatoire par Me Damodarsingh Bissessur, Senior State Counsel, il a évoqué deux possibilités. La première est qu’il est mort lorsque sa tête a «hit a hard surface». La seconde est que le fonctionnaire a succombé à ses blessures à la suite de «blunt forces applied to the head at various places». Le chef du département médico-légal de la police n’écarte pas la possibilité que le défunt ait été victime d’un foul play. 

Fait marquant : le défunt avait un total de 16 blessures sur le corps. Il n’avait toutefois aucune fracture au crâne, aux jambes, aux bras ou aux autres membres. «La victime ne s’est pas noyée à la Roche-qui-Pleure. Pravin Kanakiah était déjà mort lorsque son corps est tombé à l’eau», a affirmé le Dr Gungadin. Selon ses dires toujours, Kanakiah a eu certaines blessures avant de mourir. Il en a eu d’autres pendant et après la mort. Il se serait aussi fait des «post mortem injuries» lorsque son corps a eu des frictions avec les récifs, à la Roche-qui-Pleure. Le Dr Gungadin a aussi déclaré que «the pattern of the injuries are obvious». Il a également déclaré en cour que les dents de Pravin Kanakiah étaient intactes. Il ne s’était pas mordu la langue. 

Le fonctionnaire avait uniquement une lacération d’un centimètre au «upper lip». Ses cartilages étaient également intacts de même que son cou. «There was no compression of the neck or pressure applied to the neck», a souligné le Dr Gungadin. Le pelvis de Kanakiah est resté intact après la chute de même que sa colonne vertébrale. À un certain moment,  Me Bissessur a voulu savoir si Kanakiah était encore vivant ou déjà mort lorsqu’il est tombé à l’eau. Le médecin-légiste a martelé que la victime «has most likely passed away» avant d’entrer en contact avec l’eau de mer. «This is not a case of drowning», précise le Dr Gungadin. Et d’ajouter : «Il n’y avait pas d’eau dans les poumons du défunt.» 

L'heure du décès

Me Bissessur a également voulu connaître l’heure du décès de Kanakiah. Le Dr Gungadin a toutes les raisons de croire que le Procurement & Supply Officer est mort aux alentours de 12 heures le 10 décembre 2020, tout en précisant que «the science to estimate time of death is not an exact science». Selon ses dires toujours, le décès  de Kanakiah pourrait avoir eu lieu trois heures avant midi ou trois heures après midi. Il est toutefois sûr d’une chose : la dépouille du fonctionnaire «was in an early state of decomposition». Il est ensuite revenu à la charge en précisant qu’il n’y a que deux thèses pour justifier la cause du décès : un violent coup à la tête ou un coup survenu lorsque la tête du défunt a heurté une surface en dur.  

«Blunt forces are more plausible ?» lui a demandé Me Bissessur. «Yes but I cannot rule out the first possibility», a répliqué le Dr Gungadin. Et d’ajouter : «Foul play cannot be excluded, but it is the investigating officer who is the right person to confirm the same.» La magistrate Ameerah Dhunnoo a ensuite pris le relais en adressant des questions supplémentaires au principal témoin du jour. Le Dr Gungadin a alors expliqué que le défunt avait eu plusieurs blessures avant de mourir, que la plupart «were on the top of the body» et qu’il est plus logique qu’il y ait eu des «blunt forces» au lieu de la possibilité que la tête ait «hit a hard surface» après une lourde chute. Autre fait marquant : les blessures «were not self-inflicted»

«Est-ce que Pravin Kanakiah est tombé ou une ou plusieurs personnes l’ont poussé ?» a voulu savoir Me Ameerah Dhunnoo. «Je ne suis pas en mesure de dire quelle thèse est la plus probable. Le responsable de l’enquête est mieux placé pour répondre à cette question», a affirmé le Dr Gungadin à la fin de son audition. Outham Appadoo, le beau-frère de Pravin Kanakiah, a ensuite été appelé à la barre des témoins. Cet habitant de Trois-Boutiques a nié avoir évoqué la thèse du suicide à la police. Il a également émis des doutes sur une déposition qu’il avait consignée au poste de police de Souillac. La signature apposée sur le document en question ne serait pas la sienne, a-t-il dit. Il est ensuite revenu sur la soirée de la mystérieuse disparition de son beau-frère.

Toute la famille s’était réunie chez lui, à Trois-Boutiques, ce jour-là, pour célébrer le premier anniversaire de son fils. «Ti ariv enn moman kot mo bofrer ti gagn enn call telefonn. Li pa dan so labitid sa, sorti pou al koz dan so loto. Li abitie pran so bann call divan nou», s’est souvenu le Sudiste. Les travaux de l’enquête judiciaire se poursuivront le 21 mars à 13h30, avec la deuxième audition d’Outham Appadoo. Hemandass Ghoorah, ancien responsable de la Major Crime Investigation Team, sera également appelé à la barre des témoins ce jour-là. Le Dr Satish Boolell sera lui auditionné, le 24 mars. Ce dernier a pratiqué une contre-autopsie. Il a également conclu à une hémorragie.

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