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Enquête judiciaire au tribunal de Souillac

Le SP Goorah : «Pravin Kanakiah s’est suicidé car il était endetté»

13 mai 2025

L’ancien homme fort de la MCIT South explique que la police a traité cette affaire comme un meurtre avant de privilégier la thèse du suicide.

L’audition de l’ancien responsable de la Major Crime Investigation Team (MCIT) South s’est poursuivie durant la semaine écoulée au tribunal de Souillac où se tiennent les travaux de l’enquête judiciaire instituée par le Directeur des poursuites publiques (DPP) pour faire la lumière sur le décès troublant de Pravin Kanakiah. Le surintendant de police Goorah, responsable de l’enquête après la découverte du corps sans vie de ce fonctionnaire à la Roche-qui-Pleure le 11 décembre 2020, a déclaré en cour que la thèse officielle de la police reste le suicide. Récit.

La police campe sur sa position par la voix d’Heyman Dass Goorah. Ce surintendant de police (SP) a été auditionné une nouvelle fois le 6 mai dernier devant la magistrate Ameerah Dhunnoo qui préside les travaux de l’enquête judiciaire instituée par le DPP au tribunal de Souillac pour faire la lumière sur les circonstances troublantes entourant le décès de Pravin Kanakiah. Ce fonctionnaire était porté disparu depuis la soirée du 10 décembre 2020 ; sa famille avait alerté la police car elle n’avait plus eu de ses nouvelles après qu’il était sorti pour se rendre à son bureau, à Réduit. La police avait découvert son corps sans vie le lendemain, à la Roche-qui-Pleure, à Souillac. Le SP Goorah était le Supervising Officer de l’enquête à la MCIT South. Il a expliqué que c’est l’ex-constable Govinden qui était le Main Inquiring Officer dans cette affaire.

Me Damodarsingh Bissessur a axé toutes ses questions du jour sur la thèse officielle de la police. Le Senior State Counsel a également interrogé le limier sur d’autres détails importants relatifs à l’enquête policière, notamment le relevé des appels téléphoniques du défunt ainsi que le visionnage des images des caméras de vidéosurveillance à Réduit et à la Roche-qui-Pleure. «Pravin Kanakiah s’est suicidé car il était endetté», a déclaré le haut gradé. Il a précisé que la police est arrivée à cette conclusion après avoir pris en considération des informations fournies par Uttam Appadoo, le beau-frère de Pravin Kanakiah, le jour de la découverte macabre. Celui-ci aurait également déclaré que Pravin Kanakiah «ti pe sibir boukou presion dan travay». Selon le SP Goorah, le jeune homme devait être transféré et «was not happy with».

Un sergent de police affecté au poste de police de Souillac aurait consigné une déposition du beau-frère en question ce jour-là. Dans celle-ci, il aurait notamment déclaré : «Mo pa panse ki dimounn inn fer li kit mesanste.» Il se serait toutefois rétracté par la suite. Le SP Goorah a avancé qu’Uttam Appadoo a dit à la police que son beau-frère «committed suicide» à cause de ses dettes. Selon la police, le défunt avait des dettes dont un home loan de plus de Rs 3 millions contracté à la State Bank of Mauritius pour la construction de sa maison à Plaine-Magnien. Le SP Goorah a également avancé que le fonctionnaire avait acheté deux iPhones «on a hire purchase scheme» qu’il n’avait pas encore «settle».

Uttam Appadoo a toutefois émis des doutes concernant le contenu de la déposition que la police assure qu’il a faite. Lors de son audition devant la magistrate Dhunnoo, il a affirmé que la signature apposée au bas dudit document n’est pas la sienne. Il a déclaré en cour que son beau-frère n’avait aucune raison de se suicider. Le SP Goorah a alors précisé que la police privilégie la thèse du suicide après avoir également pris en considération le fait qu’il n’y avait aucun élément pour soutenir un foul play. Il a confié que la police a eu une approche holistique dans cette affaire.

Salaires suffisants

Me Bissessur lui a alors fait comprendre que la thèse du suicide à cause de ses dettes ne tient pas la route car le fonctionnaire n’avait pas de retard de paiement pour son emprunt. Le limier a alors concédé que Pravin Kanakiah et son épouse avaient des salaires suffisants pour couvrir les dépenses mensuelles. Pressé de questions sur le relevé des appels téléphoniques du défunt jusqu’à sa mystérieuse disparition, le SP Goorah a fait d’autres révélations surprenantes. Alors que plusieurs témoins ont affirmé que le comportement de Kanakiah avait changé après qu’il aurait reçu un appel d’«enn gran madam» la veille de sa mystérieuse disparition, le haut gradé a expliqué que la MCIT South n’avait pas jugé nécessaire d’interroger les dernières personnes à avoir appelé le fonctionnaire.

Me Bissessur a aussi questionné le SP Goorah sur un autre aspect important de l’enquête policière : le visionnage des images des caméras de vidéosurveillance à Réduit et à la Roche-qui-Pleure. «Les images ne montrent pas clairement que Kanakiah marchait à Réduit vers 8h45. Celles de La Falaise Villa à Gris-Gris ne sont pas non plus claires. La vidéosurveillance n’a pas aidé la police», a regretté le limier. À ce jour, la police ne sait toujours pas comment le fonctionnaire est arrivé à la Roche-qui-Pleure. «Il se peut qu’il ait pris l’autobus de Réduit à Souillac. Une collègue affirme l’avoir vu alors qu’il marchait vers l’arrêt d’autobus après avoir garé sa voiture», a déclaré le SP Goorah.

La police n’a cependant aucune preuve que le fonctionnaire a fait le déplacement en autobus ce jour-là. Le SP Goorah a confirmé que le constable Seedanie n’avait pu l’identifier sur les images de Safe City de Souillac. Me Bissessur a alors voulu savoir si la police avait étudié les éventuelles pistes possibles pour savoir comment Kanakiah était arrivé à Souillac. L’une d’elles est qu’il se serait rendu à Souillac par autobus mais ne serait pas descendu à la gare de cette localité. «Il n’y a pas d’arrêt d’autobus près du dépôt de la CNT. Le chemin mène à Gris-Gris. Il n’y a malheureusement pas de caméra CCTV là-bas», a souligné le SP Goorah. Il a ajouté que la police ne sait pas comment «Kanakiah reached la Roche-qui-Pleure and doing so by using all means available».

Le haut gradé a expliqué que la police est en présence d’un seul témoignage affirmant que le fonctionnaire était vivant dans l’après-midi de sa disparition ; celui du sergent Tapsee. Lors de son audition, ce policier habitant Souillac avait déclaré qu’il faisait son jogging à la Roche-qui-Pleure lorsqu’il avait aperçu Kanakiah aux alentours de 17h30. Selon ses dires toujours, il n’y avait rien de suspect dans le comportement de l’habitant de Plaine-Magnien et il ne présentait aucun signe de détresse non plus. Il avait précisé avoir vu le fonctionnaire à une distance d’environ 25 mètres, dans un «normal state», et que celui-ci avait regardé vers la gauche à un moment, en direction de la mer, pour éviter son regard.

«This implies that a third party could not have taken him there», a fait ressortir le SP Goorah. Me Bissessur lui a alors demandé si la police sait si Kanakiah était familier avec cette région. «I cannot answer that question. There are sugar canes tracks that lead to la Roche-qui-Pleure well known to hikers», lui a répondu le policier. Me Bissessur a voulu savoir si le fonctionnaire était un hiker et le haut gradé lui a répondu par la négative. Selon l’ancien responsable de la MCIT South toujours, Kanakiah aurait «switch off his mobile phone» le jour de sa disparition «to avoid geo positioning».

Le SP Goorah a également souligné qu’au début, la police a traité cette affaire comme un meurtre avant de privilégier la thèse du suicide. «Nous avons enquêté pour savoir si quelqu’un avait des raisons de faire du mal à Pravin Kanakiah mais nous n’avons rien trouvé. En revanche, son beau-frère a indiqué à la police qu’il se serait suicidé à cause de ses dettes. C’est notamment pour cette raison que la police a conclu à la thèse du suicide», a soutenu le SP Goorah. Les travaux de l’enquête judiciaire se poursuivent le 21 mai avec une nouvelle audition de l’ancien homme fort de la MCIT South.

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