La jeune fille est devenue mère mais elle compte tout de même poursuivre ses études.
Elle a porté un enfant pendant sept mois sans savoir, dit-elle, qu’elle était enceinte. Aujourd’hui, celle qui a accouché d’un petit garçon «par surprise», à son domicile, lève le voile sur l’agression sexuelle dont elle aurait été victime et qui aurait été perpétrée par un membre de sa famille qui serait, de ce fait, le père de son enfant.
Il a pointé le petit bout de son nez le 15 juillet. À la totale surprise des habitants de la petite maison en tôle dans laquelle il est venu au monde ce jour-là, aux alentours de 7h30. Car personne dans cette famille qui habite sur les hauteurs d’un faubourg de Port-Louis ne se doutait qu’un petit être allait venir bouleverser leur quotidien. Même pas la mère de l’enfant, Caroline (prénom fictif), âgée de 16 ans seulement. L’adolescente aurait ignoré qu’elle était enceinte jusqu’à l’accouchement du bébé. C’est du moins ce qu’elle a confié à sa mère lorsque celle-ci l’a interrogée après la naissance du bébé.
«Mois après mois, ma fille me disait qu’elle avait eu ses règles et moi je la croyais. De toute façon, je n’allais pas vérifier si elle disait vrai. Mais j’ai eu une grosse surprise, le 15 juillet, lorsqu’elle a accouché», confie la mère de l’adolescente que nous prénommerons Clara. Ce jour-là, il est environ 7 heures lorsque Caroline commence à ressentir de fortes douleurs au ventre. Toutefois, la jeune fille n’en fait pas grand cas, préférant se préparer pour se rendre au collège et passer ses examens du deuxième trimestre. Mais comme les douleurs deviennent de plus en plus intenses, elle décide de s’allonger quelques instants au lit avant de prendre le chemin de l’école.
Elle est loin de s’imaginer alors, à l’en croire, que dans les minutes qui suivent, elle va mettre au monde son premier enfant. «Je me suis allongée. Quelques secondes après, j’ai senti quelque chose qui descendait le long de mes jambes. J’ai hurlé à l’aide. Ma mère s’est précipitée et a vu le bébé. Je ne savais pas que j’étais enceinte. J’avais mes règles régulièrement», explique Caroline. Elle ne réalise toujours pas, dit-elle, qu’elle est devenue maman. Mais qui est donc le père de son nouveau-né ? À cette question, la jeune fille répond que c’est son cousin qui habite dans un village du nord de l’île.
Si, à la police et aux enquêteurs de la Child Development Unit, elle a confié qu’elle avait eu des relations sexuelles avec ce dernier en décembre 2012, à l’équipe de 5-Plus dimanche, qui l’a rencontrée jeudi, elle a affirmé que le cousin en question l’avait violée. «Ce jour-là, j’étais chez mon oncle, où vit aussi mon cousin. Je me trouvais dans une chambre, en train de changer mes vêtements, lorsque mon cousin est entré dans la pièce, m’a jetée à terre, et a mis sa main sur ma bouche pour m’empêcher de crier avant d’abuser de moi. Je n’ai rien dit à personne car il avait menacé de me faire du mal et j’avais très peur», confie l’adolescente sous le regard de sa mère qui tombe des nues face aux révélations choquantes de Caroline.
Car à elle aussi, cette dernière avait simplement déclaré avoir eu des relations sexuelles avec le jeune homme sans parler de viol. Mais la jeune fille dit-elle la vérité ? C’est en tout cas ce que sa mère tente de savoir à ce stade, car elle semble être dans le flou total. «Pa met tass lor zanfan dimoun. Dir la verite. Ena prison ladan», conseille-t-elle à sa progéniture qui éclate en sanglots. «Je jure que je dis la vérité», murmure Caroline qui pose un regard attendri sur son nouveau-né.
Nous avons aussi appris d’une source proche de l’enquête sur cette affaire que Caroline aurait confié à ses camarades de classe, peu après son admission à l’hôpital Jeetoo où elle a été conduite après son accouchement, qu’elle avait eu des relations sexuelles avec un homme rencontré sur un réseau social. Elle leur aurait confié qu’ils ne s’étaient vus qu’une seule fois. Une version que la jeune fille nie catégoriquement.
Quant à Clara, mère de deux autres enfants âgés de 13 ans et 1 an et demi, elle ne sait plus à quel saint se vouer depuis la naissance de son petit-enfant et l’éclatement de toute cette histoire. Par exemple, pour ne pas perdre la face et éviter que les gens ne jasent trop, elle affirme à qui veut l’entendre que l’enfant est le sien et qu’elle a accouché par surprise. «C’est la honte qui me pousse à agir ainsi. Je ne peux pas dire la vérité à mes voisins de peur qu’ils ne portent de jugement sur ma fille», avoue-t-elle péniblement. D’autant que le présumé agresseur de sa fille ne serait nul autre que son cousin.
À l’amiable
Mais si pour elle, le linge sale de préférence se lave en famille, elle rejette l’idée même d’étouffer l’affaire. Et elle refuse catégoriquement que sa fille se mette en ménage avec le père présumé de l’enfant qui, ce jour-là, est venu supplier Clara afin qu’ils puissent trouver un arrangement à l’amiable. Ce, pour ne pas se retrouver en prison.
«Matante Clara ou sir ou pa pou kapav fer nanie pou moi ?» ne cesse de demander le présumé violeur à la mère de Caroline qui, elle, est bien décidée à camper sur sa position. Danny (prénom fictif), âgé de 25 ans, reconnaît avoir eu des relations sexuelles avec l’adolescente, mais réfute la thèse d’agression sexuelle. «J’ai bien eu des relations sexuelles avec la fille mais à aucun moment je ne l’ai violée. Elle était consentante. D’ailleurs, c’est elle qui a cherché à me voir à plusieurs reprises ce jour-là. J’ai refusé ses avances. Mais j’ai cédé à la tentation sous l’emprise de l’alcool et, aujourd’hui, je le regrette amèrement. D’autre part, je ne suis pas sûr que l’enfant soit de moi. On a eu des rapports sexuels une seule fois et on ne s’est pas revus depuis.»
Et selon le jeune homme, bien que Caroline lui aurait déclaré son amour, cette dernière lui aurait également avoué qu’elle avait quelqu’un d’autre dans sa vie. Questionnée à ce propos, la principale concernée a rejeté les allégations de Danny, affirmant une fois encore qu’elle a été victime d’un horrible viol de sa part.
Tout en continuant à nier avoir violé sa cousine, le présumé agresseur concède, toutefois, que ce n’est pas la première fois qu’il rencontre ce genre de problème. Il y a quelques années, il s’était amouraché d’une adolescente de 16 ans qu’il avait mise enceinte. «Mais on avait pu s’arranger et on vivait ensemble. Mais l’enfant est décédé quelques mois après sa naissance», dit-il. Cette fois, même s’il n’est pas sûr d’être le père de l’enfant, il sera bel et bien poursuivi pour abus sexuel sur mineure.
Quant à Caroline, qui fréquente un collège d’État de la capitale, elle ne semble avoir qu’une idée en tête : reprendre le chemin de l’école et prendre part aux examens du School Certificate dans quelque temps. «Je m’occuperai du bébé», confie sa mère Clara qui veut aussi que sa fille continue ses études. Peut-être qu’un jour, celle qui a accouché sans aucune aide médicale à son domicile, réalisera l’un de ses rêves les plus chers : celui de faire carrière dans la médecine et de revêtir la fameuse blouse blanche.
La série noire continue
Après le terrible drame qu’a vécu une fillette de 4 ans à Rodrigues la semaine dernière, plusieurs cas d’agression sexuelle sur des jeunes de moins de 18 ans ont été enregistrés ces derniers jours. Les agresseurs sont eux aussi, pour la plupart, des adolescents.
● Elle montre du doigt son voisin de 17 ans
Cette adolescente de 16 ans a porté plainte au poste de police de sa localité, le 1er août, pour agression sexuelle. Dans sa déposition, elle accuse son voisin, âgé de 17 ans, de l’avoir violée. Selon les dires de la jeune fille, l’acte se serait déroulé au domicile du jeune homme en janvier dernier.
● Attouchements sexuels allégués à SOS Village
L’affaire a fait grand bruit dans cette antenne de SOS village. Une fille de 13 ans a porté plainte contre un autre résidant du centre, le 31 juillet. Elle a raconté aux enquêteurs que celui-ci, âgé de 15 ans, aurait caressé différentes parties de son corps, le 28 juillet, alors qu’ils se trouvaient à l’arrière d’un bâtiment du foyer.
● Un ado de 14 ans agressé par deux jeunes
Il aurait vécu un véritable calvaire entre les mains de ses deux présumés agresseurs, le 21 juillet. Mais ce n’est que neuf jours après le drame, soit le 30 juillet que le jeune homme est sorti de son mutisme. Il a confié aux enquêteurs de sa localité qu’il a été sodomisé par deux de ses amis, âgés de 17 et 19 ans respectivement.
● Une fillette abusée par son voisin de 16 ans
Cet adolescent de 16 ans se retrouve dans de sales draps. Cet habitant des hautes Plaines Wilhems est accusé d’avoir agressé sexuellement sa petite voisine de 4 ans. Il a été arrêté le vendredi 2 août.
● Enceinte à 16 ans de son petit ami
Elle va devenir mère dans quelques mois. Pourtant, cette jeune fille n’a que 16 ans. Le 1er août, elle a fait une déposition à la police de sa localité disant qu’elle avait eu des relations sexuelles avec son petit ami de 17 ans. Elle a avoué qu’elle était consentante mais l’ado de 17 ans devra tout de même répondre de ses actes devant la justice.
● Une jeune fille de 15 ans dénonce son amoureux
Son nom a été balancé par sa dulcinée. Dans une déposition à la police le 2 août, cette dernière a déclaré avoir eu des relations sexuelles avec son petit ami, qui a le même âge qu’elle, soit 15 ans. La police est à la recherche de l’adolescent alors que la Child Development Unit (CDU), informée de ce cas, mène aussi l’enquête.
● Elle accuse sa mère de la forcer à se prostituer
Son calvaire aurait duré deux longues années. C’est dans une déclaration aux enquêteurs de la CDU, le lundi 29 juillet, que la jeune fille de 16 ans a dévoilé toute sa souffrance. Car elle ne voulait plus être considérée comme une esclave sexuelle, d’autant que ce serait sa propre mère qui l’aurait forcée à se prostituer. La jeune fille a aussi mis au monde un enfant dont le père serait un de ses clients, un habitant de La Ferme, Bambous. La mère est recherchée par la police ainsi que les présumés agresseurs de l’adolescente.
Trois questions à…
Yana Bhageerutty, psychologue du centre Open Mind
Huit cas d’agression sexuelle sur mineurs rapportés en une semaine alors que la plupart des présumés agresseurs sont eux-mêmes des mineurs. Qu’en pensez-vous ?
Le développement de l’adolescent veut aussi dire l’action des hormones sur le système biologique. Quand on y ajoute l’influence des autres cultures qui nous viennent à travers divers modes de communication, on note que les jeunes ont tendance à adopter ces modes de comportement sans toutefois prêter attention aux conséquences. Car l’éducation et l’information sont dispensées et disponibles à travers ces mêmes modes de communications. C’est à se demander ce qui intéresse nos jeunes. Dans ce cas, on peut en déduire que s’engager dans une relation sexuelle en tant que mineur(e) est une flagrante indication que même si le système biologique semble prêt à passer à l’acte, le système psychologique, qui inclut la responsabilité vis-à-vis des précautions, des maladies sexuellement transmissibles et autres facteurs à prendre en compte, ne l’est pas. Et les jeunes, qui semblent ne pas avoir de guide ou d’instance vers qui se tourner pour l’éducation sur les valeurs et ce qui peut être permis et à quel âge, se retrouvent à vouloir suivre la tendance, avec les conséquences mentionnées.
Quel constat faites-vous de la situation ?
Il semble qu’il y a plusieurs facteurs qui ont entraîné l’érosion des valeurs traditionnelles qui, dans le passé, agissaient comme des guides et aidaient les jeunes à se retrouver par rapport à eux-mêmes. Il y avait des rites de passage qui donnaient la permission aux jeunes de s’engager dans diverses activités liées au développement sexuel. De nos jours, il semble que les parents sont eux-mêmes perdus par rapport à la discipline interne de la famille et, de ce fait, ils ont du mal à trouver l’équilibre entre ce qu’ils savent et ce qu’ils constatent de visu dans leur environnement ou encore à travers divers sources, dont les médias. Il y a aussi l’émergence des droits des enfants qui est un concept noble et bien dans certains cas, mais qui semble aussi avoir encouragé les jeunes à se rebeller, à leur manière, en utilisant ces droits comme une force. Ce faisant, il semble que dans certains milieux, ces facteurs ont eu plus de conséquences sur le comportement des jeunes que dans d’autres, où les familles et les communautés sont plus encadrées.
Pensez-vous que l’introduction de l’éducation sexuelle à l’école, prévue pour l’année prochaine, va y changer quelque chose ?
L’éducation, quand elle est bien reçue, est toujours une bonne chose si le programme est adapté au développement de la population pour laquelle il est destiné. Je trouve que pour pouvoir travailler de manière constructive avec les jeunes, c’est vers la famille qu’il faut se tourner. Mais si on veut un changement significatif avec des mesures concrètes d’indication de changement, il faudrait commencer par définir quelles sont les populations les plus à risques ; cerner leurs familles et comprendre la dynamique qui cerne ce groupe particulier ; explorer avec ces familles des plans de changement adaptés à leurs besoins et demandes et, surtout, avoir une action continue consistante qui ne mourra pas avec la première saturation d’information ou une nouvelle problématique émergente. Le résultat ne sera pas immédiat mais si l’on préconise et travaille sur les valeurs intrinsèques des gens, le changement sera plus prolongé et les effets s’étendront au-delà des générations. Donc, pour répondre à votre question plus concrètement, oui, l’éducation est un premier pas, mais l’action ne doit pas s’arrêter là.
La petite Rodriguaise toujours hospitalisée
Elle a souffert le martyre entre les mains de son cousin âgé de 14 ans. Cette petite Rodriguaise de 4 ans a été sodomisée par ce dernier qui l’a ensuite jetée dans des latrines. La fillette doit son salut à une barre de fer à laquelle elle a pu s’accrocher jusqu’à ce que sa mère, affolée par sa disparition, la découvre. Cela s’est passé le vendredi 26 juillet dans un petit village situé non loin de Port-Mathurin. La petite est toujours admise à l’hôpital Queen Elisabeth, où elle a été transportée par la suite, et son état s’améliore graduellement. Pour l’heure, elle ne peut s’alimenter en raison de troubles digestifs découlant de cette agression des plus barbares dont elle a été victime. L’enfant, qui a reçu la visite du chef commissaire Serge Clair et de Sheila Bapoo, ministre de la Sécurité sociale, sera suivie par un psychologue. Le présumé agresseur sera, quant à lui, transféré à Maurice dans le courant de la semaine et placé au Rehabilitation Youth Centre à Beau-Bassin. Car Rodrigues ne dispose d’aucune structure pour le prendre en charge.