Suite à une situation vécue avec une de mes amies, je me pose certaines questions. Nous avons toutes les deux 18 ans et nous sommes amies depuis environ 2 ans. Premièrement, j’ai vu à quelques reprises des filles s’embrasser ou bien danser collées l’une à l’autre lors de fêtes. Lorsque je vois de telles scènes, ça m’irrite. Comment se fait-il que les autres ont l’air de trouver ça cool et d’avoir du fun alors que ce n’est pas mon cas ? L’autre jour, c’est ma propre amie qui a voulu m’embrasser comme ça en public. Nous avions bu de l’alcool et nous nous amusions beaucoup. Elle m’a vraiment prise par surprise car je ne connaissais pas son attirance pour ce genre de choses. Je l’ai donc repoussée gentiment et je suis allée à la salle de bains. Elle s’est excusée plus tard mais nous n’en avons pas vraiment discuté. Je me demande donc qu’est-ce qui pousse les filles à faire ça ? Ont-elles un penchant homosexuel ? Sont-elles bisexuelles ? Ma copine serait-elle bisexuelle alors que je n’ai jamais eu le moindre indice de ça avant ? Moi, je n’ai vraiment pas le goût de faire ce genre de choses, alors je me demande si on peut avoir envie de le faire sans avoir une attirance pour le même sexe. Pourriez-vous m’aider à comprendre, s.v.p ?
Réponse : Les situations que tu rapportes n’ont, à mon avis, rien à voir avec l’homosexualité ou la bisexualité de ta copine. Le fait que deux filles s’embrassent ou dansent ensemble d’une manière suggestive n’est pas un signe d’homosexualité ou de bisexualité. Il n’est pas impossible que ton amie soit bisexuelle mais ça porte plutôt à croire qu’il s’agit d’un comportement visant tout simplement à exciter les garçons. Le fait que deux filles s’embrassent en public est une sorte de nouvelle tendance qui est de plus en plus visible socialement et qui est en train de devenir une mode. D’où vient cette mode ? Elle vient directement de la pornographie qui a pris sournoisement une place de plus en plus grande et s’est immiscée progressivement dans nos mœurs. La pornographie est devenue tellement accessible au niveau international sur Internet qu’elle a exercé une grande influence sur différentes tendances sexuelles et sur nos perceptions de la sexualité. Voici des exemples de choses qui ont d’abord été véhiculées par la pornographie : les j-strings, les piercings, le rasage des organes génitaux, les augmentations mammaires, les relations sexuelles à trois, deux femmes qui s’embrassent et qui ont des activités sexuelles ensemble, etc.
La pornographie a été créée principalement pour exciter les hommes et ne rejoint pas ce qui érotise les femmes en général. Elle est axée sur le plaisir de l’homme au détriment des besoins et de la réalité des femmes. Les hommes ont une sexualité plus génitale alors que pour les femmes, c’est plus sensuel et ça englobe les sentiments. En plus d’envoyer des messages qui assujettissent les femmes au plaisir de l’homme, la pornographie va parfois jusqu’à montrer des scènes dégradantes envers celles-ci. Elle montre des femmes qui ont du plaisir à se faire humilier de la sorte. Ce genre de messages véhiculés exerce nécessairement une influence sur la perception des jeunes sur la sexualité. Garçons et filles qui consomment régulièrement de la pornographie peuvent en venir à concevoir ce qu’ils y voient comme une norme de ce qu’est ou devrait être la sexualité. Mais en réalité, c’est du cinéma et cela ne correspond pas à ce qui se vit dans la réalité ou ce qui représenterait une relation de plaisir mutuel intime et partagé dans la complicité.
La pornographie s’est tellement intégrée à notre culture qu’elle transparaît à travers les vidéoclips des vedettes internationales. On voit couramment des chanteuses ultra sexy en train de danser d’une manière explicite. Les jeunes filles s’identifient à celles-ci et ont tendance à vouloir les imiter pour avoir l’air «cool» elles aussi. Les messages véhiculés dans ces vidéoclips mais aussi de plus en plus dans les différents médias sont que le sexe est devenu banal et que c’est «hot» de se montrer ouverte sexuellement. Les filles misent sur leur corps pour susciter l’intérêt plutôt que sur l’ensemble de leur personnalité. Le sexe a tellement été banalisé qu’on le voit partout et qu’il est devenu public, comme si son caractère intime perdait de la valeur. Un bon exemple de ce phénomène : les baisers que Madonna a échangés avec Britney Spears et Christina Aguilera lors des MTV Video Music Awards. Le sexe ainsi banalisé exerce nécessairement une influence chez les jeunes qui ont le souci de correspondre à la norme pour être acceptés par leurs pairs. Ils peuvent être confrontés à l’adoption de comportements uniquement pour avoir l’air «cool» afin de faire partie de leur groupe d’amis. Pour attirer les garçons et correspondre à cette image «cool», les filles peuvent donc être amenées à reproduire ce comportement qui consiste à s’embrasser pour exciter les garçons. Toutefois, ce ne sont pas toutes les filles qui sont prêtes à faire ça et il est tout à fait légitime de refuser de s’engager dans une telle pratique.
Devant cette nouvelle vague d’activités sociales sexualisées, les jeunes peuvent être amenés à adopter des comportements sexuels dans les fêtes, sous l’effet de la consommation de boissons alcoolisées et avec l’influence des autres jeunes. Des comportements sexuels avec des personnes de même sexe peuvent donc avoir lieu, ce qui peut créer de la confusion chez eux par rapport à leur orientation sexuelle. Voici quelques informations supplémentaires à ce sujet. Premièrement, l’orientation sexuelle d’une personne ne se détermine pas seulement à partir de ses comportements. Il y a, en effet, de nombreuses personnes qui vont avoir des expériences homosexuelles sans que cela signifie qu’elles sont effectivement homosexuelles ou bisexuelles. Elles peuvent avoir envie d’essayer une seule fois par curiosité. D’autres vont vivre des expériences sexuelles avec des personnes de même sexe pendant une certaine période de leur vie seulement et vont, par la suite, avoir des comportements exclusivement hétérosexuels. D’autres encore peuvent en faire l’expérimentation dans le cadre d’une relation sexuelle à trois, par exemple. On peut se laisser entraîner dans de telles circonstances sans qu’on ait déjà eu de telles envies avant. Le fait de consommer de l’alcool ou de la drogue altère les inhibitions et peut amener une personne à adopter des comportements qu’elle n’aurait pas en temps normal.
La nature des fantasmes érotiques d’une personne est aussi à considérer pour témoigner de son attirance sexuelle. On peut avoir des fantasmes exclusivement homosexuels lorsqu’on se masturbe et lors de relations sexuelles avec des partenaires de sexe opposé. L’absence de comportement homosexuel ne veut pas dire que la personne n’est pas homosexuelle. Le fait d’avoir besoin d’un fantasme homosexuel pour s’exciter avec un partenaire de l’autre sexe peut indiquer une orientation homosexuelle. Cette personne n’accepterait pas son homosexualité ou ne serait pas prête à admettre cette éventualité. L’orientation sexuelle n’est donc pas quelque chose de si clair et net pour tous et de nombreuses personnes se questionnent sur leur orientation sexuelle ou vivent une ambivalence à cet égard. Naturellement, le milieu dans lequel on évolue peut également influencer l’acceptation ou non, de même que le dévoilement ou non, de son orientation sexuelle.
Pour ce qui a trait à la bisexualité proprement dite, elle fait référence à une attirance tant pour un sexe que pour un autre. Il y a beaucoup de préjugés qui entourent les personnes bisexuelles. Les gens vont souvent penser que ce sont des êtres qui ont vraiment un très grand nombre de partenaires sexuels. En réalité, les personnes bisexuelles peuvent tomber amoureuses d’une personne peu importe son sexe. Lorsqu’elles sont amoureuses, elles font l’amour avec cette personne. Il n’est donc pas question ici d’avoir plusieurs partenaires en même temps. La bisexualité, tout comme l’homosexualité et l’hétérosexualité, ce n’est pas juste une question de comportement, mais ça implique aussi les sentiments, le désir et les fantasmes. En conclusion, on peut penser que cette nouvelle tendance de sexe «open» peut influencer une augmentation de comportements bisexuels mais que parmi toutes ces personnes qui en font l’expérimentation, une minorité serait réellement bisexuelle.