Un député de l’Opposition dit à l’Assemblée nationale qu’il peut ‘vendre’ la soeur d’un de ses collègues; un autre de la majorité se retrouve en cellule policière alors que de graves allégations pèsent sur lui; un notaire, décrit comme parrain, déjà condamné par le tribunal de l’opinion; des hauts gradés de la police seraient, paraît-il, complices d’actes répréhensibles alors que des meurtres commis demeurent non-élucidés pour raisons inexpliquées; un commissaire d’une institution anti-corruption dénoncé pour pratiques douteuses alléguées et qui ne juge pas nécessaire de s’expliquer : voilà où l’on en est avec des gens exerçant des professions, naguère jugées nobles, occupées aujourd’hui par des Mauriciens qui font tiquer, sinon douter.
Ces affaires ne font pas honneur à la République. Elles donnent une image sale, pourrie, désordonnée, déformée du pays. Un pays gangrené de l’intérieur, un pays où la notion de la République n’a plus aucune valeur. Car, au-delà des individus, ce sont nos institutions qui sont secouées, bafouées, critiquées. On ne respecte plus nos institutions ! De toute manière, que respecte-t-on aujourd’hui a-t-on envie de se demander? quand principe, éthique, morale ne sont plus que des mots creux, vides de sens, que doit-on penser ? Quand la corruption devient monnaie courante, quand la dégradation fait désormais partie de notre quotidien, quand la dérive devient visible, quand nous perdons nos repères, à quoi peut-on avoir recours ?
C’est pour notre salut à tous, parce qu’on a un avenir commun, parce qu’on se soucie de ce que sera le demain de nos enfants, et parce qu’on veut rêver d’une nation saine qu’il faudrait chasser le pessimisme et repousser le cynisme. En souhaitant d’abord une moralité dans la vie politique, même si, paraît-il, ‘moralité pas rempli ventre’ dans ce pays. L’occasion est donnée aux politiciens - à une année des élections législatives - de se remettre en question, de bien réfléchir sur le choix des candidats, de s’interroger sur le critère castéiste - cet étau qui conduit directement au ghetto - qui ne rime pas forcément avec intégrité, honnêteté et honneur. Le même souci, les mêmes règles, la même vigilance devraient primer, s’agissant de ceux qui seront appelés à diriger nos institutions. Et ce, dans l’intérêt public !
L’heure n’est pas à la rigolade. Les Mauriciens attendent un signal fort qui ne serait pas uniquement symbolique. Maurice veut retrouver sa confiance. La République doit se ressaisir. Les politiciens qui, pour faire passer le temps, mâchent les formules toutes faites, souvent vides de sens, et qui aiment citer Singapour comme exemple, se doivent d’être courageux. Les grands mots sont faciles, le courage politique est une denrée rare. Or, il faut du courage et de la ténacité pour procéder à un grand nettoyage. La République a besoin de se guérir de ses maux trop longtemps ignorés. Le peuple veut être gouverné et protégé par des politiciens qui donnent l’exemple, montrent la voie et nous mènent à bon port. L’adage populaire et terre-à-terre dit que ‘quand on veut, on peut’.
Pour preuve, nous avons heureusement encore quelques rares remparts face à ce tableau noirci de jour en jour. La résistance vient en ce moment d’un Parquet solide, capable de ne pas se laisser marcher dessus. Tant mieux ! Pourvu que ça dure...